combats (Orígenes)

De plus, supposons que les oiseaux aient entre eux des combats, et que, comme dit Celse, les oiseaux divinateurs et les autres animaux sans raison aient une nature divine et des notions de la divinité, et une prévision de l’avenir : ils le prédiraient aux autres. Alors, le passereau dont parle Homère ne ferait pas son nid là où le dragon va le dévorer lui et ses petits, et le serpent du même poète aurait évité d’être pris par l’aigle. Voici le passage de l’admirable Homère sur le premier : « Alors nous apparut un terrible présage. Un serpent au dos rutilant, effroyable, appelé à la lumière par le Dieu même de l’Olympe, jaillissant de dessous un autel s’élança vers le platane. Une couvée était là, de tout petits passereaux, juchés sur la plus haute branche et blottis sous le feuillage – huit petits ; neuf, en comptant la mère dont ils étaient nés. Le serpent les mangea tous malgré leurs pauvres petits cris. Autour de lui la mère voletait, se lamentant sur sa couvée. Il se love et soudain la saisit par l’aile, toute piaillante. Mais, à peine eut-il mangé les petits passereaux et leur mère avec eux, que le dieu qui l’avait fait paraître en fit un signe mémorable : le fils de Cronos le Fourbe l’avait soudain changé en pierre. Nous restions immobiles, à admirer l’événement, comment de si terribles monstres étaient venus troubler l’hécatombe des dieux. » Et sur le second : « Un présage leur vient d’apparaître quand ils brûlaient de le franchir (le fossé) : un aigle, volant haut, qui laisse l’armée sur sa gauche. Il porte dans ses serres un serpent rouge, énorme, qui vit, qui palpite encore et qui n’a pas renoncé à la lutte. A l’oiseau qui le tient, il porte un coup à la poitrine, près du cou, en se repliant soudain en arrière. L’autre alors le jette loin de lui à terre : saisi par la douleur, il le laisse tomber au milieu de la foule, et avec un cri s’envole, lui, dans les souffles du vent. Les Troyens frissonnent à voir à terre, au milieu d’eux, le serpent qui se tord, présage de Zeus porte-égide. » LIVRE IV

Aussitôt après, il veut indiquer les énigmes que nous aurions mal comprises dans notre doctrine sur Satan et il ajoute : Les Anciens parlent en termes énigmatiques d’une guerre divine. Héraclite s’exprime ainsi: « Il faut savoir que le conflit est communauté, la justice discorde, tout devient par discorde et par nécessité. » Et Phérécyde, bien plus ancien qu’Héraclite, raconte le mythe d’une armée rangée contre une armée, dont l’une a pour chef Cronos et l’autre Ophionée. Il narre leurs défis, leurs combats, la convention intervenue que celui des deux partis qui tomberait dans l’Océan serait vaincu, et celui qui l’aurait chassé et vaincu posséderait le ciel. Telle est, dit-il, la signification que renferment les mystères traitant de la guerre des Titans et des Géants contre les dieux, et en Egypte, les mystères de Typhon, Horus et Osiris. LIVRE VI

Alors, de nouveau il badine et raille à son habitude, introduisant deux fils de dieux: l’un, fils du démiurge, l’autre, de Dieu, d’après Marcion. Il décrit leurs combats singuliers et les dit combats de cailles, comme l’étaient ceux des dieux leurs pères: rendus par la vieillesse inutiles et radoteurs, incapables d’animosité réciproque, ils laissent combattre leurs enfants. Il nous faut donc lui appliquer ce qu’il a dit plus haut : quelle vieille femme, fredonnant pour endormir un bébé, n’aurait honte de sornettes pareilles aux siennes dans ce qu’il intitule ” Discours véritable “. Il aurait dû s’opposer sérieusement aux doctrines. Mais laissant la question, il badine et bouffonne, croyant écrire des mimes ou autres satires, sans voir qu’une telle méthode d’argumenter contredit son propos de nous faire abandonner le christianisme pour adopter ses doctrines. Présentées avec plus de sérieux, elles eussent peut-être été plus plausibles ; mais puisqu’il se fait railleur, badin et bouffon, on doit dire : c’est faute d’arguments sérieux – et de fait il n’en avait pas et n’en connaissait pas – qu’il est tombé dans cette profonde niaiserie. LIVRE VI

S’il veut que reprennent nos luttes et nos combats pour la religion, les adversaires peuvent se présenter, nous leur dirons : « Je puis tout en Celui qui me fortifie, le Christ Jésus notre Seigneur. » Car, ainsi que l’a dit l’Écriture, quoique deux passereaux ne vaillent pas une obole, « pas un seul ne tombe dans le filet sans la permission du Père qui est dans les cieux ». Et la divine Providence embrasse tellement toutes choses que même les cheveux de notre tête ne laissent pas d’être comptés par elle. LIVRE VIII

A quoi il faut répondre : quand l’occasion s’en présente, nous apportons aux empereurs un secours divin, pour ainsi dire, en nous revêtant de « l’armure de Dieu. » Nous le faisons pour obéir à la voix de l’Apôtre qui dit : « Je vous recommande donc avant tout de faire des demandes, des prières, des supplications, des actions de grâce pour tous les hommes, pour les rois et tous les dépositaires de l’autorité. » Et plus on a de piété, plus on secourt efficacement ceux qui règnent, bien mieux que les soldats qui vont aux combats et tuent autant d’ennemis qu’ils peuvent. Mais voici encore ce qu’on pourrait dire aux étrangers à la foi qui nous demandent de combattre en soldats pour le bien public et de tuer des hommes. Même ceux qui, d’après vous, sont prêtres de certaines statues et gardiens des temples de vos prétendus dieux ont soin de garder leur main droite sans souillure pour les sacrifices, afin d’offrir à ceux que vous dites dieux les sacrifices traditionnels avec des mains pures de sang et de meurtre. Et sans doute, en temps de guerre, vous n’enrôlez pas vos prêtres. Si donc cette conduite est raisonnable, combien plus celle des chrétiens ! Pendant que d’autres combattent en soldats, ils combattent comme prêtres et serviteurs de Dieu ; ils gardent pure leur main droite, mais luttent par des prières adressées à Dieu pour ceux qui se battent justement et pour celui qui règne justement, afin que tout ce qui est opposé et hostile à ceux qui agissent justement puisse être vaincu. De plus, nous qui par nos prières vainquons tous les démons qui suscitent les guerres, font violer les serments et troublent la paix, nous apportons à l’empereur un plus grand secours que ceux que l’on voit combattre. Et nous collaborons aux affaires publiques en faisant monter, dans la justice, nos prières jointes aux exercices et aux méditations qui enseignent à mépriser les plaisirs et à ne plus les avoir pour guides. Plus que d’autres nous combattons pour l’empereur. Nous ne servons pas avec ses soldats, même s’il l’exige, mais nous combattons pour lui en levant une armée spéciale, celle de la piété, par les supplications que nous adressons à la divinité. LIVRE VIII