phobos
Il y a trois choses, dit alors le bienheureux Cheremon, qui retiennent l’homme de s’abandonner au vice : la crainte de l’enfer ou des lois terrestres, l’espérance et le désir du royaume des cieux, l’affection du bien pour lui-même et l’amour des vertus. Nous lisons, en effet, que la crainte exècre la souillure du mal : «La crainte du Seigneur hait le mal.» (Pro 8,13). L’espérance aussi ferme l’entrée du coeur au vice, quel qu’il soit : «Ceux qui espèrent en Lui ne pécheront point.» (Ps 33,23). L’amour enfin n’a pas à redouter la ruine du péché, parce que «la charité ne passe point», (1 Cor 13,8) «elle couvre la multitude des péchés». (1 Pi 4,8). Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA CHEREMON
De vrai, c’est la foi qui fait éviter la souillure du vice par crainte du jugement futur et des éternels supplices; c’est l’espérance qui rappelle notre esprit des choses présentes et, dans l’attente des célestes récompenses, méprise tous les plaisirs du corps; c’est la charité qui, nous enflammant d’une sainte ardeur à l’amour du Christ et à cueillir le fruit des vertus spirituelles, nous inspire une aversion suprême pour tout ce qui leur est contraire. Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA CHEREMON
Dieu est, en effet, le seul qui fasse le bien, sans y être invité par la crainte ou par l’espoir d’une récompense, mais parle par amour de la bonté : «Le Seigneur a tout fait pour Soi-même,» dit Salomon. (Pro 16,4). Dans la vue de sa bonté, il prodigua l’abondance de tous les biens aux dignes et aux indignes. Ni les injures ne le lassent, ni les iniquités des hommes ne le peuvent émouvoir de douleur, bonté indéfectible, immuable nature. Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA CHEREMON
Donnez-moi une âme qui veut tendre à la perfection : elle doit laisser le premier degré, qui est celui de la crainte; état proprement servile, nous l’avons indiqué, et duquel il est écrit : «Lorsque vous aurez fait tout ce qu’on vous aura commandé, dites : Nous sommes des serviteurs inutiles.» (Lc 17,10). Qu’elle s’élève par un progrès continu jusqu’aux voies supérieures de l’espérance. Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA CHEREMON
Celle-ci ne se compare plus à la condition d’esclave, mais à celle de mercenaire. L’espérance, en effet, attend la récompense. Certaine d’être pardonnée et sans crainte du châtiment consciente d’ailleurs des bonnes oeuvres accomplies, elle poursuit le prix auquel Dieu S’est engagé. Mais elle n’est pas encore parvenue à ce sentiment du fils qui, se confiant en l’indulgence et la libéralité paternelles, ne doute pas que tout ce qui est à son père ne soit également sien. Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA CHEREMON
Voyez : il a envié les gousses que mangeaient les pourceaux, c’est-à-dire le mets sordide du vice; et on lui refusait de s’en rassasier. Alors, il est rentré en soi-même. Touché d’une crainte salutaire, il s’est pris d’horreur pour l’immondicité des pourceaux, il a redouté les tourments cruels de la faim. Ces sentiments font de lui en quelque sorte un esclave. Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA CHEREMON
C’est le précepte même du Seigneur qui nous invite à cette ressemblance avec le Père : «Soyez parfaits, dit-il, comme votre Père céleste est parfait.» (Mt 5,48). Dans les degrés inférieurs, l’amour du bien s’interrompt quelquefois, lorsque la tiédeur, le contentement ou le plaisir viennent détendre la vigueur de l’âme, et font perdre de vue, sur le moment, la crainte de l’enfer ou le désir du bonheur futur. Ils constituent néanmoins comme des échelons dans le progrès, un apprentissage. Après avoir évité le vice, au commencement, par crainte du châtiment ou l’espoir de la récompense, il nous devient possible de passer au degré de la charité, où la crainte ne se trouve plus : «Il n’y a pas de crainte dans l’amour, mais l’amour bannit la crainte : car la crainte suppose un châtiment, et celui qui craint n’est pas parfait dans l’amour. Nous donc aimons Dieu, parce qu’il nous a aimés le premier.» (1 Jn 4,18-19). Nul autre chemin, pour nous élever à la perfection véritable : comme Dieu nous a aimés le premier sans égard à rien d’autre que notre salut, ainsi devons nous l’aimer uniquement pour son amour. Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA CHEREMON
Efforçons-nous donc avec une ardeur entière de monter de la crainte à l’espérance, de l’espérance à la charité de Dieu et à l’amour des vertus. Allons nous établir dans l’affection du bien pour lui-même, et demeurons-y attachés immuablement, autant qu’il est possible à l’humaine nature. Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA CHEREMON
En vérité, c’est tout autre chose d’avoir en haine la souillure des vices et de la chair, parce que l’on goûte le bien déjà présent, ou, de refréner les convoitises illicites en vue de la récompense future; de craindre un dommage actuel, ou de redouter des tourments à venir. C’est enfin une perfection beaucoup plus grande de ne vouloir pas s’éloigner du bien pour l’amour du bien lui-même, que de ne pas donner son consentement au mal par peur de souffrir un autre mal. Dans le premier cas, le bien est volontaire; dans le second, il paraît forcé, et arraché de haute lutte à un refus par la crainte du supplice ou l’appétit de la récompense. Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA CHEREMON
Aussi bien, celui qui ne renonce aux séductions du vice que par le motif de la crainte, retournera, dès que la crainte sera évanouie qui faisait obstacle à son penchant, vers l’objet de ses amours. Pour lui, pas de stabilité dans le bien. Point de repos non plus du côté de la tentation, parce qu’il n’a point la paix solide et constante que donne la chasteté. Où règne le tumulte de la guerre, il est impossible d’échapper au risque d’être blessé. Pour propre que l’on soit à la lutte et vaillant dans le combat, bien que l’on porte souvent aux adversaires de mortelles blessures, il est fatal, dès là qu’on est engagé dans la mêlée, que l’on tâte quelquefois du fer ennemi. Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA CHEREMON
La confiance au secours divin nous méritera ces dispositions, non la présomption que nous pourrions concevoir de nos propres efforts. L’âme qui, les possède sort de la condition servile, caractérisée par la crainte, et du désir mercenaire de l’espérance, qui s’attache à la récompense plus qu’à la bonté de Celui qui la donne, pour passer à l’adoption des fils, où la crainte ne se trouve plus, ni le désir, mais où règne à jamais la charité qui ne meurt pas. Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA CHEREMON
Ces reproches du Seigneur aux Juifs montrent bien à qui convient la crainte ou l’amour : «Le fils honore son père, et l’esclave craint son maître. Si je suis père, où est l’honneur qui me revient ? Et si je suis maître, où est la crainte qui m’est due ?» (Mt 1,6). L’esclave craint nécessairement, en effet : Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA CHEREMON
Question : Pourquoi dire imparfaits le sentiment de la crainte et celui de l’espérance ? Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA CHEREMON
GERMAIN. — Ce que vous avez dit sur le parfait amour de Dieu est d’une éloquence puissante et magnifique. Une chose cependant, nous trouble beaucoup. Tandis que vous l’élevez si haut, vous déclarez imparfaites la crainte de Dieu et l’espérance de la rétribution éternelle. Or, le prophète semble avoir été, sur ce point, d’un sentiment tout autre : «Craignez le Seigneur, dit-il, vous tous, ses saints, parce que rien ne manque à ceux qui le craignent.» (Ps 33,10). Ailleurs, il avoue s’être exercé à l’observation des commandements de Dieu dans la vue de la récompense : «J’ai incliné mon coeur à observer vos commandements à cause de la récompense.» (Ps 117,112). L’Apôtre nous dit d’autre part : «C’est par la foi que Moïse, devenu grand, refusa d’être le fils de la fille du Pharaon, autant mieux être affligé avec le peuple de Dieu, que de jouir des délices passagères du péché, il considéra l’opprobre du Christ comme une richesse plus grande que les trésors de l’Égypte, car il avait les yeux fixés sur la récompense.» (Heb 11,24-26). Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA CHEREMON
Il est vrai, l’Écriture loue ceux qui craignent Dieu : «Heureux tous ceux qui craignent le Seigneur» (Ps 127,1) et leur promet, par ce moyen, la béatitude parfaite. Cependant, elle dit aussi : «Il n’y a pas de crainte dans l’amour, mais l’amour parfait bannit la crainte; car la crainte suppose un châtiment, et celui qui craint n’est pas parfait dans l’amour.» (1 Jn 4,18). Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA CHEREMON
Vous le voyez donc, la perfection comporte différents degrés. D’un sommet, le Seigneur nous appelle à monter vers un sommet plus élevé. Celui qui s’est rendu bienheureux et parfait dans la crainte de Dieu, marchera, comme il est écrit, «de vertu en vertus», (Ps 83,8) et de perfection en perfection, c’est-à-dire qu’il s’élèvera, dans l’allégresse de son âme, de la crainte à l’espérance; puis, il entendra de nouveau l’appel divin l’inviter à un état plus saint encore, qui est l’amour. Celui qui se sera montre «serviteur fidèle et prudent», (Mt 24,45) passera au commerce intime de l’amitié et à l’adoption des fils. Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA CHEREMON
C’est dans ce sens qu’il faut prendre mes paroles. Je n’entends pas dire que la considération des peines éternelles ou de la bienheureuse rétribution promise aux saints, ne soit de nulle valeur. Elle est utile, au contraire, puisqu’elle introduit ceux qui s’y donnent dans les premiers degrés de la béatitude. Mais la charité rayonne d’une confiance plus pleine et déjà de la joie sans fin. S’emparant d’eux à son tour, elle les fera passer de la crainte servile et de l’espérance mercenaire à la dilection de Dieu et à l’adoption des fils. Si l’on peut ainsi parler, de parfaits qu’ils étaient, elles les rendra plus parfaits encore. «Il y a beaucoup de demeures dans la maison de mon Père,» (Jn 14,2) dit le Sauveur. Tous les astres brillent au ciel; toutefois, entre l’éclat du soleil, de la lune, de Vénus et des autres étoiles, il y a bien de la distance. Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA CHEREMON
Aussi le bienheureux Apôtre préfère-t-il la charité, non seulement à la crainte et à l’espérance, mais à tous les charismes, si grands et si merveilleux dans l’estime des hommes; et il la montre comme la voie excellente entre toutes sans comparaison. Après avoir achevé la liste des charismes spirituels, il se propose de décrire les manifestations diverses de la charité. Or, voici comme il commence : «Aussi bien, je vais vous montrer une voie excellente entre toutes. Quand je parlerais les langues des hommes et des anges, que j’aurais le don de prophétie, connaîtrais tous les mystères et posséderais toute science; quand j’aurais la foi jusqu’à transporter les montagnes, que je distribuerais tous mes biens pour la nourriture des pauvres et livrerais mon corps aux flammes : si je n’ai l’amour, tout ne me sert de rien.» (1 Cor 12,31). Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA CHEREMON
De la crainte qui naît de la grandeur de l’amour Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA CHEREMON
Fondé dans la charité parfaite, on s’élèvera nécessairement à un degré plus excellent encore et plus sublime, qui est la crainte d’amour. Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA CHEREMON
Un des prophètes en a bien exprimé la grandeur : «Les richesses du salut, dit-il, sont la sagesse et la science; mais la crainte du Seigneur en est le trésor.» (Is 33,6). Il ne pouvait marquer plus évidemment sa dignité ni son prix, qu’en disant que les richesses de notre salut, ou la vraie sagesse de Dieu et la science, ne se gardent que par elle. C’est pourquoi ce sont les saints, et non les pécheurs, que l’oracle du psaume invite à cette crainte : «Craignez le Seigneur, vous tous ses saints, car rien ne manque à ceux qui le craignent.» (Ps 33,10). Tant il est vrai que rien ne manque à la perfection de qui en est pénétré. Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA CHEREMON
Quant à la crainte du châtiment, l’apôtre Jean dit clairement : «Celui qui craint n’est pas parfait dans l’amour, parce que la crainte suppose un châtiment.» (1 Jn 4,18). Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA CHEREMON
Ainsi, la distance est considérable entre la crainte à quoi rien ne manque, trésor de la sagesse et de la science, et la crainte imparfaite. Celle-ci n’est que «le commencement de la sagesse», (Ps 110,10) et, supposant un châtiment, se voit bannir du coeur des parfaits, lorsque survient la plénitude de la charité : car «il n’y a point de crainte dans l’amour, mais l’amour parfait bannit la crainte.» (1 Jn 4,18). De fait, si le commencement de la sagesse est dans la crainte, où sera sa perfection, si ce n’est dans la charité du Christ, laquelle comprend en soi la crainte de dilection parfaite, et mérite pour ce fait d’être appelée, non plus le commencement, mais le trésor de la sagesse et de la science ? Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA CHEREMON
Donc il y a dans la crainte deux degrés. Le premier se remarque chez les commençants, qui tremblent encore servilement sous le joug. C’est d’eux qu’il est dit : «Le serviteur craindra son maître;» (Mal 1,6) et, dans l’Évangile : «Je ne vous appelle plus serviteurs, parce que le serviteur ne sait pas ce que fait son, maître.» (Jn 15,14). Il est dit encore ailleurs, comme une suite de cet état : «L’esclave ne demeure pas toujours dans la maison; mais le fils y demeure toujours.» L’Écriture veut par là nous persuader de passer de la crainte du châtiment à la pleine liberté de la charité, et à la confiance qui est le propre des amis et des fils. Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA CHEREMON
Écoutez encore le bienheureux Apôtre. Il a dépassé jadis, par la vertu de la charité divine, ce degré de la crainte servile. Et maintenant, il proclame, avec une sorte de mépris pour cette vertu inférieure, qu’il a été enrichi de dons plus magnifiques : «Ce n’est pas un esprit de crainte que Dieu nous a donné, mais un Esprit de force, d’amour et de modération.» (2 Tim 1,7). Puis, il exhorte ceux qui brûlent pour le Père céleste de la dilection parfaite, et que l’adoption divine d’esclaves a rendus fils : «Vous n’avez pas reçu un Esprit de servitude, pour être encore dans la crainte; mais vous avez reçu un Esprit d’adoption, en qui nous crions : Abba ! Père !» (Rom 8,15). Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA CHEREMON
C’est aussi de la crainte d’amour que parle le prophète, lorsqu’il décrit l’Esprit septiforme qui devait descendre sur l’Homme-Dieu en vertu de l’Incarnation : «Sur lui, dit-il, reposera l’Esprit du Seigneur : Esprit de sagesse et d’intelligence, Esprit de conseil et de force, Esprit de science et de piété,» (Is 11,2) puis, à la fin, comme le couronnement de tous ces dons : «Et l’Esprit de crainte du Seigneur le remplira.» (Ibid. 3). Sur quoi, il importe avant tout de bien considérer qu’il ne dit pas : «L’Esprit de crainte reposera sur lui,» comme il avait fait pour les autres, dons, mais : «L’Esprit de crainte le remplira.» Cet Esprit s’épanche, en effet, avec une telle abondance, que, lorsqu’il s’est emparé d’une âme, il la possède tout entière. Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA CHEREMON
C’est logique. Ne faisant qu’un avec la charité qui ne passera jamais, non seulement il remplit, mais il possède inséparablement et pour toujours celui dont il s’est emparé, sans que les complaisances de la joie ou des plaisirs d’ici-bas le puissent diminuer : ce qui arrive plus d’une, fois à la crainte que bannit l’amour. Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA CHEREMON
Telle est la crainte des parfaits dont fat rempli l’homme-Dieu qui n’était pas venu seulement pour nous racheter, mais devait aussi nous donner dans sa personne le type de la perfection et l’exemplaire des vertus. Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA CHEREMON
Quant à la crainte servile du châtiment, vrai Fils de Dieu comme il était, «qui ne commit pas le péché, et dont la bouche ignora la ruse», (1 Pi 2,22) il ne pouvait l’avoir. Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA CHEREMON
Que chacun s’anime d’ailleurs à sa conquête du même désir, du même amour, de la même impatiente ardeur qui se voient chez l’avare dévoré de la cupidité, chez l’ambitieux que possède la soif des honneurs, chez l’homme emporté par la violence intolérable d’une passion mauvaise. Brûlé d’un insatiable désir de la perpétuelle intégrité, il méprisera la nourriture, même désirable; la boisson, même nécessaire, lui donnera de l’aversion; il repoussera enfin le sommeil même qu’il doit à la nature, ou du moins ne le prendra qu’avec une âme toute saisie de crainte et en défiance contre un ennemi si perfide de la pureté, un adversaire si déclaré de la chasteté. Les Conférences: DEUXIÈME CONFÉRENCE DE L’ABBÉ CHEREMON
Au surplus, que l’on ne s’imagine point maîtriser ou bannir le désir des choses présentes, si en la place de ces penchants mauvais, que l’on aspire à retrancher, l’on n’en fait succéder de bons. La force vitale de l’âme ne lui permet pas de rester sans quelque sentiment de désir ou de crainte, de joie ou de tristesse; il n’est que de la bien occuper. Nous voulons chasser de notre coeur les convoitises de la chair : livrons incontinent la place aux joies spirituelles. Prise à cet heureux filet, l’âme aura désormais où se fixer, et rejettera les séductions des joies présentes, des bonheurs qui passent. Les Conférences: DEUXIÈME CONFÉRENCE DE L’ABBÉ CHEREMON
Là s’arrêta le discours de l’abbé Cheremon sur la chasteté parfaite; telle fut la conclusion qu’il donna à son admirable doctrine sur la pureté la plus sublime. Si grande cependant était notre stupeur, que nous restions comme oppressés. Mais lui, voyant que la plus grande part de la nuit était déjà passée, nous conseilla de ne point dérober à la nature le sommeil qu’elle réclame, de crainte que la torpeur du corps n’alanguît l’âme à son tour, et ne lui fit perdre sa vigoureuse et sainte ardeur. Les Conférences: DEUXIÈME CONFÉRENCE DE L’ABBÉ CHEREMON
La divine Écriture confirme l’existence de notre libre arbitre : «Garde ton coeur, dit-elle, en toute circonspection.» (Pro 4,23) Mais l’Apôtre manifeste son infirmité. «Que le Seigneur garde vos coeurs et vos intelligences dans le Christ Jésus.» (Phil 4,7) — David énonce sa vertu, lorsqu’il dit : «J’ai incliné mon coeur à observer tes commandements;» (ps 118) mais il enseigne aussi sa faiblesse, lorsqu’il fait cette prière : «Incline mon coeur vers tes enseignements, et non vers l’avarice;» (Ibid. 36) et de même Salomon : «Que le Seigneur incline vers lui nos coeurs, afin que nous marchions dans toutes ses voies, et que nous gardions ses commandements, ses cérémonies et ses jugements.» (3 Rois 8,58) — C’est la puissance de notre liberté que désigne le psalmiste, en disant : «Préserve ta langue du mal, et tes lèvres des paroles trompeuses;» (ps 33,14) mais nous attestons son infirmité dans cette prière : «Place, Seigneur, une garde à ma bouche, une sentinelle à la porte de mes lèvres.» (ps 140,3) — Le Seigneur déclare ce dont est capable notre volonté, lorsqu’il dit : «Détache les chaînes de ton cou, captive, fille de Sion» (Is 52,2); d’autre part, le prophète chante sa fragilité : «C’est le Seigneur qui délie les chaînes des captifs» (ps 145,7), et : «C’est toi qui as brisé mes chaînes; je t’offrirai un sacrifice d’action de grâces.» — Nous entendons le Seigneur nous appeler, dans l’Évangile, afin que, par un acte de notre libre arbitre, nous nous hâtions vers lui : «Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et ployez sous le fardeau, et je vous soulagerai» (Mt 11,28); mais il proteste aussi de la faiblesse de l’humaine volonté, en disant : «Personne ne peut venir à moi, si le Père, qui m’a envoyé, ne l’attire.» (Jn 6,44) L’Apôtre révèle notre liberté dans ces paroles : «Courez de même, afin de remporter le prix» (1 Co 9,24) ; mais saint Jean le Baptiste atteste sa fragilité lorsqu’il dit : «L’homme ne peut rien prendre de lui-même, que ce qui lui a été donné du ciel.» (Jn 3,27) — Un prophète nous ordonne de garder notre âme avec sollicitude : «Prenez garde à vos âmes» (Jér 17,21), mais le même Esprit fait dire à un autre prophète : «Si le Seigneur ne garde la cité, celui qui la garde veille inutilement.» (ps 126,1) — L’Apôtre, écrivant aux Philippiens, leur dit, pour souligner leur liberté : «Travaillez à votre salut avec crainte et tremblement» (Phil 2,12); mais il ajoute, pour leur en faire voir la faiblesse : «C’est Dieu qui opère en nous le vouloir et le parfaire, de par son bon plaisir» (Ibid. 13). Les Conférences: TROISIÈME CONFÉRENCE DE L’ABBÉ CHEREMON
Si nous attribuons à notre libre arbitre la gloire de nous conduire à la vertu parfaite et l’accomplissement des commandements de Dieu, comment pouvons-nous demander : «Affermis, ô Dieu, ce que tu as accompli en nous !» (ps 57,29); «Dirigez pour nous les oeuvres de nos mains !» (ps 89,17) ? — Balaam est payé pour maudire Israël, et nous voyons qu’il ne lui fut pas permis de remplir son désir. (cf. Nb 22,5 et ss.) — Dieu garde Abimélech, de peur qu’il ne touche Rebecca, et ne pèche contre lui (cf. Gn 20,6). — La jalousie de ses frères fait emmener Joseph au loin (cf. Ibid. 37, 28), pour ménager la descente des fils d’Israël en Égypte; ils méditaient un fratricide, et le secours va leur être préparé pour les jours de famine. C’est ce que Joseph lui-même leur découvre, après avoir été reconnu par eux : «N’ayez point peur, et ne vous affligez pas de m’avoir vendu, pour être conduit dans ce pays. C’est pour votre salut que Dieu m’a envoyé devant vous» (Gn 45,5); et un peu après : «Dieu m’a envoyé devant vous, afin que vous soyez gardés sur la terre, et que vous ayez de la nourriture pour vivre. Ce n’est point par votre conseil, mais par la volonté de Dieu que j’ai été envoyé. Il m’a fait comme le père du Pharaon, le seigneur de toute sa maison et le prince de toute la terre d’Égypte» (Ibid. 7,8). Et comme, après la mort de leur père, ils étaient en proie à la terreur, pour leur ôter tout soupçon de crainte, il leur dit : «N’ayez point peur. Est-ce que nous pouvons résister à la volonté de Dieu ? Vous avez médité de me faire du mal; mais Dieu l’a changé en bien, pour m’exalter, comme vous le voyez présentement, afin de sauver des peuples nombreux» (Ibid. 50,19-20). Pareillement, le bienheureux David déclare, dans le psaume 104, que toutes ces choses arrivaient par une conduite spéciale de Dieu : «Il appela la famine sur le pays, et il les priva de tout le pain qui les soutenait. Il envoya devant eux un homme; Joseph fut vendu comme esclave» (ps 104,16-17). Les Conférences: TROISIÈME CONFÉRENCE DE L’ABBÉ CHEREMON
Ainsi l’homme garde toujours la liberté de mépriser ou d’aimer la grâce de Dieu. L’Apôtre n’aurait pas donné ce précepte : «Travaillez à votre salut avec crainte et tremblement» (Phil 2,12), s’il n’avait su qu’il était en notre pouvoir de le négliger ou d’en prendre soin. Les Conférences: TROISIÈME CONFÉRENCE DE L’ABBÉ CHEREMON
Devant tant d’instances, une crainte respectueuse enchaîne le brave homme. Il avoue que, douze ans écoulés, son intention était de se faire moine. La contrainte exercée par ses parents, jointe à leur autorité, l’ayant déterminé à prendre femme, il a regardé celle-ci comme une soeur et respecté sa virginité, sans que personne ait encore jusqu’ici partagé son secret. Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBÉ NESTEROS
«La louange n’est point belle, qui vient de la bouche du pécheur.» (Ec 15,9). Et Dieu lui dit par le prophète : «Pourquoi racontes-tu mes préceptes et as-tu mon alliance à la bouche ?» On lit encore dans les Proverbes ce mot vraiment topique sur les âmes qui ne possèdent pas d’une façon stable la crainte du Seigneur — dont il est dit : «La crainte du Seigneur est science et sagesse» (Pro 15,33), et qui s’efforcent néanmoins, par une méditation continuelle, de pénétrer le sens des Écritures : «Que sert à l’insensé d’avoir la richesse ? L’homme sans intelligence ne pourra acheter la sagesse.» (Pro 17,16). Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBÉ NESTEROS
De prime abord, quelles que soient les injures dont on le charge, le moine gardera la paix, je ne dis pas seulement sur ses lèvres, mais dans le fond de son coeur. S’il se sent troublé le moins du monde, qu’il se contienne dans un absolu silence, et suive exactement le conseil du psalmiste : «Je me suis troublé, et je n’ai point parlé»; (Ps 76,5). «J’ai dit : Je garderai mes voies, de crainte de pécher par ma langue. J’ai mis une garde à ma bouche, tant que le pécheur se tient en face de moi. Je suis resté muet, et je me suis humilié, et j’ai gardé le silence même pour les choses bonnes.» (Ps 38,2-3). Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBÉ JOSEPH
Le premier renonce à une détermination qu’il avait confirmée par une manière de serment : «Non, jamais vous ne me laverez les pieds.» (Jn 13,8). Mais il mérite pour ce fait d’avoir part éternellement avec le Christ; tandis qu’il était, sans aucun doute, retranché de cette grâce et béatitude, s’il se fût obstinément tenu à sa parole. L’autre, pour garder la foi d’un serment inconsidéré, se fait le sanglant meurtrier du Précurseur; la vaine crainte de se parjurer l’engloutit dans la damnation et les supplices de l’éternelle mort. Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH
La crainte que nous ressentons au sujet du serment prêté en Syrie. Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH
Il se rend faible avec les faibles, lorsque, par condescendance et non comme donnant un ordre, il concède à ceux qui ne peuvent se contenir, de revenir à la vie conjugale; ou quand il donne aux Corinthiens du lait à boire, non de la nourriture solide, vivant parmi eux dans la crainte et dans un grand tremblement. Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH
S’il ne les avait effrayés par ce miséricordieux mensonge, il n’aurait pu revoir son père et son jeune frère, ni les nourrir au milieu d’une disette si terrible, ni enfin laver la conscience de ses frères du crime qu’ils avaient commis en le vendant. Et, par conséquent, il mérite moins d’être repris, pour leur avoir inspiré la crainte à l’aide d’un mensonge qu’il n’est saint et digne d’éloge, pour avoir amené à un salutaire repentir, grâce à ces feintes menaces, des gens qui étaient ses ennemis et qui l’avaient vendu. Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH
De crainte que son habit ne vint à le trahir, il prit un vêtement séculier, puis alla se placer devant la porte. On l’y laissa plusieurs jours, selon la coutume des moines de là-bas, pleurant, se prosternant aux pieds de tous, et souffrant les longs mépris qu’on lui infligeait, afin d’éprouver son désir : «Arrivé au terme de son âge, lui disaient-ils, ce n’était que le besoin d’avoir du pain qui le poussait; et il ne voulait pas sincèrement embrasser la sainteté de leur vie.» Mais enfin, il obtint d’être reçu. Les Conférences: CONFÉRENCE DE L’ABBA PINUFE
Hélas ! il n’est point de fête dont la joie puisse étouffer les aiguillons de la chair. Nous avons en elle un adversaire farouche, que ne sait point adoucir la révérence due aux plus saints des jours. Il est possible toutefois de conserver aux fêtes la solennité fixée par la coutume, sans outrepasser la mesure d’une salutaire parcimonie. Il suffira de ne pas laisser franchir à l’indulgence et aux douceurs les limites suivantes : la nourriture que nous réservions pour la neuvième heure, nous la prendrons un peu plus tôt, c’est-à-dire à la sixième heure, étant donné le caractère festif du temps, mais nous ne changerons rien à la mesure accoutumée ni à la qualité, de crainte que la pureté de corps et l’intégrité d’âme conquises par l’abstinence du carême, ne se perdent par les mitigations de la Pentecôte, et qu’il ne nous serve de rien d’avoir obtenu par le jeûne ce qu’une imprudente satiété ne tarderait pas à nous arracher. Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA THÉONAS
Voyez, d’autre part, celui qui n’a pas méprisé le conseil du Seigneur. Après avoir distribué tous ses biens aux pauvres, il a pris sa croix, et il suit le dispensateur de la grâce. Le péché pourrait-il dominer sur lui ? Sa fortune est déjà consacrée au Christ, ses richesses ne sont plus à lui; et, tandis qu’il en fait pieusement le partage, il n’est point mordu par le souci infidèle de garder pour vivre, aucune hésitation chagrine ne vient gâter la joie qui sied à l’aumône. Avant tout donné à Dieu, rien ne lui appartient plus; et il le dispense comme tel, sans souvenir de ses propres besoins, sans crainte pour le morceau de pain qui le fera vivre, tant il est dans la certitude que, parvenu au dépouillement désiré, Dieu le nourrira avec bien plus de sollicitude encore que l’oiseau du ciel. Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA THÉONAS
S’il faut vaincre la gourmandise, ce n’est pas à cause d’elle seulement, et de peur qu’elle ne nous corrompe par le poids des aliments; ce n’est même pas uniquement par crainte qu’elle n’allume en nous les feux de la concupiscence charnelle; mais c’est encore afin qu’elle ne nous mette pas en l’esclavage de la colère, de la fureur, de la tristesse et des autres vices. Que l’on nous serve, en effet, le boire et le manger en moindre quantité, ou trop tard, ou sans les soins convenables : si la tyrannie de la gourmandise nous domine, nous serons fatalement piqués aussi des aiguillons de la colère. D’autre part, impossible de se délecter dans les saveurs voluptueuses et d’échapper en même temps à la passion de l’argent, reine des apprêts superflus et dispendieux où se plaît la délicatesse. Les Conférences: DEUXIÈME CONFÉRENCE DE L’ABBA THÉODOSE
Le texte poursuit : Si nous nous jugions nous-mêmes, nous ne serions pas jugés (1 Cor, 11,31). En d’autres termes : Si nous nous jugions nous-mêmes indignes de recevoir les sacrés mystères, toutes les fois que la blessure du péché nous a prévenus, nous prendrions soin de nous en approcher dignement, en nous amendant par la pénitence. Au lieu de quoi, le Seigneur est obligé de châtier notre indignité par le dur fouet des maladies. Par cette méthode du moins, viendrons-nous à la componction; et nous irons chercher le remède à nos blessures, dans la crainte d’être condamnés, au siècle à venir, avec les pécheurs de ce monde, n’ayant pas été jugés dignes du châtiment passager de la vie présente. Les Conférences: DEUXIÈME CONFÉRENCE DE L’ABBA THÉODOSE
Et lorsque la crainte des persécuteurs, prêts à fondre sur lui, le pousse à renier son Maître par trois fois, peut-on nier qu’il n’ait fait une chute évidente ? Cependant, le repentir suit immédiatement la faute; ses larmes très amères lavent la souillure d’un si grand crime; il ne perd pas la couronne de la sainteté et de la justice. Les Conférences: DEUXIÈME CONFÉRENCE DE L’ABBA THÉODOSE
Même l’Apôtre Paul, dont la somme de souffrances a passé le labeur de tous les saints, n’a pas rempli cet idéal. Nous l’affirmons sans crainte, d’autant que c’est lui-même qui proteste aux disciples, dans les Actes : Vous savez que ces mains ont pourvu à ma subsistance et à celle de mes compagnons (Ac 22,34), et qui écrit aux Thessaloniciens : J’ai travaillé nuit et jour, dans la peine et la fatigue (2 Thess 3,8). Il acquérait de ce fait, j’y consens, des trésors de mérites. Néanmoins, son âme, pour sainte et sublime qu’elle fût, ne pouvait faire autrement que d’être quelquefois séparée de la céleste théorie, par l’application au travail terrestre. Les Conférences: TROISIÈME CONFÉRENCE DE L’ABBA THÉONAS
GERMAIN. – Vous ne laissez, sur ce point, aucune place au doute. Oui, nous en sommes certains, nous ne pourrions, dans le voisinage de nos parents, nous vêtir misérablement ni aller tous les jours pieds nus, comme nous faisions ici. Nous ne prendrions pas non plus tant de peine, pour nous procurer les choses nécessaires à la vie, comme d’apporter l’eau sur nos épaules d’une distance de trois milles. La honte, et ta crainte de les faire rougir eux-mêmes, nous empêcheraient d’en agir de la sorte à leur vue. Les Conférences: CONFÉRENCE DE L’ABBA ABRAHAM
Les plaisirs que nous aimons, font eux-mêmes notre tourment; les jouissances et les délices du corps se retournent contre nous comme autant de bourreaux. Celui-là, en effet, qui s’appuie sur ses biens et ses ressources d’autrefois, fatalement ne parviendra ni à l’entière humilité du coeur ni à la parfaite mortification des plaisirs mauvais. Or, autant, par le secours de ces vertus, les extrémités de la vie présente et les pertes que l’ennemi peut nous infliger, se supportent, je ne dirai pas seulement avec la plus grande patience, mais avec la joie la plus vive; autant leur absence laisse croître un élèvement pernicieux, qui, pour le plus léger affront, nous blesse des traits mortels de l’impatience. C’est alors que le prophète Jérémie nous adresse ces paroles : Et maintenant, qu’as-tu à faire sur la route de l’Égypte, pour aller boire de l’eau bourbeuse ? Et qu’as-tu à faire sur la route de l’Assyrie, pour aller boire de l’eau du fleuve ? Ta malice t’accusera, et ton infidélité te reprendra. Sache donc et comprends quel mal c’est pour toi, quelle amertume, d’avoir abandonné le Seigneur ton Dieu, et que ma crainte ne soit plus en toi, dit le Seigneur (Jér 2,18-19). Les Conférences: CONFÉRENCE DE L’ABBA ABRAHAM
Mais les saints jouiront seuls de ces services à juste titre et avec assurance, parce qu’ils auront d’abord tout abandonné, leur personne et leurs biens, pour le service des frères, par un volontaire sacrifice. Selon la Parole du Seigneur (cf. Mt 7,2), ils recevront sans crainte ce qu’ils auront eux-mêmes abandonné aux autres. Mais, pour celui qui n’aura pas tout sacrifié à ses frères, avec une sincère humilité, comment accepterait-il patiemment le don des autres ? Il sentira que leurs bons offices lui sont un fardeau, plutôt qu’une consolation, parce qu’il a mieux aimé être servi que servir. Les Conférences: CONFÉRENCE DE L’ABBA ABRAHAM