Boehme Utilidade Encarnação

Jacob Boehme — Da Encarnação de Jesus Cristo
Como o Verbo eterno se tornou homem, e da Virgem Maria
CHAPITRE XI. De l’utilité. A quoi sert à nous autres pauvres enfants d’Eve, l’incarnation et la naissance de Jésus-Christ, le Fils de Dieu.

La plus sublime porte.

1. Nous, pauvres enfants d’Eve, étions tous morts en Adam, et quoique nous vécussions, ce n’était cependant qu’à ce monde, la mort nous attendait et engloutissait l’un après l’autre ; il n’y avait point de salut pour nous, si Dieu ne nous eût pas engendrés de nouveau de son être; nous n’aurions pas reparu dans nos corps en toute éternité, et. nos âmes seraient éternellement demeurées dans la source de la colère divine, auprès de tous les démons. Mais l’incarnation de Jésus-Christ nous est une puissance acquise, car pour l’amour de nous, Dieu est devenu homme, afin qu’il retirât notre humanité de la mort en lui et délivrât nos âmes du feu de la colère divine. Car l’âme est en elle-même une source de feu et s’originise du premier principe, l’âpre rigidité qui n’engendre que le feu. Si donc l’on retire à l’âme ainsi constituée la douceur et l’amour divins, ou si elle est infectée de matière tout à fait âpre, elle demeure une source dans les ténèbres, une âpreté très rude, se dévorant elle-même et engendrant néanmoins dans la volonté toujours une nouvelle faim. Car une chose qui n’a ni commencement ni fond, n’a, de même, pas de fin : elle est elle-même son fond et s’engendre soi-même.

2. Nous ne voulons cependant pas dire non plus que l’âme soit sans commencement : elle en a un, mais selon la créature seulement, non selon l’essence ; son essence est dès l’éternité, car le fiât divin l’a saisie dans le centre de la nature éternelle et amenée en être substantiel ; de plus, avec la -J- entière, avec le caractère de la Sainte-Trinité, comme une ressemblance du triple esprit de la divinité dans laquelle Dieu habite; selon que cela a lieu dans l’amour ou dans la colère, cela se trouve dans la lumière ou dans le feu : l’âme s’engrosse de ce dans quoi elle porte son imagination, car elle est un esprit magique, une source en soi-même. Elle est le centre de l’éternité, un feu de la divinité dans le père ; non, toutefois, dans la liberté du père, mais dans l’éternelle nature : elle n’est pas avant l’être, mais dans l’être; la liberté divine, par contre, est hors de l’être, mais habite dans l’être. Car dans l’être, Dieu est manifeste, et sans l’être il n’y aurait point de Dieu, ce serait un silence éternel sans source; mais le feu est engendré dans la source et du feu la lumière; les deux se séparent alors et ont chacun leur source, savoir une furieuse, affamée et altérée clans le feu, et une douce, aimable et donnante dans la lumière, car la lumière donne et le feu prend. La lumière donne la douceur qui se transforme en substantialité, laquelle est l’aliment du feu, sans quoi il serait une faim furieuse et ténébreuse en soi-même, tel qu’est un esprit privé de l’essence de la lumière, cela se compare à un poison défaillant; mais s’il reçoit la douceur, il l’attire en soi, habite en elle et en fait son aliment et son corps, il s’en imprègne et s’en engrosse, car la douceur le remplit, en sorte que la faim est apaisée.

3. Considérons donc l’âme humaine : elle fut prise du centre de la nature, non du miroir de l’éternel ou de la source de ce monde, mais de l’éternelle essence de l’esprit de Dieu, du premier principe, de la qualité du père selon la nature ; non d’une substance ou de quelque chose, mais l’esprit de la divinité lui insuffla lui-même la vie, entendez à l’image en Adam, de tous les trois principes. Il lui a insufflé pour sa vie, le centre de la nature soit la source de feu, et aussi la douceur de l’amour, de l’être de la divinité, soit l’autre principe, avec la substantialité divine céleste, et aussi l’esprit de ce monde, comme le miroir et la représentation de la sagesse divine et de ses merveilles.

Mais l’esprit de ce monde est corrompu par l’en-ilammement du diable et le poison qu’il y a introduit, car Satan habite ce monde et infecte constamment la nature et la propriété extérieures, bien qu’il ne soit puissant que dans la fureur ou dans l’âpre désir ; mais il porte son imagination et sa fausse teinture même dans l’amour et empoisonne le meilleur joyau des âmes; il a infecté l’âme d’Adam par son imagination et son méchant esprit affamé, de telle sorte qu’elle désira la source terrestre et s’en engrossa par ce désir, ce qui introduisit le règne extérieur dans l’intérieur et éteignit la lumière dans le feu du premier principe; de plus, sa substantialité divine, dans laquelle il devait vivre éternellement, fut enfermée dans la mort terrestre.

5. C’en était donc fait de cette image et de cette âme, à moins que la divinité ne se mut en elles, dans l’autre principe, savoir dans la lumière de l’éternelle vie et n’allumât de nouveau, par l’éclat de l’amour, la substantialité enfermée dans la mort, ce qui s’effectua par l’incarnation de Christ , et c’est ici la plus grande merveille que Dieu ait opérée, que de s’être mu, par le centre de la Sainte-Trinité, dans la semence de la femme; car le cour de Dieu ne voulut pas se manifester dans le feu, soit dans la teinture masculine, mais dans la teinture de l’esprit, soit en Vénus, dans l’amour de la vie, pour que le feu, dans la teinture masculine, fût saisi par la douceur et l’amour divins; car de la mort captive devait et pouvait verdir de nouveau l’éternelle vie : ici a verdi la racine de Jessé et vraie verge d’Aaron, et porté de beaux fruits; lorsqu’Adam devint terrestre, le paradis fut enfermé dans la mort, mais en Christ, il verdit de nouveau de la mort.

6. D’Adam nous avons tous hérité la mort, de Christ nous héritons la vie éternelle : Christ est l’image virginale qu’Adam devait engendrer de soi avec les deux teintures; mais comme il ne le put pas, il fut divisé et dut engendrer de deux corps, jusqu’à ce que vint le Siloh, c’est-à-dire le Fils de la vierge, qui naquit de Dieu et de l’homme. Il est le vainqueur dont les prophètes ont parlé, qui s’élève comme un géant et verdit comme un laurier dans l’Etre divin : il a brisé la mort par son entrée dans l’essence humaine demi-tuée, car il a verdi en même temps dans l’essence humaine et dans l’essence divine. Avec lui est entrée dans notre humanité la chasteté virginale de la sagesse divine, il entoura l’essence de notre âme de substantialité céleste. Il fut le héros en combat alors que les deux règnes se combattaient, savoir la colère de Dieu et l’amour divin ; il se livra volontairement à la colère et l’éteignit par son amour, entendez dans l’essence humaine. Il vint de Dieu en ce monde, et. prit notre âme en lui pour nous retirer de la terrestréité de ce monde et nous introduire de nouveau en Dieu. Il nous engendra de nouveau en soi, afin que nous devinssions de nouveau susceptibles de vivre en Dieu; il nous engendra de sa volonté, atin que nous missions notre volonté en lui, et de cette manière, il nous conduisit en soi au Père et de nouveau dans notre première patrie, dans le paradis, d’où Adam était sorti. Il est devenu notre source vive, son eau jaillit en nous : il est notre fontaine et nous ses gouttes en lui. Il est devenu la plénitude de notre substantialité, afin qu’en lui nous vivions en Dieu: car Dieu est devenu homme ; il a introduit son être insondable et incommensurable dans l’humanité, il a manifesté, dans celte humanité, son être qui remplit le ciel. Ainsi l’être humain et l’être divin sont devenus un seul être, une plénitude de la divinité : notre être est sa motion dans son ciel; nous sommes ses enfants, sa merveille, sa motion dans son corps insondable. Il est père, et nous sommes ses enfants en lui : nous demeurons en lui et lui en nous; nous sommes son instrument, avec lequel il cherche et fait ce qu’il veut; il est le feu et aussi la lumière en toutes choses; il est caché et l’ouvre le manifeste.

7. Ainsi nous reconnaissons que Dieu est un esprit et que son éternelle volonté est magique, désirante; il fait constamment de rien l’être, et cela en deux sources, savoir selon le feu et selon la lumière : du feu naît la fureur, relèvement, l’orgueil, une opposition à s’unir à la lumière, une volonté furieuse, sévère, selon laquelle il ne s’appelle point Dieu, mais un feu dévorant, furieux. Ce feu n’est pas non plus manifeste dans la divinité proprement dite, car la lumière a englouti le feu en soi et donne au feu son amour, sa substantialité, son eau, en sorte que, dans l’être divin, il n’y a qu’amour, joie et délices, aucun feu n’y est en évidence ; mais le feu est seulement cause de la volonté désirante et de l’amour, ainsi que de la lumière et de la majesté, sans quoi il n’y aurait point d’être, ce qui a été exposé en détail clans les précédents écrits.

8. Nous voyons maintenant en quoi consiste notre nouvelle naissance (puisqu’enfîn nous sommes couverts en ce monde d’une enveloppe terrestre et dévolus à une vie terrestre), savoir, uniquement dans l’imagination : nous devons entrer, par notre volonté, dans la volonté de Dieu, nous unir et nous abandonner entièrement à lui, ce qui s’appelle la foi. Car le mot foi n’jest point historique, mais c’est un prendre de l’Etre divin, manger de l’Etre divin, conduire l’Etre divin, par l’imagination, dans son feu d’âme, apaiser par là sa faim, et ainsi revêtir l’Etre divin, non comme un vêtement, mais comme un corps de l’âme : l’âme doit posséder l’Etre divin dans son feu ; elle doit manger du pain de Dieu, si elle veut être son enfant.

9. De celte manière, elle sera réengendrée aussi dans l’esprit et l’être de Dieu qui l’a transplantée du champ de la fureur et de la colère dans celui de l’amour, de la douceur et de l’humilité divines, où elle pousse une fleur nouvelle qui croît dans l’amour divin, dans le champ divin; cette (leur est la vraie, pure image de la divinité que Dieu désirait lorsqu’il créa Adam à sa ressemblance, et c’est Jésus-Christ qui nous l’a réengendrée, lui, Fils de Dieu et de l’homme. Car sa régénération de Dieu et de notre être, est notre régénération ; sa puissance, sa vie, son esprit : tout est à nous ; et notre coopération à cela consiste uniquement à ce qu’avec notre esprit de volonté nous entrions par lui clans l’Etre divin; alors notre volonté est renouvelée (réengendrée) clans la volonté de Dieu et reçoit la puissance et l’être divins; non étrangers, mais primitifs, que nous possédions alors que nous mourûmes en Adam ; nous les recouvrons par le premier-né d’entre les morts, savoir par Christ. Il est Dieu, mais né de nous, pour nous rappeler à la vie; non à une vie étrangère que nous n’aurions pas eue en ce monde, mais à noire propre vie, car le plan de Dieu doit demeurer : la belle fleur et image doit croître du champ corrompu, et non seulement cela, mais encore du champ pur.

10. Nous devions renaître de la vierge et non de l’homme de la colère, de la teinture du feu, mais de la vierge de l’amour, de la teinture de la lumière. Nous revêtons, par notre abandon, la vierge-Christ, et devenons par là des vierges pudiques, chastes et pures dans le Saint-Ternaire, dans le monde angélique, un miroir de la Sainte-Trinité, dans lequel Dieu se considère, qu’il a pris pour époux; il est notre époux, auquel nous sommes, en Christ, mariés, unis et incorporés; nous sommes maintenant Marie dans l’alliance de la grâce, de laquelle naît le Dieu-homme. Marie fut la première quant à la haute bénédiction, car en elle était le but que l’alliance avait en vue. Elle fut reconnue en Dieu, dans le précieux nom de Jésus, avant que le fondement du monde fût posé ; non qu’elle tirât la vie de la mort, mais parce que Dieu voulait en elle ramener la vie de la mort. C’est pourquoi elle fut hautement bénie et revêtue de la pure et virginale chasteté. Or, de cette même virginité dont Christ naquit, devons-nous tous naître aussi, car nous devons devenir des vierges et suivre l’agneau divin, autrement nous ne verrons pas Dieu, aussi Christ dit : il vous faut naître de nouveau, si vous voulez voir le royaume de Dieu, et cela par l’eau et le Saint-Esprit. L’eau est la virginité, car la vierge siège dans la teinture de la lumière et de l’eau ou dans l’amour et la douceur ; et l’esprit dont nous devons naître est celui qui, par la motion de la divinité, se donna à la semence de la femme, brisa la mort et fait naître de l’eau une fleur de lumière flamboyante dont il est l’esprit et la vie, non selon la source de feu de la fureur, mais selon la source de la lumière dans la douceur et l’humilité.