Les questions d’habillement et de l’usage de la langue vernaculaire toutes deux reviennent dans le Super modo vivendi devotorum hominum simul commorantium où est exposée et défendue la façon de vivre des Dévots1. Au chapitre 7, on retrouve la pensée du De libris teutonicalibus, mais résumée et retravaillée en une unité plus ferme2. Les Frères vivaient en commun dans l’humilité, sans possessions, obéissant les uns aux autres. Cette façon de vivre éveillait le soupçon dans le monde extérieur et s’attirait les critiques du clergé, car les Frères donnaient l’impression de vivre dans le cadre d’un Ordre. Or, depuis 1215, le Saint-Siège avait interdit toute fondation nouvelle3. Zerbolt réfute les principaux points sur lesquels portaient les accusations de l’extérieur. Il met la façon de vivre des Dévots en relation avec la première communauté chrétienne, telle que la présentent les Actes des Apôtres: les croyants avaient tout en commun, s’exhortaient mutuellement à l’amour fraternel et s’appliquaient à une vie honnête. Les Dévots ne cherchaient rien de plus qu’à imiter ces premiers chrétiens. Zerbolt conclut que la Bible et les Pères de l’Église, loin d’avoir jamais interdit cette forme de vie, l’ont plutôt fortement encouragée.
On considérait que Zerbolt avait rédigé le Super modo vivendi pendant la dernière année de sa vie et que ce traité formait une synthèse de textes écrits par des personnalités ecclésiastiques en faveur de la Fraternité, tels les juristes Everard Foec, doyen de l’église St-Sauveur à Utrecht, Arnold de Dikninge et nombre de juristes de Cologne4. Mais récemment, Nikolaus Staubach a apporté contre cette opinion de solides arguments. Il serait plus probable que le texte de Zerbolt ait servi de fondement aux formulations juridiques des conseillers ecclésiastiques, qui l’ont sans doute utilisé comme information de base pour soutenir la Fraternité dans son combat pour sa reconnaissance. L’approbation fut donnée le 30 avril 1401 par l’évêque d’Utrecht, Frederik de Blankenheim; Zerbolt ne l’a pas sue, il était décédé plus de deux ans auparavant, mais elle était due principalement à ses écrits. Cette façon d’envisager les choses invite à avancer l’époque de rédaction du texte de Zerbolt qui ne l’aurait pas écrit pendant la dernière année de sa vie, mais vraisemblablement vers 1396, année où des démarches étaient entreprises pour obtenir l’approbation de l’Église pour la Fraternité5.
Par sa vaste culture littéraire engrangée dans sa retraite, Zerbolt était à même de composer ces quatre traités constitués, pour une large part, de citations sur lesquelles il construit son argumentation. Ces textes adoptent une ligne de démonstration juridique bien déterminée, partiellement orientée vers les Dévots, mais pour une plus grande part vers le clergé, les guides du peuple. Grâce à sa formation, Zerbolt était tout à fait apte à engager des discussions avec le clergé des Pays-Bas.
Le texte est édité par A. Hyma, «Het traktaat Super modo vivendi devotorum hominum simul commorantium door Gérard Zerbolt van Zutphen», dans Archief voor tk geschiedenis van het aartsbisdom LJtrecht 52 (1926), p. 1-100. Pour la traduction en néerlandais du chapitre 7, Deschamps, «Middelnederlandse vertalingen …», 14 (I960), p. 72-108; comme pour le résumé donné par van Rooij, Gérard Zerbolt van Zutphen p. 165-198. ↩
Ces deux textes ont été comparés par Staubach, «Gerhard Zerbolt von Zutphen …», p. 278-285. ↩
Van der Wansem, Het ontstaan p. 149. ↩
Sur la date de création, voir Kock, Die Buchkultur der Devotio modema, p. 185 ; sur la chronologie, van Rooij, op. cit., p. 48-49; van der Wansem, op. cit., p. 148-162. ↩
Staubach, «Gerhard Zerbolt von Zutphen …», p. 271 ; discussion sur la date de création du texte, id., p. 274-278. ↩