théologie (Orígenes)

Libre à Celse de dire que ce n’est pas plus pour l’homme, que pour le lion et les autres animaux qu’il mentionne. Nous dirons : ce n’est ni pour le lion, ni pour l’aigle, ni pour le dauphin que le Créateur les a faites, mais il a créé toutes choses pour l’animal raisonnable, et afin que ce monde se réalise comme une oeuvre de Dieu complète et parfaite dans toutes ses parties. C’est là une belle pensée à laquelle il faut souscrire. Mais Dieu ne prend pas soin, comme le croit Celse, uniquement de l’ensemble, mais outre l’ensemble, de chaque être raisonnable en particulier. Jamais la Providence n’abandonnera l’ensemble. Au cas où une partie de l’ensemble se détériore par la faute de l’être raisonnable, Dieu pourvoit à le purifier et après un moment, à ramener vers lui l’ensemble. De plus, il ne s’irrite ni contre les singes, ni contre les rats, mais il fait subir aux hommes pour la transgression des tendances naturelles un jugement et un châtiment. Il leur adresse des menaces par ses prophètes et par le Sauveur qui est venu à l’ensemble du genre humain, pour que ceux qui prêtent l’oreille à la menace se convertissent, et que ceux qui négligent les appels à la conversion subissent les peines qu’ils méritent ; et il convient que Dieu, dans sa volonté de pourvoir au bien de l’univers, les inflige à ceux qui ont besoin de recevoir un tel traitement et une correction si sévère. Mais comme ce quatrième livre a pris une dimension suffisante, j’arrêterai ici le raisonnement. Et que Dieu accorde, par son Fils qui est Dieu Logos, Sagesse, Vérité, Justice et tout ce que la théologie des saintes Écritures dit de lui, de commencer encore le cinquième livre pour l’utilité des lecteurs et de le mener à bien avec le secours de son Logos qui habite dans notre âme. LIVRE IV

Mais ceux qui ont si bien écrit sur le Souverain Bien descendent au Pirée pour prier Artémis comme une déesse, et pour voir la fête publique célébrée par les simples. Après avoir enseigné cette profonde philosophie sur l’âme et décrit en détail l’état futur de celle dont la vie fut vertueuse, ils abandonnent ces idées sublimes que Dieu leur a manifestées pour songer à des choses vulgaires et basses et sacrifier un coq à Asclépios. Ils s’étaient représenté les oeuvres invisibles de Dieu et les idées à partir de la création du monde et des choses sensibles, d’où ils s’étaient élevés aux réalités intelligibles : ils avaient vu, non sans noblesse, son éternelle puissance et sa divinité ; néanmoins ils ont perdu le sens dans leurs raisonnements, et leur coeur inintelligent se traîne pour ainsi dire, dans l’ignorance au sujet du culte de Dieu. Et l’on peut voir ces hommes, fiers de leur sagesse et de leur théologie, adorer une représentation, simple image d’homme corruptible, pour honorer, disent-ils, cette divinité, parfois même descendre avec les Égyptiens jusqu’aux oiseaux, quadrupèdes, reptiles. LIVRE VI

J’ai cru bon de citer, entre bien d’autres, ces idées que les saints personnages ont eues sur Dieu, pour révéler à ceux qui ont des yeux capables de percevoir le sérieux des Écritures que les écrits sacrés des prophètes ont quelque chose de plus noble que les paroles de Platon admirées par Celse. Voici le passage de Platon cité par Celse : « Autour du Roi de l’univers gravitent toutes choses ; c’est pour lui qu’elles sont toutes, c’est lui qui est la cause de toute beauté. Autour du Second sont les choses de second rang; autour du Troisième, celles de troisième rang. Or, l’âme humaine aspire à connaître ce qu’elles sont, fixant le regard sur les choses qui lui sont apparentées, dont aucune n’est parfaite. Certes, quand il s’agit du Roi et des principes dont j’ai parlé, il n’y a rien de tel. » J’aurais pu citer des passages sur les « Séraphins » des Hébreux, décrits dans Isaïe, qui voilent « la face » et « les pieds » de Dieu, sur les « Chérubins » décrits par Ézéchiel, sur les formes qu’on leur donne, et sur la manière dont on dit que Dieu est porté par les Chérubins. Mais les expressions sont fort mystérieuses et, à cause des gens indignes et irréligieux, impuissants à suivre de près la sublimité et la majesté de la théologie, j’ai jugé qu’il ne convenait pas de débattre ces questions dans ce traité. LIVRE VI

Il recherche ensuite la raison de l’ordonnance ainsi cataloguée des étoiles, indiquée symboliquement par les noms des espèces variées de la matière. Il ajoute des théories musicales à ce qu’il cite de la théologie des Perses. Il renchérit sur ce point et cite une seconde explication, qui contient encore des considérations musicales. Mais il m’a semblé hors de propos de citer le passage de Celse là-dessus : c’eût été faire ce qu’il fait lui-même quand, pour accuser les chrétiens et les Juifs, il expose à contretemps non seulement les paroles de Platon dont il eût pu se contenter, mais encore, comme il dit, les mystères mithriaques des Perses et leur explication. En effet, quoi qu’il en soit du mensonge ou de la vérité de leur interprétation par les Perses et ceux qui les pratiquent, pourquoi citer ces mystères-là plutôt que l’un des autres avec son explication ? Car il ne semble pas qu’en Grèce ceux de Mithra aient été plus exceptionnels que ceux d’Eleusis ou ceux d’Hécate qui sont communiqués aux initiés d’Égine. LIVRE VI

Il nous renvoie ensuite à Platon comme à un maître plus efficace en matière de théologie, et cite l’affirmation du Timée : Découvrir l’auteur et le père de cet univers est laborieux, et une fois découvert, le dire à tous est impossible. Puis il y ajoute : Voyez donc comment les interprètes de Dieu et les philosophes cherchent la voie de vérité, et comment Platon savait qu’il était impossible à tous d’y marcher. Mais puisque les sages l’ont trouvée pour nous faire acquérir de l’Être innommable et Premier quelque notion qui le rend manifeste, soit par la synthèse qui domine les autres choses, soit par séparation d’avec elles, soit par analogie, je veux enseigner l’Être qui par ailleurs est ineffable; mais je serais bien étonné que vous puissiez me suivre, vous qui êtes si étroitement rivés à la chair et dont le regard n’a rien de pur. LIVRE VI