C. 3. Dieu accepte d’être caché dans le sein d’une mère et d’y attendre de naître. Né, il accepte de grandir, et devenu grand, il ne cherche point à se faire connaître ; mais il accepte de se faire tort à lui-même en le laissant baptiser par son serviteur et en ne repoussant les attaques du tentateur que par de seules paroles. Lorsque ce Dieu se fait notre maître pour nous apprendre à échapper à la mort et à faire notre salut, accoutumé lui-même à pardonner nos offenses, il ne se plaint pas, ne proteste pas, et personne n’entend sa voix dans les places publiques ; il ne brise pas le roseau froissé ni n’éteint la mèche qui fume encore. Car le prophète ne s’était pas trompé, et Dieu même l’avait attesté, lui qui avait mis dans le Fils son Esprit avec l’universelle patience. Il ne rejette aucun de ceux qui veulent se joindre à lui ; il ne méprise la table ou la maison de personne ; lui-même apporte l’eau pour laver les pieds de ses disciples. Il ne rebute ni les pécheurs ni les publicains. Il ne se fâche même pas contre la ville qui a refusé de le recevoir, alors que ses disciples voulaient faire tomber le feu du ciel sur cette ville insolente. Il guérit les ingrats, il pardonne à ceux qui lui tendent des embûches. Ce n’est pas tout : il souffre près de lui celui qui doit le trahir, sans le désigner aux autres Lorsqu’il est livré à ses ennemis et conduit comme une victime à la boucherie – car il n’ouvre pas plus la bouche qu’un agneau sous la main de celui qui le tond -, alors celui qui d’un seul mot pouvait appeler du ciel, s’il l’avait voulu, des légions d’anges n’admet pas même qu’un de ses disciples tire l’épée pour le venger. La patience du Seigneur est comme blessée par la blessure de Malchus. C’est pourquoi il maudit dans l’avenir ceux qui frapperont par le glaive, et en guérissant celui à qui’ il n’a fait aucun tort, il satisfait par la patience, qui est la mère de la miséricorde. Je ne dis rien de sa crucifixion : c’est pour cela qu’il était venu sur terre. Cependant était-il besoin de tant d’outrages accompagnant cette mort? C’est qu’il voulait, en quittant cette terre, se rassasier du bonheur de la patience. Il est couvert de crachats, fouetté, bafoué, revêtu d’une robe honteuse, couronné plus honteusement encore. Admirable égalité d’âme fidèle à elle-même ! Celui qui avait voulu se cacher sous la forme humaine n’imite rien de l’impatience humaine Pharisiens, à cette seule marque vous deviez reconnaître le Seigneur : jamais homme ne pouvait pratiquer une telle patience. De tels et si nombreux exemples, dont la grandeur est pour les nations prétexte à infidélité, sont pour nous la raison et le fondement de notre foi : à ceux à qui il est donné de croire, ils montrent clairement que dans le Seigneur dictant ses préceptes et endurant ses souffrances la patience divine était une qualité naturelle, l’effet transcendant d’une propriété innée.