Mais je veux établir qu’il n’était pas plus utile pour l’ensemble de l’Économie que « c’est du haut de la croix que Jésus aurait dû soudain disparaître » corporellement. La simple lettre et le récit de ce qui est arrivé à Jésus ne laissent point voir la vérité totale. Car à une lecture plus pénétrante de la Bible, chaque événement se révèle de plus symbole d’une vérité. Ainsi en est-il du crucifiement : il contient la vérité qu’exprimé ce mot : « Je suis crucifié avec le Christ » », et cette idée : « Pour moi, que jamais je ne me glorifie sinon dans la croix de mon Seigneur Jésus-Christ, qui a fait du monde un crucifié pour moi et de moi un crucifié pour le monde. » Ainsi, de sa mort : elle était nécessaire pour que l’on pût dire : « Car sa mort fut une mort au péché une fois pour toutes », et pour que le juste ajoute qu’« il lui devient conforme dans la mort », et : « Si en effet nous sommes morts avec lui, avec lui aussi nous vivrons ». Ainsi encore, de son ensevelissement : il s’étend à ceux qui lui sont devenus conformes dans la mort, crucifiés avec lui, morts avec lui, suivant ces autres mots de Paul : « Nous avons été ensevelis avec lui par le baptême », nous sommes aussi ressuscites avec lui. LIVRE II
Or, si cette conduite ne leur vaut pas de blâme, voyons si, plus et mieux que ces philosophes, les chrétiens n’exhortent pas les foules à la parfaite honnêteté. Les philosophes qui ont des entretiens publics ne divisent pas les auditeurs en classes : le premier venu s’arrête et écoute. Les chrétiens, autant qu’il leur est possible, commencent par éprouver les âmes de ceux qui veulent être leurs auditeurs, et par les former en particulier. Lorsque les auditeurs, avant l’entrée dans la communauté, semblent en progrès suffisant dans la volonté de vivre vertueusement, alors ils les introduisent. Ils font à part un groupe des commençants qu’on vient d’initier et qui n’ont pas encore reçu le symbole de la purification ; puis un autre, de ceux qui ont fourni les meilleures preuves de leur décision de ne vouloir rien d’autre que ce qui est approuvé des chrétiens. Parmi eux, certains ont la charge d’enquêter sur la vie et la conduite des candidats, pour interdire l’accès de leur assemblée commune aux gens coupables de fautes secrètes, mais d’accueillir les autres de toute leur âme et les rendre meilleurs chaque jour. Et voici leur conduite à l’égard des pécheurs, surtout des impudiques : ils les chassent de leur communauté, eux qui, d’après Celse, ressembleraient à ceux qui divulguent leurs secrets sur les places publiques ! La vénérable école pythagoricienne, les considérant comme des morts, élevait des cénotaphes aux apostats de sa philosophie. Les chrétiens, eux, pleurent comme des défunts, parce que perdus et morts à Dieu, ceux qui se sont laissé vaincre par la luxure ou un autre désordre. Quand ils manifestent une conversion sérieuse, au bout d’un temps plus long que lors de leur première initiation, ils les admettent de nouveau comme ressuscites d’entre les morts ; mais on ne nomme à aucune charge ni présidence de l’« Église de Dieu » ceux qui sont tombés après leur accession au christianisme. LIVRE III
Veut-on apprendre encore les artifices par lesquels ces sorciers, prétendant posséder certains secrets, ont voulu gagner les hommes à leur enseignement et sans beaucoup de succès ? Qu’on écoute ce qu’ils apprennent à dire une fois passé ce qu’ils nomment « la barrière de la malice », les portes des Archontes éternellement fermées de chaînes : « Roi solitaire, bandeau d’aveuglement, oubli inconscient, je te salue, première puissance, gardée par l’esprit de providence et par la sagesse ; d’auprès de toi je suis envoyé pur, faisant partie déjà de la lumière du Fils et du Père ; que la grâce soit avec moi, oui, Père, qu’elle soit avec moi ! » Voilà, d’après eux, où commence l’Ogdoade8. Puis, ils apprennent à dire ensuite, en traversant ce qu’on nomme Ialdabaoth : « O toi, premier et septième, né pour dominer avec assurance, Ialdabaoth, raison souveraine de la pure intelligence, chef-d’oeuvre du Fils et du Père, je porte un symbole empreint d’une image de vie ; j’ai ouvert au monde la porte que tu avais fermée pour ton éternité, et retrouvant ma liberté je traverse ton empire ; que la grâce soit avec moi, oui, Père, qu’elle soit avec moi ! » Et ils disent que l’astre brillant est en sympathie avec l’archonte à forme de lion. Ils croient ensuite qu’après avoir traversé Ialdabaoth, et être arrivé à la on doit dire : « 0 toi qui présides aux mystères cachés du Fils et du Père, et qui brilles pendant la nuit, Iao second et premier, maître de la mort, lot de l’innocent, voici que, portant comme symbole la soumission de mon esprit, je m’apprête à traverser ton empire ; car, par une parole vivante, je l’ai emporté sur celui qui vient de toi ; que la grâce soit avec moi, Père, qu’elle soit avec moi ! » Immédiatement après, c’est Sabaoth à qui, selon eux, on devra dire : « Archonte du cinquième empire, puissant Sabaoth, premier défenseur de la loi de ta création, que la grâce a libérée par la vertu plus puissante du nombre cinq, laisse-moi passer en voyant intact ce symbole de ton art que je conserve dans l’empreinte d’une image, un corps délivré par le nombre cinq ; que la grâce soit avec moi, Père, qu’elle soit avec moi ! »… A sa suite, c’est Astaphaios auquel ils pensent qu’on doit s’adresser en ces termes ! «Archonte de la troisième porte, Astaphaios, qui veilles sur la source originelle de l’eau, regarde-moi comme un myste, et laisse-moi passer, car j’ai été purifié par l’esprit d’une vierge, toi qui vois l’essence du monde ; que la grâce soit avec moi, Père, qu’elle soit avec moi ! » LIVRE VI
Après lui, c’est Ailoaios auquel ils jugent bon de dire : « Archonte de la seconde porte, Ailoaios, laisse-moi passer en voyant que je te porte le symbole de ta mère, une grâce cachée par les vertus des puissances ; que la grâce soit avec moi, Père, qu’elle soit avec moi ! » Enfin ils nomment Horaios et croient devoir lui dire : « Toi qui, pour avoir intrépidement franchi la barrière de feu, as reçu l’empire de la première porte, Horaios, laisse-moi passer, en voyant le symbole de ta puissance détruit par une figure de l’arbre de vie et repris par une image à la ressemblance de l’innocent ; que la grâce soit avec moi, Père, qu’elle soit avec moi ! » LIVRE VI
La locution ruisseau de l’église terrestre et de la circoncision provient peut-être de ce que certains disent que l’église terrestre est un ruisseau dérivé d’une église céleste et d’un éon supérieur, et que la circoncision prescrite dans la loi est le symbole de celle qui s’effectue là-haut dans quelque lieu de purification. Le nom de Prunicos est celui que donnent les Valentiniens à une certaine sagesse, dans l’égarement de leur propre sagesse symbolisée d’après eux par l’hémorroïsse depuis douze ans malade ; se méprenant sur le sens et brouillant toutes les opinions des Grecs, des barbares et des sectes, Celse a dit que d’une certaine vierge Prunicos émane une vertu. LIVRE VI
Quel homme sensé ne rirait de celui qui, après tant de sublimes spéculations philosophiques sur Dieu ou les dieux, tourne ses regards vers les statues et ou bien leur adresse sa prière ou, à travers ces images qu’il voit, l’offre en réalité à l’être objet de sa pensée vers lequel il s’imagine qu’il faut monter à partir du visible et du symbole ? Mais le chrétien le plus simple sait que n’importe quel lieu du monde est une partie du tout et que le monde entier est le temple de Dieu. LIVRE VI