“Suit le troisième degré dans l’échelle d’amour, à savoir : l’innocence, la chasteté de l’âme et la pureté du corps. Que le lecteur prête toute son attention, je l’en supplie : Ce qui est nécessaire pour celui qui veut obtenir la chasteté. Pour que l’âme [[L’âme (de celui qui veut gravir les degrés de l’échelle de la perfection ou de l’amour divin).]] de celui dont il est parlé soit chaste et pure, il est nécessaire qu’il déteste et méprise pour l’amour de Dieu, tout amour, tout penchant, toute affection désordonnée envers soi-même, envers son père et sa mère, envers toutes les créatures ; de telle sorte qu’il n’aime soi-même et les autres créatures, que pour le culte et le service de Dieu. Alors, il pourra dire avec le Christ : Quiconque fait la volonté de mon Père, celui-là est mon frère, ma soeur et ma mère : Matth. 12 Quicunque fecerit voluntatem Patris mei, ille meus frater et soror et mater ; et ainsi, il aimera son prochain, comme lui-même, et se conservera pur. Qu’il ne souffre pas non plus de se laisser entraîner, captiver et enchaîner par personne, soit en vertu de paroles, d’actes, de présents, d’invitations, d’obséquiosités, de services, ou sous les aspects de la sainteté. Car, bien que souvent ils n’envisagent que l’esprit, ils se retournent enfin vers la chair ; et on ne peut s’appuyer sûrement sur eux. Qu’il n’ait un amour violent pour personne, et qu’il ne veuille en inspirer à personne ; car, quoique cet amour ait l’apparence du bien, il a une mauvaise fin, et dégénère en poison. Qu’il soit vigilant, plein d’attention et de prudence, pour n’être pas trompé. S’il se laisse captiver et entraîner, il se sentira abusé et joué. Qu’il fasse tout ce qui dépend de lui, et prenne soin de lui-même, et qu’il aime Jésus comme son unique époux. Qu’il lui reste uni fermement, à l’exclusion de tous les hôtes étrangers, quels qu’ils soient, et demeure avec lui d’une manière stable, en jouissant de sa bienveillance. Qu’il le reçoive en lui-même ; et que, mettant en oeuvre toutes ses facultés, il satisfasse avidement son amour. Il sera instruit, nourri et dirigé par lui ; car il est lui-même son propre fruit. Bien plus, malgré tous ses proches, il sera conduit par lui dans le sein du Père, où il trouvera et expérimentera la plus grande fidélité ; et il se sentira relevé et remis de toute affliction et de toute nécessité. C’est la vie de l’âme pure et chaste. – Reste la chasteté corporelle. De quoi se compose l’homme. Pour en dire quelque chose, il faut savoir que l’homme a été composé par Dieu de deux natures, (parties) à savoir : l’âme et le corps, ou la chair et l’esprit. Et ces deux ne font qu’une personne dans la nature humaine, conçue et née dans le péché. Et, bien que Dieu ait fait l’âme pure et immaculée, cependant étant unie au corps, elle est souillée de la tache du péché originel. Et de cette manière, nous sommes nés dans le péché, dès le sein maternel. Jean. 3 Car, ce qui est né de la chair, est chair, et ce qui est né de l’esprit, est esprit. Et quoique l’esprit aime sa chair, en vertu de sa génération naturelle, cependant, dans la régénération, où la naissance se fait en vertu de l’esprit de Dieu, le corps et l’âme sont opposés, Gal. 5. Rom. 8 et ils se contrarient en luttant l’un contre l’autre, la chair étant pleine de concupiscence contre Dieu et l’esprit, et l’esprit étant avec Dieu contre la chair. Donc, si nous vivons suivant les penchants et les appétits de notre chair, nous mourons dans le péché ; mais si, au contraire, nous mortifions en esprit les élans de la chair et nous l’emportons sur eux, nous vivons dans la vertu. Le corps doit être aimé et hai. Il nous faut donc haïr et mépriser notre corps, comme l’ennemi capital qui désire nous éloigner de Dieu, pour nous entraîner au péché. Et, de même, nous devons aimer et estimer notre corps et la vie sensitive, en tant qu’il est l’instrument par lequel nous servons Dieu. Car, sans le corps, nous ne pouvons pas honorer Dieu et le servir par les actes extérieurs, à savoir : le jeûne, la veille, la prière et les autres bonnes œuvres de cette sorte, qu’il nous faut justement et méritoirement accomplir ; à tel point que nous devons librement nourrir notre corps, le désaltérer, le vêtir ; afin que nous puissions alors être utiles à Dieu, à nous-mêmes et au prochain. Nous devons fuir trois vices de la chair. Et cependant, nous devons avoir un soin attentif, pour éviter diligemment trois vices qui règnent dans la chair, à savoir : la paresse, la gourmandise, la luxure, par lesquels un grand nombre, doués même de bonne volonté, sont tombés dans des fautes graves. Remèdes de la gourmandise,Et contre la gourmandise nous devons choisir et embrasser amoureusement la modération, la tempérance et la sobriété ; nous privant toujours de quelque chose, prenant moins qu’il nous est permis de le faire, de manière que nous soyons contents du nécessaire et d’une modeste réfection. de la paresse, Contre la paresse ou la torpeur, dans toutes les nécessités, nous éprouverons une certaine commisération intérieure, de la fidélité et de la bonne volonté ; et nous serons intrépides et vigilants, prêts à toutes les œuvres qui réclament notre action et notre concours ; et cela, avec la sage modération et la discrétion qu’exigent nos forces et la droite raison. de la luxure. Contre la luxure, enfin, nous éviterons et nous fuirons les fréquentations deshonnêtes, et les stimulants de la passion ; intérieurement nous éloignerons les fantômes impurs et les images deshonnêtes ; de peur de nous y arrêter, et de nous y complaire avec joie et délectation ; il se fera ainsi que nulle image ne se gravera en nous, et que nous ne contracterons aucune souillure naturelle. Comme nous imprimons le Christ en nous. Mais nous nous convertirons intérieurement au Seigneur, et en Notre Seigneur Jésus-Christ ; nous considérerons sa passion, sa mort, et les très larges effusions de son sang pour nous, en vertu de son amour. Et, nous nous exercerons en ces choses, nous imprimerons leur image dans nos cœurs, dans nos âmes, dans nos corps et dans toute notre nature ; comme le sceau est imprimé dans la cire.
Mais alors, le Christ nous entraînera avec lui dans la vie sublime, où nous sommes unis à Dieu, et où notre âme pure et chaste adhère, par amour, au St-Esprit, et demeure en lui, où coulent les sources de miel de la rosée céleste et de toute grâce ; et, les ayant goûtées, la chair et le sang, tout ce qui est du monde, paraît insipide. Et tant que notre vie sensible est élevée et unie à l’esprit, où nous honorons Dieu et nous le recherchons intentionnellement et amoureusement, aussi longtemps nous sommes chastes, purs et innocents, de corps et d’âme.
Mais, quand derechef nous revenons vers les choses inférieures, et nous nous servons des sens, le goût doit être préservé du vice de la gourmandise ; le corps et l’âme, de la torpeur et de la paresse ; et la nature, des penchants obscènes et libidineux. Eviter les mauvaise fréquentations Il faut aussi éviter la société deshonnête, comme celle de ceux qui s’abandonnent aux mensonges, aux exécrations, aux malédictions ; qui aiment jurer et vomir le blasphème contre Dieu ; qui sont impurs et obscènes, soit en paroles, soit en actions ; et qu’il faut fuir comme de mauvais esprits. Il faut aussi préserver et garder ses yeux et ses oreilles ; de peur de voir ou d’entendre des choses qu’il est défendu de faire. Que chacun s’efforce de se conserver pur ; qu’il soit librement avec lui-même qu’il fuie le changement et la multitude qu’il honore les temples saints ; et qu’il exerce de ses mains, les bonnes œuvres ; qu’il exècre et qu’il déteste la paresse ; qu’il évite les trop grandes commodités, et se considère comme n’étant rien. Qu’il aime la vérité et la vie ; et bien qu’il se sente chaste, Luc 1 qu’il fuie cependant les occasions de pécher : Jean 3 qu’il aime les œuvres de pénitence et le travail ; Marc 6 qu’il considère le précurseur du Seigneur, Jean-Baptiste, qui, bien qu’il fût sanctifié avant sa naissance, cependant, dès sa tendre jeunesse, fuyant son père et sa mère et abandonnant les honneurs et les richesses du monde, la foule des cités et les occasions de pécher, se retira dans les antres du désert. Et cependant il était innocent et d’une pureté angélique, et il honora et embrassa la vérité soit dans sa vie, soit en l’enseignant aux autres par la parole ; et enfin, pour la cause de la justice, il fut livré à la mort ; et il est exalté et glorifié pour une sainteté de vie bien au-dessus de toute autre. – Qu’il considère aussi les Pères qui demeuraient jadis dans le désert d’Egypte, afin d’abandonner le monde, de crucifier et d’affliger leur chair et leur nature, en résistant aux vices, en faisant pénitence, en s’abstenant pour supporter la faim et la soif, et en se privant de tout ce dont ils pouvaient se passer. Ensuite, qu’il rappelle à sa mémoire le souvenir de la sentence et du jugement porté par le Seigneur contre le riche, revêtu de pourpre et de fin lin, et faisant chaque jour de splendides festins, sans jamais rien donner aux pauvres, et qui étant parti de chez les vivants, fut enseveli dans l’enfer, où il brûle dans les tourments des flammes du Tartare, et, bien qu’il le demande instamment, il ne peut obtenir même une goutte d’eau, pour rafraîchir sa langue brûlante. Mais au contraire, le mendiant Lazare qui, tourmenté de la faim et de la soif et plein d’ulcères, gisait à la porte de ce riche, demandant que les miettes qui tombaient de sa table lui fussent données, sans toutefois l’obtenir, après sa mort, fut porté par les anges dans le sein d’Abraham, où sont les joies immenses sans mélange de douleur, et une vie éternelle que la mort ne peut plus atteindre.