– Examinons cependant ce qu’on vous a lu tout à l’heure : « Rébecca, dit l’Écriture, venait puiser de l’eau au puits avec les jeunes filles de la ville. » Homélies sur la Genèse: X – RÉBECCA Le premier jour.
Chaque jour, Rébecca allait aux puits ; chaque jour, elle puisait de l’eau. C’est à cela qu’elle dut de rencontrer le serviteur d’Abraham et d’épouser Isaac. Homélies sur la Genèse: X – RÉBECCA Le premier jour.
Ainsi faisait sainte Rébecca ; et elle n’aurait pu épouser le grand patriarche Isaac, « né en vertu de la promesse », sans avoir puisé de l’eau, – sans en avoir puisé une quantité telle qu’elle pût donner à boire non seulement à ceux de sa maison, mais encore au serviteur d’Abraham, – et non seulement donner à boire au serviteur d’Abraham, mais abreuver encore ses chameaux «jusqu’à ce qu’ils cessent de boire », dit l’Écriture, – tant était abondante l’eau que Rébecca avait tirée du puits. Homélies sur la Genèse: X – RÉBECCA Le premier jour.
Bref, le serviteur s’était dit en lui-même : « Celle qui me dira, parmi ces jeunes filles qui viennent puiser de l’eau : bois, puis j’abreuverai tes chameaux, celle-là sera l’épouse de mon maître. » – Alors Rébecca – ce nom signifie « patience » – dès qu’elle eut vu le serviteur, dès qu’elle aperçut la parole inspirée, « abaissa la cruche » qu’elle tenait sur l’épaule. Elle abaissa, en effet, la prétention hautaine de l’éloquence grecque et, s’inclinant vers l’humilité et la simplicité du langage inspiré, elle dit : « Bois, puis j’abreuverai tes chameaux. » Homélies sur la Genèse: X – RÉBECCA Le premier jour.
– Vous direz peut-être : si le serviteur représente la parole inspirée, comment se fait-il que Rébecca lui donne à boire, quand c’est plutôt lui qui devrait le faire ? Mais prenez garde : il fait comme le Seigneur Jésus. Le Seigneur Jésus est « le pain de vie » et nourrit les âmes qui ont faim ; pourtant il déclare qu’il a faim lui aussi, quand il dit : « J’ai eu faim et vous m’avez donné à manger. » – De même, il est « l’eau vive » et donne à boire à tous ceux qui ont soif ; pourtant il dit lui-même à la Samaritaine : « Donne-moi à boire. » Homélies sur la Genèse: X – RÉBECCA Le premier jour.
Je vous en prie, prenez patience, vous qui êtes assidus à écouter la parole, tandis que nous parlons pour les négligents et les indifférents. Prenez patience, parce que c’est de Rébecca, c’est-à-dire de la patience, qu’il s’agit. Il nous faut bien châtier un peu par la patience ceux qui ne se soucient pas de venir à l’assemblée et qui esquivent la parole de Dieu ; ils ne désirent ni le « pain de vie » ni « l’eau vive », ils ne sortent pas du camp ni de leur « maison de boue » pour recueillir la manne, ils ne viennent pas au rocher, à ce « rocher spirituel » où l’on boit, « ce rocher qui est le Christ », comme dit l’Apôtre. Ayez donc un peu patience, dis-je, car nous parlons aux indifférents, à ceux « qui se portent mal » ; « ce ne sont pas les gens bien portants qui ont besoin du médecin, mais ceux qui se portent mal. » Dites-moi, vous qui ne venez à l’église que les jours de fête, les autres jours ne sont-ils pas des jours de fête ? ne sont-ils pas les jours du Seigneur ? Ce sont les Juifs qui ont de rares jours déterminés pour célébrer leurs solennités ; aussi Dieu leur dit-il : « Je né peux souffrir vos néoménies, vos sabbats et votre grand jour. Mon âme a en horreur vos jeûnes, vos réjouissances et vos fêtes. » Dieu a donc en horreur ceux qui pensent qu’il n’y a qu’un jour de fête pour le Seigneur. Homélies sur la Genèse: X – RÉBECCA Le premier jour.
Remarquez l’importance des choses qui se passent près des eaux. Aussi vous invite-t-on à venir chaque jour près des eaux de la parole de Dieu et à vous tenir près de ses puits, comme faisait Rébecca, dont il est dit : « La jeune fille était très belle, elle était vierge et nul ne l’avait connue. » Homélies sur la Genèse: X – RÉBECCA Le premier jour.
Si le Christ est appelé le mari de l’âme, – car l’âme l’épouse quand elle vient à la foi, – son adversaire est bien cet autre mari que l’âme épouse quand elle s’écarte de la foi, celui-là même que l’Écriture nomme « l’ennemi » parce qu’ « il sème l’ivraie au milieu du bon grain ». Il ne suffit donc pas pour l’âme qu’elle soit chaste de corps, il faut encore que ce mari exécrable ne l’ait point connue. Car il peut arriver qu’une femme, tout en conservant la virginité du corps, connaisse ce mari exécrable qu’est le diable, et qu’en accueillant dans son coeur les traits de la convoitise elle perde la chasteté de l’âme. Et c’est parce que Rébecca était saintement vierge de corps et d’âme à la fois, que l’Écriture redouble son éloge et dit : « elle était vierge et aucun homme ne l’avait connue. » Homélies sur la Genèse: X – RÉBECCA Le premier jour.
« Rébecca s’en va donc à l’eau le soir. » Tout à l’heure nous avons déjà parlé du soir. Mais remarquez la prudence du serviteur : il ne veut amener comme épouse à son maître Isaac qu’une vierge parée et qui a beau visage. Il ne lui suffit pas que ce soit une vierge, il faut aussi qu’aucun homme ne l’ait connue et qu’il la trouve en train de puiser de l’eau, car il ne veut pas en fiancer une autre à son maître. Homélies sur la Genèse: X – RÉBECCA Le premier jour.
Faut-il penser que le père de Rébecca, riche certes, n’avait pas de bracelets ni de boucles d’oreilles à faire porter à sa fille ? Avait-il tant d’insouciance ou d’avarice pour ne point lui donner de parures ? C’est que Rébecca ne veut pas se parer de l’or de Bathuel : les parures d’un barbare et d’un ignorant ne lui conviennent pas. Mais elle cherche ses bijoux dans la maison d’Abraham, parce que la « patience » trouve sa parure dans la maison du sage. Homélies sur la Genèse: X – RÉBECCA Le premier jour.
Les oreilles de Rébecca n’auraient donc pas trouvé leur beauté si le serviteur d’Abraham n’était venu les embellir ; et ses mains ne reçoivent d’autres parures que celles qu’a envoyées Isaac. Car elle veut recevoir dans ses oreilles des paroles d’or et tenir dans ses mains des actions toutes d’or. Mais elle n’aurait pu ni recevoir ni mériter tout cela, si elle n’était venue auparavant puiser de l’eau aux puits. Vous donc, qui ne voulez pas venir près des eaux, qui ne voulez pas recevoir dans les oreilles les paroles d’or des Prophètes, comment pourrez-vous porter la parure de la doctrine, la parure des oeuvres, la parure de la vie ? Homélies sur la Genèse: X – RÉBECCA Le premier jour.
Donc Rébecca, en suivant le serviteur, arrive chez Isaac, – comme l’Église, en suivant la parole inspirée, arrive au Christ. Et où le trouve-t-elle ? « Près du puits du serment, dit l’Écriture, alors qu’il se promenait. » Homélies sur la Genèse: X – RÉBECCA Le premier jour.
Ainsi, en aucun cas, on ne s’éloigne des puits ; en aucun cas, on ne cesse de puiser de l’eau. C’est près d’un puits que l’on trouve Rébecca. C’est près d’un puits qu’elle, à son tour, trouve Isaac. C’est là qu’elle l’aperçoit pour la première fois, c’est là qu’elle « saute de son chameau », c’est là qu’elle voit Isaac que lui désigne le serviteur. Peut-être pensez-vous que l’Écriture ne s’en tient qu’à cela sur les puits ? Mais c’est à un puits aussi que vient Jacob et qu’il trouve Rachel ; c’est là que Rachel lui paraît « belle de taille et belle de visage ». C’est encore près d’un puits que Moïse trouve Séphora, fille de Raguel. Homélies sur la Genèse: X – RÉBECCA Le premier jour.
Quant à cette union de l’âme avec le Verbe, il est certain qu’elle ne peut se réaliser que par l’étude des Livres Saints, qui sont des puits, selon leur appellation figurée. Quiconque vient à ces puits et y puise de l’eau, c’est-à-dire quiconque, méditant l’Écriture, en approfondit le sens, aura des noces dignes de Dieu ; car son âme est unie avec Dieu. Celui-là descend aussi de son chameau, c’est-à-dire qu’il se défait de ses vices, rejette ses instincts déraisonnables, et s’unit à Isaac ; car il convient qu’Isaac s’avance de « vertu en vertu ». Le fils de la « vertu » qui est Sara se lie et s’unit maintenant à la « patience » qui est Rébecca ; car c’est en cela que consiste le passage « de la vertu à la vertu » et « de la foi à la foi ». Homélies sur la Genèse: X – RÉBECCA Le premier jour.
La lecture présente nous rapporte qu’ « Isaac pria le Seigneur pour Rébecca son épouse, parce qu’elle était stérile ; le Seigneur l’exauça et elle conçut. Et ses enfants se heurtaient dans son sein ». Homélies sur la Genèse: XII – RÉBECCA CONÇOIT ET ENFANTE Le premier jour.
Demandons-nous d’abord pourquoi l’Écriture rapporte de plusieurs saintes femmes qu’elles étaient stériles, comme Sara, comme aujourd’hui Rébecca. Rachel aussi, la préférée d’Israël, était stérile. Stérile également Anne la mère de Samuel. Stérile encore Elisabeth, notent les Évangiles. Et l’Écriture donne à toutes ces femmes ce même titre d’honneur d’avoir mis au monde, à la fin de leur stérilité, un saint rejeton. Homélies sur la Genèse: XII – RÉBECCA CONÇOIT ET ENFANTE Le premier jour.
Ainsi, dans notre texte, l’Écriture dit que Rébecca était stérile, mais « Isaac pria pour elle le Seigneur qui l’exauça, et elle conçut. Et ses enfants se heurtaient dans son sein », dit l’Écriture. Qu’a-t-elle donc conçu, celle qui était stérile ? Ses fils avant de naître se heurtent, et celle qui avait renoncé à toute descendance porte dans son sein des peuples et des nations. Car il est dit : « Rébecca s’en alla interroger le Seigneur, et le Seigneur lui dit : Tu as deux nations dans ton sein, et deux peuples se sépareront au sortir de tes entrailles. » Homélies sur la Genèse: XII – RÉBECCA CONÇOIT ET ENFANTE Le premier jour.
– Voyons plutôt maintenant ce que signifie cette parole :, « Rébecca s’en alla interroger le Seigneur ». Elle s’en alla. Où alla-t-elle ? D’un lieu où le Seigneur n’était pas à un lieu où il était ? C’est bien ce que semblent indiquer ces mots : « Elle s’en alla interroger le Seigneur. » Mais le Seigneur n’est-il pas partout ? N’a-t-il pas dit lui-même : « Je remplis le ciel et la terre » ? Où donc s’en alla Rébecca ? Homélies sur la Genèse: XII – RÉBECCA CONÇOIT ET ENFANTE Le premier jour.
Je ne pense pas qu’elle alla d’un lieu à un autre, mais qu’elle passa d’une vie à une autre, d’une action à une autre, du bien au mieux, qu’elle progressa de l’utile au plus utile, qu’elle avança de la sainteté à une sainteté plus haute. Car il est absurde de penser que Rébecca, qui avait été formée dans la maison du sage Abraham par les savantes leçons d’Isaac, était assez simple et ignorante pour croire que Dieu était enfermé en quelque lieu, et pour aller l’y interroger sur le sens de l’agitation de ses enfants dans son sein. Homélies sur la Genèse: XII – RÉBECCA CONÇOIT ET ENFANTE Le premier jour.
De la même façon, notre texte dit maintenant de Rébecca qu’ « elle alla interroger le Seigneur », ce qui ne veut pas dire, comme nous l’avons montré, qu’elle emploie la marche à pieds pour s’éloigner, mais les progrès spirituels. Homélies sur la Genèse: XII – RÉBECCA CONÇOIT ET ENFANTE Le premier jour.
– Dieu dit donc à Rébecca : Homélies sur la Genèse: XII – RÉBECCA CONÇOIT ET ENFANTE Le premier jour.
Ainsi vous voyez cet autre peuple qui est en nous ; mais il est plus petit, tandis que le premier est plus grand. Les méchants sont toujours plus nombreux que les bons, et les vices que les vertus. Mais si nous ressemblons à Rébecca et si nous méritons de concevoir d’Isaac, c’est-à-dire du Verbe de Dieu, alors en nous aussi « un peuple dominera l’autre et le plus grand servira le plus petit », la chair servira l’esprit et les vices céderont le pas aux vertus. Homélies sur la Genèse: XII – RÉBECCA CONÇOIT ET ENFANTE Le premier jour.
« Et le temps fut accompli où elle devait enfanter, et il se trouva qu’elle avait deux jumeaux. » L’expression : « Le temps fut accompli où elle devait enfanter », n’est presque jamais employée que pour de saintes femmes. Elle est employée pour Rébecca, pour Elisabeth la mère de Jean et pour Marie la mère de Notre Seigneur Jésus-Christ. Aussi me paraît-il que ces enfantements marquent quelque événement important et privilégié, et que l’accomplissement du temps indique que l’enfant qui naît est parfait. Homélies sur la Genèse: XII – RÉBECCA CONÇOIT ET ENFANTE Le premier jour.