Quand l’âme quitte l’Egypte de cette vie…

Contemple tout d’abord l’ordonnance arithmétique du mystère : si l’on en établit le compte exact, on trouvera quarante-deux stations pour la sortie des fils d’Israël hors de l’Egypte; d’autre part la venue de notre Seigneur et Sauveur en ce monde s’est faite en quarante-deux générations. Matthieu l’évangéliste le déclare en propres termes : « D’Abraham au roi David, quatorze générations; de David à la déportation de Babylone, quatorze générations; de la déportation de Babylone au Christ, quatorze générations ». Ces quarante-deux générations sont les stations que le Christ a parcourues pour descendre dans l’Egypte de ce monde; ceux qui remontent d’Egypte parcourent le même nombre de quarante-deux stations. Moïse s’est exprimé exactement quand il a dit: « Les fils d’Israël montèrent avec leur Force ». Quelle est leur Force, sinon le Christ, qui est la « Force de Dieu » ? Celui qui monte, monte avec Lui, qui est descendu chez nous, et il essaie d’arriver au lieu d’où Il est descendu; car Il n’en est pas descendu par nécessité, mais par bienveillance, afin de réaliser la parole: « Celui qui est descendu est le même qui est remonté ». Ainsi les fils d’Israël parviennent-ils en quarante-deux stations au lieu où ils commencent à prendre possession de leur héritage. Ce commencement, ce fut le moment où, « Ruben, Gad et la demi-tribu de Manassé » reçoivent la « terre de Galaad ». C’est donc un fait établi : le Christ est descendu jusqu’à nous à travers quarante-deux ancêtres selon la chair comme par autant de stations; et c’est à travers le même nombre de stations que les fils d’Israël montent jusqu’au lieu où commence l’héritage promis.

Si tu as compris quel mystère renferme ce nombre de montée et de descente, approche maintenant, commençons à monter par les étapes de la descente du Christ, et prenons pour première station la dernière des Siennes, Sa naissance du sein de la Vierge; que notre première station, à nous qui voulons sortir d’Egypte, soit celle où, abandonnant le culte des idoles et l’adoration des démons, qui ne sont pas des dieux, nous croyons que le Christ est né de la Vierge et de l’Esprit Saint, et que « le Verbe fait chair est venu en ce monde » . Puis essayons de monter un à un les degrés de la foi et des vertus. Si nous y persévérons assez longtemps pour arriver à la perfection, l’on pourra dire que nous avons fait station à chaque degré des vertus jusqu’au terme de notre éducation et de nos progrès, jusqu’à l’obtention de l’héritage promis.

D’autre part, quand l’âme quitte l’Egypte de cette vie pour atteindre la Terre Promise, elle doit suivre certains chemins et parcourir, comme nous avons dit, certaines stations. Le prophète, je crois, y faisait allusion quand il disait: « Je me suis rappelé cela et j’ai épanché sur moi mon âme parce que j’entrerai dans le lieu du tabernacle admirable, jusqu’à la maison de Dieu ». Ce sont les stations, ce sont les tabernacles dont il dit ailleurs : « Que tes tabernacles sont aimables, Seigneur des Vertus ! Mon âme aspire et défaille après les parvis du Seigneur ». C’est encore pourquoi le même prophète dit ailleurs : « Beaucoup pérégrina mon âme » ?. Comprends donc si tu peux, ce que sont ces pérégrinations où l’âme, gémissante et dolente, pleure de se voir engagée si longtemps. Mais l’intelligence de ces pérégrinations est affaiblie et obscurcie tant qu’on y est encore; elle en comprendra et en verra mieux la raison quand elle sera retournée dans son repos, c’est-à-dire sa patrie, le Paradis. Le prophète contemplait cette vérité sous une forme mystérieuse quand il disait: « Mon âme, retourne à ton repos, car le Seigneur t’a fait du bien ». Cependant elle pérégrine, elle voyage et accomplit des stations, sans nul doute parce que l’économie divine y a attaché une utilité quelconque, comme le prouve le passage : « Je t’ai affligé et Je t’ai nourri dans le désert de la manne que n’ont pas connue tes pères, afin de savoir ce qu’il y avait dans ton cœur ». Telles sont donc les stations par lesquelles on passe de la terre au Ciel.