puissance de Dieu (Orígenes)

Voyons cependant comment nous pouvons appuyer ce que nous venons de dire sur l’autorité de la divine Écriture. L’apôtre Paul dit que le Fils unique est l’Image du Dieu invisible, le premier-né de toute créature; écrivant aux Hébreux, il l’appelle le rayonnement de sa gloire et la figure et expression de sa substance. Nous trouvons cependant même dans la Sagesse attribuée à Salomon une description de la Sagesse de Dieu en ces termes : Elle est un souffle de la puissance de Dieu et une émanation très pure de la gloire du Tout-Puissant. C’est pourquoi rien de souillé ne peut pénétrer en elle. Car elle est le rayonnement de la lumière éternelle, le miroir sans tache de l’activité de Dieu et l’image de sa bonté. Nous parlons, comme nous l’avons dit plus haut, de la Sagesse de Dieu, qui a reçu son être substantiel en celui-là seul qui est le principe de tout et dont elle est née. Et cette Sagesse, puisqu’elle est identique à celui qui seul est fils par nature, est appelée Fils unique. Traité des Principes: LIVRE I: Premier traité (I, 1-4): Seconde section

Voyons encore ce qu’il faut penser de ce que nous lisons dans la Sagesse de Salomon au sujet de la Sagesse : elle est un souffle de la puissance de Dieu et une émanation très pure de la gloire du Tout-Puissant, le rayonnement de la lumière éternelle et le miroir sans tache de l’activité ou de la puissance de Dieu et l’image de sa bonté. Cet écrit donne donc de Dieu cinq désignations et par chacune il indique certains attributs de la Sagesse de Dieu : il nomme en effet la puissance de Dieu, la gloire, la lumière éternelle, l’activité et la bonté. Il appelle la Sagesse un souffle, mais non de la gloire du Tout-Puissant, ni de la lumière éternelle, ni de l’activité du Père, ni de sa bonté, car à aucun de ces termes il ne convenait d’attribuer le souffle : mais, en toute propriété de termes, il a dit que la Sagesse est un souffle de la puissance de Dieu. Il faut comprendre cette puissance de Dieu comme celle qui le rend vigoureux, qui lui permet d’établir, de contenir, de gouverner tout le visible et l’invisible, de suffire à tout ce dont il assume la providence : à tout cela cette puissance est unie et présente. Bien que de cette puissance si immense ce souffle et, pour ainsi dire, cette vigueur elle-même, devenue un être subsistant en propre, procède de cette même puissance comme la volonté de l’intelligence, en tant que volonté même de Dieu, elle devient néanmoins Puissance de Dieu. Elle est alors une autre puissance subsistant en propre et, comme le dit l’Écriture, un souffle de la puissance de Dieu première et inengendré, tirant d’elle tout ce qu’elle est : il n’y a pas eu en effet de moment où elle n’était pas. Traité des Principes: LIVRE I: Premier traité (I, 1-4): Seconde section

Si quelqu’un voulait affirmer qu’elle n’existait pas auparavant, mais qu’ensuite elle est venue à l’être, qu’il dise pourquoi le Père qui lui a donné l’être ne l’a pas fait auparavant. Et s’il lui a donné à un certain moment un commencement où ce souffle a procédé de la puissance de Dieu, nous demanderons de nouveau pourquoi cela ne s’est pas produit avant ce commencement dont on parle ; et ainsi, en recherchant toujours ce qui s’est passé auparavant et en poussant toujours plus haut nos interrogations, nous parviendrons à comprendre que, puisque toujours Dieu pouvait et voulait, il n’y a jamais eu de raison ni de motif pour que Dieu n’ait pas toujours eu le bien qu’il voulait. Cela montre que ce souffle de la puissance de Dieu a toujours été et n’a jamais eu de commencement, si ce n’est Dieu lui-même. Il ne convenait pas d’ailleurs qu’il ait eu un autre commencement que Dieu lui-même dont il tenait l’être et la naissance. Et selon cette parole de l’Apôtre : Le Christ, Puissance de Dieu, il ne faut pas seulement l’appeler le souffle de la puissance de Dieu, mais la Puissance procédant de la puissance. Traité des Principes: LIVRE I: Premier traité (I, 1-4): Seconde section

Mais la Sagesse est encore appelée le miroir sans tache de l’activité de Dieu. Il faut donc comprendre d’abord ce qu’est cette activité de la puissance de Dieu. C’est la vigueur, pour ainsi dire, avec laquelle agit le Père lorsqu’il crée, qu’il pourvoie à tout, qu’il juge, qu’il dispose et gouverne chaque chose en son temps. De même que tous les mouvements et les actions de celui qui regarde dans un miroir produisent une image qui se meut et qui agit des mêmes mouvements et des mêmes actions, sans absolument aucune différence, de même selon sa propre volonté il faut comprendre la Sagesse, quand elle est appelée le miroir immaculé de la puissance et de l’activité paternelle. Ainsi le Seigneur Jésus-Christ, Sagesse de Dieu, parle-t-il de lui-même, lorsqu’il dit : Les oeuvres que fait le Père, le Fils les fait pareillement. Et il ajoute : Le Fils ne peut rien faire de lui-même, s’il ne voit le Père le faisant. Puisque le Fils ne se distingue ni ne diffère en rien du Père par la puissance de ses oeuvres, que l’ouvrage du Fils n’est pas autre que celui du Père, mais qu’un seul et même mouvement, pour ainsi dire, est dans les deux, le Fils est appelé un miroir immaculé pour faire comprendre qu’il n’y a aucune dissemblance entre Fils et Père. Certains parlent de similitude, d’imitation du maître par le disciple, ou ils disent que le Fils a exécuté dans la matière corporelle ce que le Père avait déjà formé dans les substances spirituelles : comment cela pourrait-il convenir, puisque l’Évangile ne dit pas que le Fils fait des oeuvres semblables, mais qu’il fait semblablement les mêmes oeuvres ? Traité des Principes: LIVRE I: Premier traité (I, 1-4): Seconde section

De cette manière l’action de la puissance de Dieu, Père et Fils, s’étend sans distinction sur toute créature, mais nous trouvons que seuls les saints possèdent la participation au Saint Esprit. C’est pourquoi il est dit : Personne ne peut dire: Jésus est Seigneur, sinon dans l’Esprit Saint. Et c’est à peine une fois que les apôtres ont mérité d’entendre : Vous recevrez la puissance de l’Esprit Saint venant sur vous. C’est ainsi que je pense logique que celui qui a péché contre le Fils de l’homme soit digne de pardon, parce que celui qui participe à la Parole – ou à la Raison -, s’il cesse de vivre de façon raisonnable, on jugera qu’il est tombé dans l’ignorance ou la sottise et qu’il peut donc mériter le pardon; mais celui qui a été digne de participer au Saint Esprit et est revenu en arrière, est considéré comme ayant, par le fait même et par son action, blasphémé contre l’Esprit Saint. Traité des Principes: LIVRE I: Premier traité (I, 1-4): Troisième section

Mais quelqu’un nous objectera peut-être, sur un point que nous avons déjà mentionné dans notre exposé : Comment est-il parlé d’une anthropomorphismes âme de Dieu ? Nous lui répondrons ce qui suit : Tout ce qui est attribué à Dieu de corporel, doigts, mains, bras, yeux, bouche, pieds, ne désigne pas selon nous des membres humains, mais certaines facultés de Dieu sous ces appellations de membres corporels ; il faut penser de même que quelque chose d’autre est indiqué par cette appellation d’âme de Dieu. Si nous pouvons nous permettre l’audace de parler encore sur un tel sujet, on peut entendre peut-être par âme de Dieu son Fils unique. En effet, de même que l’âme, insérée par tout le corps, fait tout mouvoir, opère et accomplit toutes choses, de même le Fils unique de Dieu, sa Parole et sa Sagesse, atteint et parvient à toute la puissance de Dieu, car il y est inséré. Et c’est peut-être pour indiquer ce mystère que, dans les Écritures, Dieu est représenté ou décrit comme un corps. Il faut, certes, examiner si on ne peut pas encore comprendre le Fils unique comme l’âme de Dieu parce qu’il est venu lui-même dans ce lieu d’affliction et qu’il est descendu dans cette vallée de larmes, dans le lieu de notre humiliation, comme dit le psaume : Parce que tu nous as humiliés dans le lieu d’affliction. Je sais enfin que quelques-uns, commentant ce qui est dit par le Sauveur dans l’Évangile : Mon âme est triste jusqu’à la mort, l’ont interprété des apôtres ; il les avait appelés son âme parce qu’ils étaient meilleurs que le reste du corps. Puisque la multitude des croyants est dite le corps du Sauveur, ils ont soutenu qu’il fallait comprendre les apôtres comme son âme, parce qu’ils sont meilleurs que le reste de la multitude. Traité des Principes: Livre II: Quatrième traité (II, 8-9): Première section

Ce serait un gros travail de passer en revue les prophéties très anciennes concernant chacune des réalités futures, afin que celui qui doute, frappé de leur inspiration divine, rejette toute hésitation et tout ce qui le tire en arrière et se donne de toute son âme aux paroles de Dieu. Mais si le caractère surhumain des pensées (de l’Écriture) pour ceux qui ne sont pas instruits n’apparaît guère dans la lettre de chaque passage, il n’y a là rien d’étonnant : en effet, en ce qui concerne les oeuvres de la providence qui s’étend à tout l’univers, certaines apparaissent très clairement en tant qu’oeuvres de la Providence, mais d’autres sont cachées pour rendre possible l’incroyance envers le Dieu qui gouverne toutes choses avec un art et une puissance indicibles. La manière dont opère le Dieu provident n’est pas aussi claire quand il s’agit des réalités terrestres que quand il s’agit du soleil, de la lune ou des étoiles, mais elle n’est pas non plus aussi claire en ce qui concerne les événements humains que quand il s’agit des âmes et des corps des animaux, car le pourquoi et la finalité peuvent être parfaitement trouvés par ceux que cela intéresse, au sujet des instincts, des imaginations et des natures des animaux et de la constitution des corps. Mais la Providence n’est pas victime d’une banqueroute à cause de nos ignorances aux yeux de ceux, du moins, qui l’ont une fois pour toutes bien acceptée ; il en est de même de la divinité de l’Écriture, qui s’étend à toute l’Écriture, bien que notre faiblesse ne puisse faire ressortir dans chacune de ses expressions la splendeur cachée des doctrines qui est déposée dans une lettre vile et méprisable : Nous avons en effet ce trésor dans des vases d’argile afin qu’éclaté la démesure de la puissance de Dieu et qu’on ne pense pas qu’elle vienne de nous, les hommes. En effet, si les méthodes de démonstration dont les hommes ont l’habitude et qui sont consignées dans les livres avaient convaincu l’humanité, on soupçonnerait avec raison notre foi d’avoir pour origine la sagesse des hommes et non la puissance de Dieu ; mais maintenant, pourvu qu’on lève les yeux, il est clair que la parole et la prédication tiennent leur pouvoir sur la foule, non des expressions persuasives de la sagesse, mais de la manifestation de l’esprit et de la puissance. Traité des Principes: Livre IV: Neuvième traité (IV, 1-3): Première section