Pharaon (Orígenes)

Vous voudriez voir que l’Écriture divine connaît bien des bois qui sont raisonnables ? Rappelez-vous ce qui est écrit dans le prophète Ézéchiel : « La onzième année, au troisième mois, le premier jour du mois, la parole de Dieu me fut adressée en ces termes : Fils de l’homme, dis à Pharaon, roi d’Egypte et à sa multitude : A qui te compares-tu dans ta grandeur ? Voilà qu’Assur était un cyprès sur le Liban, à la belle ramure, à l’ombrage épais, ayant sa cime dans les nues. Les eaux l’avaient fait croître, l’abîme l’avait fait grandir, en faisant couler ses fleuves autour de lui et en envoyant ses ruisseaux à tous les arbres des champs. C’est pourquoi sa taille s’élevait plus haute que tous les arbres des champs. » Et peu après : « Les cyprès nombreux dans le jardin de Dieu et les pins n’égalaient pas ses branches, et les sapins ne leur ressemblaient pas. Aucun arbre dans le jardin de Dieu ne l’égalait en beauté, et tous les arbres du jardin des délices de Dieu lui portaient envie. » Homélies sur la Genèse: II – L’ARCHE DE NOÉ Le premier jour.

– Quant à son épouse, nous disons qu’elle représente le peuple qui est sorti d’Egypte, qui a traversé la Mer Rouge et qui a échappé aux poursuites de Pharaon comme à l’embrasement de Sodome ; mais, regrettant les viandes, « la cuisine, les oignons et les concombres d’Egypte », il regarda en arrière et tomba dans le désert, « pris lui-même de convoitise dans la solitude ». C’est donc bien la Loi qui perdit et abandonna ce peuple, comme Lot fit pour sa femme qui avait regardé en arrière. Homélies sur la Genèse: V – LES FILLES DE LOT Le premier jour.

– Cependant, jadis, Pharaon lui aussi avait voulu prendre Sara, mais il ne le voulait pas « avec un coeur pur ». – La vertu ne peut entrer chez qui que ce soit sans la pureté de coeur. Aussi l’Écriture rapporte que « le Seigneur frappa Pharaon de grands et terribles malheurs ». Car la vertu ne pouvait pas habiter avec l’exterminateur, – ainsi que signifie en notre langue le mot de Pharaon. Homélies sur la Genèse: VI – ABIMÉLECH ET SARA Le premier jour.

Mais considérons ce qu’Abimélech dit au Seigneur : « Tu sais, Seigneur, dit-il, que j’ai fait cela avec un coeur pur. » – Abimélech agit tout autrement que Pharaon. Il est loin d’être totalement ignorant et perverti : il sait au moins qu’il faut un coeur pur pour se préparer à la vertu. Aussi Dieu le guérit-il, à la prière d’Abraham, pour avoir voulu prendre la vertu avec un coeur pur. Et il n’y eut pas que lui à être guéri, il y eut aussi ses servantes. Homélies sur la Genèse: VI – ABIMÉLECH ET SARA Le premier jour.

Donc, selon notre système d’allégorie, Pharaon – c’est-à-dire l’homme impur, l’exterminateur – ne pouvait absolument pas prendre Sara, c’est-à-dire la vertu, pour épouse. Tandis qu’Abimélech, c’est-à-dire l’homme à la vie pure, le philosophe, le pouvait, lui qui la cherchait avec un coeur pur. Cependant « le moment n’était pas encore venu ». Aussi la vertu reste avec Abraham, elle reste avec la circoncision, jusqu’à ce que vienne le temps où, avec le Christ Jésus notre Seigneur « en qui habite corporellement la plénitude de la divinité », la Vertu totale et parfaite passe à l’Église des Gentils. Homélies sur la Genèse: VI – ABIMÉLECH ET SARA Le premier jour.

Dans la lecture d’aujourd’hui, donc, ce n’est pas Jacob, mais Israël qui dit : « C’est une grande chose pour moi que mon fils Joseph soit encore vivant. » – Et quand il arrive au puits du serment et « qu’il offre un sacrifice au Dieu de son père Isaac », il n’est pas appelé Jacob, mais Israël. – Si vous demandez pourquoi Dieu, lui parlant en songe la nuit, ne lui dit pas « Israël, Israël », mais « Jacob, Jacob », c’est sans doute parce qu’il faisait nuit et qu’il en était toujours à mériter d’entendre la voix de Dieu en songe et non pas encore directement. – Quand il se rend en Egypte, l’Ecriture ne dit pas Israël, mais Jacob « et ses fils avec lui ». – Quand il est en présence de Pharaon pour le bénir, il est appelé Jacob et non Israël. – C’est Jacob et non pas Israël qui dit à Pharaon que « les jours de sa vie ont été courts et mauvais », ce que ne dirait certes jamais Israël. – Ensuite, au contraire, ce n’est pas de Jacob mais d’Israël qu’il est dit : « Il appela son fils Joseph et il lui dit : si j’ai trouvé grâce à tes yeux, mets la main sous ma cuisse et use envers moi de bonté et de fidélité ». – Celui qui se prosterna vers le sommet du bâton de Joseph, n’était pas Jacob, mais Israël. – Puis, quand il bénit les fils de Joseph, il est appelé Israël. – Quand il réunit ses fils autour de lui, il dit : « Rassemblez-vous, que je vous annonce ce qui vous arrivera à la fin des jours. Rassemblez-vous, fils de Jacob, et écoutez Israël votre père. » Homélies sur la Genèse: XV – LES FRÈRES DE JOSEPH REMONTENT DE L’EGYPTE – JACOB APPREND QUE JOSEPH EST VIVANT Le premier jour.

– Au témoignage de l’Écriture, il n’y a pas d’Egyptien libre. Car Pharaon «réduisit son peuple en servitude », ne laissant personne de libre en Egypte, supprimant même la liberté dans tout le pays. Sans doute est-ce à cause de cela qu’il est écrit : « Je suis le Seigneur ton Dieu qui t’ai fait sortir du pays d’Egypte, de la maison de servitude ». L’Egypte devint donc la maison de la servitude, et, ce qui est plus regrettable, de la servitude volontaire. Homélies sur la Genèse: XVI – JOSEPH ACQUIERT POUR PHARAON LES TERRES DE L’EGYPTE Le premier jour.

Tandis que lorsqu’il s’agit du peuple égyptien, c’est facilement que Pharaon le réduisit en servitude, et il n’est pas écrit qu’il fut obligé d’y employer la force. Car les Égyptiens sont naturellement portés à une vie dégradante et deviennent vite les esclaves de toute espèce de vices. Considérez leur origine : vous verrez que leur ancêtre Cham, qui s’était moqué de la nudité de son père, avait mérité de s’entendre dire que son fils Chanaan serait l’esclave de ses frères et qu’ainsi sa condition d’esclave témoignerait de sa dépravation morale. Il est donc bien juste que la corruption de la postérité soit le reflet de la flétrissure originelle de la race. Homélies sur la Genèse: XVI – JOSEPH ACQUIERT POUR PHARAON LES TERRES DE L’EGYPTE Le premier jour.

On pourrait nous dire : comment se fait-il que ce soit Joseph qui ait mis le pays en possession de Pharaon, et que ce soit ce saint qui ait décrété pour Pharaon, selon ce que dit l’Écriture, cette servitude générale, qui n’est que la conséquence de l’état de péché, comme nous venons de l’expliquer ? – A quoi nous pouvons répondre que l’Écriture elle-même justifie la mesure prise par le saint, puisqu’elle dit que ce sont les Égyptiens qui ont vendu leur personne et leurs biens. La faute ne retombe donc pas sur celui qui gouverne, quand c’est l’état de ceux qui sont gouvernés qui commande les mesures à prendre. Homélies sur la Genèse: XVI – JOSEPH ACQUIERT POUR PHARAON LES TERRES DE L’EGYPTE Le premier jour.

– La suite, maintenant : « Les Égyptiens, dit l’Écriture, vendirent leur terre à Pharaon, car la faim les pressait. » Homélies sur la Genèse: XVI – JOSEPH ACQUIERT POUR PHARAON LES TERRES DE L’EGYPTE Le premier jour.

– Dans ce qui suit, il est dit que la terre des prêtres égyptiens ne passa pas sous la domination de Pharaon et que les prêtres ne se vendirent pas eux-mêmes comme fit le reste des Égyptiens. C’est que les prêtres recevaient du froment et des cadeaux qui venaient de Pharaon lui-même et non pas de Joseph. Aussi bien, considérés comme appartenant de plus près à la famille de Pharaon que les autres, ils ne vendirent pas leurs terres à Pharaon. Mais cela montre qu’ils étaient plus pervers ; puisque cette étroite liaison avec Pharaon leur vaut de ne pas recevoir d’ordre de changement et de garder une possession de mauvais aloi. Et de même que le Seigneur dit à ceux qui étaient avancés dans la foi et la sainteté : « Je ne vous appelle plus serviteurs, mais mes amis », de même Pharaon dit à ces prêtres, comme s’ils étaient parvenus au plus haut degré de la perversité et au sacer-doce de la perdition : « Je ne vous appelle plus serviteurs, mais mes amis. » Homélies sur la Genèse: XVI – JOSEPH ACQUIERT POUR PHARAON LES TERRES DE L’EGYPTE Le premier jour.

Voulez-vous savoir ce qui distingue les prêtres de Dieu des prêtres de Pharaon ? C’est que Pharaon donne des terres à ses prêtres, tandis que le Seigneur ne donne pas à ses prêtres de part sur la terre, mais leur dit : « C’est moi qui suis votre part. » Vous qui lisez ce texte, observez tous les prêtres du Seigneur et faites la différence entre eux : ou dirait que ceux dont la part est sur la terre et qui s’adonnent aux occupations et aux soins terrestres sont moins des prêtres du Seigneur que des prêtres de Pharaon. Car Pharaon veut que ses prêtres possèdent des terres et s’appliquent à la culture des champs, mais non de leur âme ; il veut qu’ils se consacrent à leur domaine et non à la loi. Tandis que le Christ notre Seigneur, ce qu’il enjoint à ses prêtres, écoutons-le plutôt : « Quiconque ne renonce à tout ce qu’il possède ne peut pas être mon disciple. » Homélies sur la Genèse: XVI – JOSEPH ACQUIERT POUR PHARAON LES TERRES DE L’EGYPTE Le premier jour.

Et maintenant, profitons au moins de la leçon, hâtons-nous de la suivre, hâtons-nous de quitter les prêtres de Pharaon aux possessions terrestres, pour passer du côté des prêtres du Seigneur dont la part n’est pas sur la terre , et dont « la portion est le Seigneur ». Homélies sur la Genèse: XVI – JOSEPH ACQUIERT POUR PHARAON LES TERRES DE L’EGYPTE Le premier jour.

Il est dit, dans ce qui suit, qu’après la famine et la servitude, le peuple égyptien verse le cinquième de ses revenus à Pharaon ; par contre, le peuple d’Israël en verse le dixième aux prêtres. Croyez bien qu’il y a d’excellentes raisons pour étayer ce dire de l’Écriture. Le peuple égyptien, n’est-ce pas, doit payer un tribut où le nombre cinq entre en ligne de compte : eh bien ! par la, ce sont les cinq sens corporels qui sont désignés, dont le peuple charnel est l’esclave. Car les Égyptiens se complaisent toujours aux choses visibles et corporelles. Le peuple d’Israël au contraire, honore le nombre dix, nombre de la perfection : en effet, il a reçu les dix paroles de la loi et la vertu du décalogue le tient enchaîné, lui permettant de recevoir de la libéralité divine des secrets ignorés de ce monde. Dans le Nouveau Testament, le nombre dix est également à l’honneur : c’est en dix vertus que se déploie, y est-il expliqué, le fruit de l’Esprit ; c’est dix mines que le serviteur fidèle offre au Seigneur comme produit de son travail, et c’est de dix villes qu’il reçoit le commandement. Homélies sur la Genèse: XVI – JOSEPH ACQUIERT POUR PHARAON LES TERRES DE L’EGYPTE Le premier jour.

Par tout cela vous voyez la différence qu’il y a entre le peuple égyptien et le peuple d’Israël, entre les prêtres de Pharaon et ceux du Seigneur. Rentrez en vous-mêmes et demandez-vous à quel peuple et à quel ordre de prêtres vous appartenez. Si vous êtes encore esclaves des sens charnels, si vous payez encore l’impôt où le nombre cinq entre en ligne de compte, si vous vous complaisez aux « choses visibles et temporelles », et si vous méconnaissez les choses invisibles et éternelles, reconnaissez que vous faites partie du peuple égyptien. Mais si vous avez sans cesse devant les yeux le décalogue de la loi et la décade néotestamentaire que nous avons expliquée plus haut, si vous les offrez en dîmes, si vous immolez en esprit de foi les premiers-nés de votre sens au « premier-né d’entre les morts », et si vous rapportez vos prémices à celui qui est « le commencement de tout », alors « vous êtes un vrai Israélite en qui il n’y a point d’artifice ». Homélies sur la Genèse: XVI – JOSEPH ACQUIERT POUR PHARAON LES TERRES DE L’EGYPTE Le premier jour.

Pour nous, il se peut que nous ayons l’air d’être des-cendus en Egypte, il se peut qu’en vertu de notre condi-tion charnelle nous soutenions les luttes et les combats de ce monde, il se peut que nous habitions au milieu des esclaves de Pharaon ; en tout cas, si nous restons près de Dieu, si nous nous appliquons à la méditation de ses commandements, si nous recherchons avec soin « ses préceptes et ses ordonnances », – car c’est cela que signifie : « être toujours près de Dieu, penser aux choses de Dieu », « chercher les choses de Dieu », – Dieu de son côté sera toujours avec nous, par le Christ Jésus notre Seigneur, « à qui est la gloire dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il ». Homélies sur la Genèse: XVI – JOSEPH ACQUIERT POUR PHARAON LES TERRES DE L’EGYPTE Le premier jour.