Michel (Orígenes)

Je pense qu’il faut raisonner pareillement à propos des anges et ne pas juger fortuit qu’à tel ange ait été attribué tel office, par exemple à Raphaël la charge de soigner et de guérir, à Gabriel la surveillance des guerres, à Michel le soin des prières et des supplications des mortels. Il n’y a pas à penser qu’ils aient mérité ces fonctions autrement que par leurs mérites, leur zèle et les vertus qu’ils ont manifestées avant l’organisation de ce monde. C’est alors que, dans l’ordre des archanges, tel ou tel genre d’office a été attribué à chacun ; d’autres ont mérité d’être inscrits dans l’ordre des anges et d’agir sous l’autorité de tel ou tel archange, de tel ou tel chef ou prince de son ordre. Tout cela, nous l’avons dit, ne s’est pas produit fortuitement et sans discernement, mais a été ordonné par un jugement de Dieu très adapté et très juste et disposé en fonction des mérites selon son jugement et avec son approbation : de telle sorte qu’à cet ange a été confiée l’Église des Ephésiens, à cet autre celle des Smyrniotes, cet ange est devenu celui de Pierre et cet autre celui de Paul; et ainsi de suite, à chacun des plus petits qui sont dans l’Église a été attribué tel ou tel ange, de ceux qui voient chaque jour la face de Dieu, mais aussi celui qui doit être l’ange qui entoure de tous côtés ceux qui craignent Dieu. Il ne faut pas songer que tout cela se soit produit par hasard et fortuitement, ni que ces anges aient été faits tels par nature, pour ne pas accuser en cela aussi le Créateur de partialité : la décision est intervenue selon les mérites et les vertus, selon la vigueur et les talents de chacun, par le très juste et très impartial gouverneur de l’univers, il faut le croire. LIVRE I: Second traité (I, 5-8): Deuxième section

Il faut voir maintenant selon les Écritures comment les puissances contraires et le diable lui-même combattent le genre humain, le provoquant et l’incitant au péché. D’abord le Livre de la Genèse rapporte que le serpent séduisit Eve ; dans l’Ascension de Moïse, livre que mentionne dans son épître l’apôtre Jude, l’archange Michel se disputant avec le diable au sujet du corps de Moïse dit que ce serpent, inspiré par le diable, fut cause de la prévarication d’Adam et d’Eve. Mais certains se demandent aussi quel est l’ange qui du ciel parle à Abraham en ces termes : Maintenant je sais que tu crains Dieu et que tu n’as pas épargné ton fils bien-aimé, que tu aimais, à cause de moi. Il est écrit clairement qu’il s’agit d’un ange, qui dit savoir alors qu’Abraham craignait Dieu et n’avait pas épargné son fils bien-aimé, comme l’Écriture le dit, mais il n’a pas déclaré (qu’Abraham avait fait cela) pour Dieu, mais pour lui, c’est-à-dire pour celui qui parlait ainsi. Il faut se demander aussi de qui parle l’Exode quand il est dit que ce personnage voulut tuer Moïse parce qu’il partait pour l’Egypte. Mais ensuite quel est l’ange dit exterminateur et celui qui est appelé dans le Lévitique apopompaeus, c’est-à-dire celui qui emporte, et dont l’Écriture dit : Un sort pour le Seigneur et un sort pour l’apopompaeus – c’est-à-dire pour celui qui emporte. Mais dans le premier Livre des Rois il est écrit qu’un esprit très mauvais suffoquait Saul. Dans le troisième Livre des Bois, le prophète Michée dit : J’ai vu le Dieu d’Israël siégeant sur son trône et toute la milice du ciel se tenait autour de lui à sa droite et à sa gauche. Et le Seigneur dit: Qui trompera Achab, roi d’Israël, pour qu’il monte et tombe à Ramot de Galaad. Et celui-ci parla ainsi et celui-là parla ainsi. Mais un esprit sortit (de la foule), se tint devant le Seigneur et dit: Je le tromperai. Et le Seigneur lui dit: Comment ? Il répondit: J’irai et je serai un esprit menteur dans la bouche de tous ses prophètes. Le Seigneur lui dit: Tu le tromperas, certainement tu le pourras ; va donc et agis ainsi. Et maintenant le Seigneur a mis un esprit menteur dans la bouche de tous tes prophètes ; et le Seigneur a appelé sur toi le mal. Cela montre clairement qu’un esprit a choisi avec toute sa volonté et son propos de tromper et d’opérer le mensonge, et que Dieu s’est servi de cet esprit pour la mort d’Achab qui méritait de souffrir tout cela. Dans le premier Livre des Paralipomènes : Le diable suscita un Satan en Israël et il poussa David à recenser le peuple. D’après les Psaumes, un ange malin écrase certaines personnes. Dans l’Ecclésiaste, Salomon dit : Si l’esprit de celui qui a le pouvoir monte sur toi, ne quitte pas ta place, parce que la guérison arrêtera des péchés nombreux. Nous lisons dans Zacharie que le diable se tenait à la droite de Jésus et lui résistait. Isaïe dit que le glaive de Dieu se lève sur le dragon, le serpent pervers. Que dirai-je d’Ézéchiel prophétisant très clairement dans sa seconde vision au prince de Tyr au sujet d’une puissance contraire, lui qui dit aussi que le dragon habite dans les fleuves d’Egypte ? Tout le livre qui parle de Job parle-t-il d’autre chose que du diable, demandant que lui soit donné pouvoir sur tout ce que possède Job, y compris ses fils, et même sur son corps. Et cependant, il est vaincu par la patience de Job. Dans ce livre, le Seigneur par ses réponses nous a instruits abondamment sur la puissance de ce dragon qui nous est hostile. Voici les textes de l’Ancien Testament qui ont pu pour le moment se présenter à notre mémoire : ils affirment que des puissances contraires sont mentionnées dans les Écritures, s’opposent au genre humain et seront finalement punies. Livre III: Septième traité (III, 2-4): Première section

Si quelqu’un disait que, par l’intermédiaire de ceux qui participent à la Parole de Dieu, ou à sa Sagesse, sa Vérité et sa Vie, la Parole et la Sagesse mêmes paraissent être dans un lieu, il faut répondre que sans aucun doute le Christ, en tant que Parole, Sagesse et les autres dénominations, se trouvait dans Paul, et c’est pourquoi ce dernier disait : Ou bien cherchez-vous une preuve de celui qui parle en moi, le Christ ? et de même : Ce n’est plus moi qui vis, c’est le Christ qui vit en moi. Mais alors, lorsqu’il était en Paul, peut-on douter qu’il se trouvait pareillement en Pierre, en Jean et dans chacun des saints, et pas seulement dans ceux qui sont sur terre, mais aussi dans ceux qui sont dans les cieux ? Il est absurde en effet de dire que le Christ était en Pierre et en Paul, mais non dans l’archange Michel ou dans Gabriel. On saisit là clairement que la divinité du Fils n’était pas enfermée dans un lieu, autrement il aurait été seulement en celui-ci et non en un autre ; mais, puisqu’il n’est pas enfermé dans un lieu selon la majesté de la nature incorporelle, il faut comprendre qu’il ne manque aussi à aucun. La seule différence qu’il faille remarquer est que, bien qu’il soit en des êtres divers, en Pierre ou Paul ou Michel ou Gabriel comme nous l’avons dit, il n’est pas de la même façon en tous. Il se trouve plus pleinement, plus glorieusement, et pour ainsi dire plus ouvertement dans les archanges que dans les autres hommes saints. Cela est clair, puisque, lorsque tous les saints seront arrivés au sommet de la perfection, on dit qu’ils seront faits semblables aux anges et égaux à eux, selon la parole évangélique. C’est pourquoi il est clair que le Christ est formé en chacun selon que le permet la mesure de ses mérites. Livre IV: Neuvième traité (IV, 1-3): Deuxième section