voie

Si Dieu mit sur la VOIE de la connaissance de l’avenir le tyran d’Égypte ou, celui d’Assyrie, c’est qu’il se proposait par là un but spécial : il voulait manifester au jour la sagesse des saints restée cachée, afin de la faire servir au bien des hommes. Comment Daniel eût-il été connu pour ce qu’il était, si les enchanteurs et les mages n’étaient restés impuissants à découvrir les songes ? Comment le peuple d’Égypte eût-il été sauvé, si Joseph était demeuré en prison et si son explication du songe ne l’avait mis en évidence ? Aussi ces événements sont différents des premiers et il ne faut pas les juger d’après les imaginations communes. En général tous peuvent avoir des songes et ceux-ci naissent dans l’imagination de façons très diverses. Ou bien en effet, comme j’ai dit, demeurent dans la mémoire les retentissements des actions du jour ; ou souvent aussi, les songes se forment selon les dispositions du corps. Ainsi celui qui a soif se croit à une source ; celui qui a faim dans des banquets ; le jeune homme, gonflé par la jeunesse, se construit des chimères conformes à sa passion. XIII

Mais la suite des pensées nous a emportés à côté du sujet. Notre but n’était pas de montrer que l’activité de l’esprit est plus élevée en dignité, parmi les attributs de l’homme, que la partie matérielle de son être, mais que l’esprit ne s’attache pas à l’une des parties de notre être et qu’il est également en toutes et à travers toutes : ni il ne les contient de l’extérieur ni non plus il ne les domine de l’intérieur : de telles façons de parler s’appliquent proprement à des cubes ou à des objets semblables qui s’emboîtent les uns dans les autres. L’union de l’esprit et de l’ensemble corporel représente au contraire une liaison indicible et impensable : elle ne se fait pas dans le corps (comment l’incorporel serait-il au pouvoir du corps ?) ; elle ne se réalise pas non plus à l’extérieur (comment l’incorporel contiendrait-il en lui quoi que ce soit ?). Mais l’esprit, selon un mode hors de toute imagination et de toute pensée, s’approchant de notre nature de telle sorte qu’il se joint à elle, est à la fois en elle et autour d’elle, sans pourtant y avoir son siège ni l’enfermer en lui. On ne peut dire que ceci : la fidélité de la nature à marcher dans sa VOIE permet l’exercice de la pensée. Mais le moindre écart en elle en rend boiteux le mouvement. XV

La cause de cette absurdité est la croyance en la préexistence des âmes. Le principe à la base de cette opinion l’entraîne logiquement de proche en proche jusqu’à des conclusions invraisemblables. Si l’âme, tirée, à cause du vice, de cet état plus élevé où elle est, après avoir goûté une fois, comme ils disent, à la vie corporelle, devient homme à son tour et si on doit reconnaître que cette vie charnelle est toute soumise aux passions en comparaison de la vie éternelle et incorporelle, il s’ensuit nécessairement que l’âme, dans cette vie où elle trouve en grand nombre les occasions de pécher, en vient à une malice plus grande et connaît de plus en plus l’esclavage des passions. Or, pour l’âme humaine, cet esclavage consiste à ressembler aux animaux. Comme donc elle s’est rapprochée d’eux par sa nature, elle tombe dans la nature bestiale et, une fois sur le chemin du vice, elle ne peut s’arrêter dans la VOIE qui l’emmène au mal, pas même dans l’irrationnel. L’arrêt dans ce mal est déjà une reprise du chemin vers la vertu. Or il n’est pas question de vertu parmi les animaux. Donc nécessairement l’âme ne cessera de passer dans un état pire, allant toujours à ce qui est plus méprisable et toujours en quête de ce qui est inférieur à la nature où elle est. Et de même que du rationnel, on passera au sensible, de même à partir de ce dernier la chute continue vers l’insensible. XXVIII

Si vous cherchez une preuve plus claire de la vie qui est dans l’embryon du vivant en VOIE de formation, vous pouvez examiner d’autres signes de différenciation entre l’animé et le mort. Pour constater que les hommes sont en vie, nous avons la chaleur, l’activité et le mouvement, tandis que le refroidissement et l’immobilité d’un corps ne sont rien autre que sa mort. Or l’embryon dont il s’agit est source de chaleur et d’énergie : c’est la preuve qu’il n’est pas inanimé. XXIX