participation

La divine beauté, dont le Créateur nous a fait don en mettant en son image la ressemblance des biens qu’il possède, apporte avec elle les autres biens dont Dieu a libéralement doté notre nature humaine. L’esprit et la réflexion, on ne peut les appeler proprement des dons, mais plutôt une PARTICIPATION, car par eux, c’est la splendeur même de sa nature que Dieu a déposée en son image. Or l’esprit, qui est du domaine de l’intelligible et de l’incorporel, ne pouvait communiquer et unir sa beauté à d’autres êtres, s’il n’inventait quelque moyen de manifester au dehors son mouvement. C’est ce qui rendit nécessaire la création d’un organisme, afin que l’esprit, touchant à la façon d’un plectre les parties aptes à la voix, traduise par l’impression de sons variés le mouvement venu de l’intérieur. Un habile musicien, qu’un accident a privé de sa voix, pour faire connaître ce qu’il a dans l’esprit, se sert du chant de voix étrangères et livre son art au public grâce à la flûte ou à la lyre. Ainsi l’esprit humain : il découvre des pensers de toutes sortes, mais il ne peut montrer son mouvement intérieur à l’âme qui entend par les sens du corps ; aussi comme un habile accordeur, il touche ces organes animés, pour manifester ses pensées secrètes par le bruit qu’il fait dans les sens. IX

Ceci posé, quand pour ce motif il s’élance à la création de notre nature, il ne manifeste pas à demi sa bonté toute puissante, donnant d’un côté de ses biens, pour se montrer jaloux par ailleurs de la PARTICIPATION qu’il en fait. Mais la perfection de sa bonté consiste à faire passer l’homme du non-être à l’être et à ne le priver d’aucun bien. XVI

Quand donc on parle de la plantation de Dieu dans l’Eden (Eden signifie «jouissance»), il faut penser à un fruit en rapport avec elle et ne pas hésiter à en faire la nourriture de l’homme, sans songer pour cette vie du paradis à notre nourriture passagère et fuyante : « Vous mangerez, dit Dieu, de tout arbre qui est dans le Paradis. » Qui donnera à celui qui a la véritable faim cet arbre-là, celui qui est dans le paradis, cet arbre qui renferme tout bien, qui est désigné par ce mot « tout », et dont l’Écriture accorde à l’homme la PARTICIPATION ? En ce mot qui désigne un ensemble et s’élève au-dessus de tout, est contenu naturellement l’idée de tout bien et par un seul arbre est signifié le tout. Qui m’écartera au contraire de goûter à cet arbre mélangé et participant de deux genres ? Ceux qui y regardent de près voient clairement quel est ce « tout », dont le fruit est la vie et aussi quel est cet arbre au fruit mélangé, dont le terme est la mort ? Celui, en effet, qui remet sans réserve à l’homme la jouissance du tout, le détourne absolument par ses paroles et ses conseils de toucher à ces biens « mélangés » . Pour interpréter cette parole, les meilleurs maîtres me semblent être le grand David et le sage Salomon. Tous les deux pensent que le bienfait unique de la jouissance qui nous est accordée, c’est le vrai Bien lui-même, qui est précisément « tout bien ». David dit : « Jouissez du Seigneur » et Salomon nomme « arbre de vie cette Sagesse même » qui est le Seigneur. XIX

Certains de nos devanciers, auteurs du traité « des Principes », ont enseigné que les âmes préexistent et forment pour ainsi dire un peuple dans une cité à part. Là sont placés les modèles du vice et de la vertu. Tant que l’âme demeure dans le bien, elle reste sans l’expérience de liaison corporelle, mais si elle déchoit de la PARTICIPATION qu’elle a avec le bien, elle glisse vers la vie d’ici-bas et ainsi se trouve dans un corps . XXVIII