Puis il s’élève encore dans ses miracles et, par une puissance plus grande, il met les hommes sur la route de la foi en la Résurrection. L’Écriture parle de Naïm, ville de Judée. En cette ville, était le fils unique d’une veuve ; il n’était plus un enfant, encore au rang des adolescents : il atteignait l’âge d’homme. L’Écriture l’appelle un « jeune homme ». Le récit dit beaucoup en quelques lignes : c’est un vrai chant de deuil. La mère du mort, dit-il, était veuve. Vous voyez la profondeur du malheur et combien en peu de mots l’Écriture rend tout le tragique du mal. Que dit-elle en effet ? que la mère n’avait même plus l’espoir d’avoir d’autres enfants pour se guérir de la perte de celui-là : « Cette femme était veuve. » Elle ne pouvait porter ses yeux sur un autre enfant qui remplacerait le disparu : « Ce fils était unique. » La grandeur de ce malheur, tous ceux qui ne sont pas étrangers à la nature la comprendront sans peine : elle n’avait connu que lui dans ses entrailles, elle n’avait allaité que lui à son sein ; lui seul était la gaieté de sa table ; lui seul illuminait de joie la maison, quand elle le voyait jouer, travailler, faire de la gymnastique, vivre joyeux, s’en aller en public, dans les palestres ou dans les assemblées de jeunes ; lui seul était tout ce qu’il y a de doux et de précieux aux yeux d’une mère. Il était en âge de se marier et était l’unique rejeton de sa famille, le rameau de sa succession et le bâton de sa vieillesse. La mention de l’âge, en particulier, est encore un chant de deuil : l’Écriture, le désignant comme un « jeune homme », exprime la fleur de l’âge qui s’est consumée, le duvet encore tendre, la barbe qui pousse à peine et les joues encore brillantes de beauté. Que devait donc éprouver la mère ? Ses entrailles brûlaient comme un feu. Quelle amertume devait avoir son chant de deuil, tandis qu’elle entourait le CADAVRE dans ses bras ! Comme elle devait retarder pour le mort les soins funèbres et se remplir du malheur par des gémissements incessants. Alors l’Évangile n’omet pas non plus ce trait : « La voyant, Jésus fut remué profondément. S’avançant, il toucha le cercueil et les porteurs s’arrêtèrent. Puis il dit au mort : « Jeune homme, je te le dis, lève-toi. Et il le rendit vivant à sa mère. » Bien qu’il ne fût pas encore déposé dans le tombeau, le jeune homme était mort depuis assez longtemps. L’ordre du Seigneur est le même que précédemment, mais le miracle est plus grand. XXV
Quatre jours s’étaient écoulés depuis l’événement ; les rites habituels avaient été accomplis pour le mort et le corps était déposé dans le tombeau. Sans doute le CADAVRE se gonflait déjà ; il commençait à se corrompre et à se dissoudre dans les profondeurs de la terre, selon les lois normales. C’était un objet à fuir, lorsque la nature se vit contrainte de rendre de nouveau à la vie ce qui déjà se dissolvait et était d’une odeur repoussante. Alors l’oeuvre de la résurrection universelle est amenée à l’évidence par une merveille que tous peuvent constater. Il ne s’agit pas ici d’un homme qui se relève d’une maladie grave ou qui, près du dernier soupir, est ramené à la vie ; il ne s’agit pas de faire revivre un enfant qui vient de mourir ou de délivrer du cercueil un jeune homme que l’on portait en terre. Il s’agit d’un homme âgé qui est mort et dont le CADAVRE, déjà flétri et gonflé, tombe en dissolution au point que ses proches ne supportent pas de faire approcher le Seigneur du tombeau, à cause de la mauvaise odeur du corps qui y est déposé. Or cet homme, par une seule parole, est rendu à la vie et ainsi est fondée l’assurance de la Résurrection : ce que nous attendons pour le tout, nous l’avons concrètement réalisé sur une partie. De même, en effet, que dans la rénovation de l’univers, comme dit l’Apôtre, le Christ lui-même descendra en un clin d’oeil, à la voix de l’Archange, et par la trompette fera lever les morts pour l’immortalité , de la même façon maintenant celui qui, au commandement donné, secoue dans le tombeau la mort comme on secoue un songe et qui laisse tomber la corruption des CADAVREs qui l’atteignait déjà, bondit du tombeau dans son intégrité et en pleine santé, sans que les bandelettes qui entourent ses pieds et ses mains l’empêchent de sortir. XXV
Comme après la mort la chaleur naturelle s’éteint et que le CADAVRE se refroidit, il nous faut ranger également la chaleur parmi les causes de la vie. Ce dont l’absence amène la mort est de toute nécessité ce dont la présence permet au vivant de subsister. De cette force, nous voyons que le coeur est comme la source et le principe, à partir duquel des conduits semblables à des flûtes se séparent les uns des autres pour répandre dans tout le corps le feu et la chaleur . XXX