Nous n’avons pas à classer parmi les opinions indémontrables notre opinion sur la matière, qui fait dépendre l’existence de celle-ci de l’Être purement spirituel et sans matière. Nous découvrirons en effet que la matière n’est faite tout entière que d’un ensemble de qualités dont nous ne pouvons la dépouiller une à une sans la rendre absolument incompréhensible à la raison. Par ailleurs chaque espèce de qualité peut être mentalement isolée du sujet où elle se trouve. Or la raison est un mode de connaissance spirituel, qui n’a rien de corporel. Ainsi prenez un vivant, du bois, ou quelque autre objet ayant une organisation matérielle ; souvent nous considérons par abstraction, à part du sujet où elles sont, des qualités dont l’idée que nous nous en faisons se distingue nettement d’une autre considérée en même temps. Ainsi l’idée que nous avons de la couleur diffère de celle de poids, de quantité et de toucher. La malléabilité d’un corps, sa double épaisseur, ses autres qualités ne se confondent, dans notre idée, ni entre elles ni avec le corps en question. Pour chacune d’elles, nous trouvons une définition propre qui la signifie et qui ne la confond pas avec quelqu’une des autres qualités considérées en ce corps. Si donc la couleur est un « objet de pensée » et de même la résistance, la quantité et toutes les autres propriétés des corps, et si en même temps, lorsque l’on enlève au corps considéré chacune de ces qualités, on fait disparaître par le fait toute l’idée que nous en avons, il serait logique de supposer que la rencontre de ces qualités dont l’absence se trouve être cause de la disparition du corps, donne naissance aux êtres matériels. Comme il n’y a pas de corps, sans qu’il n’y ait en même temps couleur, forme extérieure, résistance, étendue, pesanteur et toutes les autres particularités, – attributs qui, pris à part, ne sont pas un corps, mais se sont révélés quelque chose d’autre, – ainsi à l’inverse, leur rencontre donne l’existence aux corps. Mais si la compréhension de chacune de ces propriétés est un « ACTE D’INTELLIGENCE » et si la Divinité est aussi par nature une « substance intelligible », il n’y a rien d’invraisemblable à ce que ces qualités soient des principes purement spirituels venant d’une nature incorporelle pour la production des corps : la nature spirituelle donne l’existence à des forces spirituelles et la rencontre de celles-ci donne naissance à la matière . XXIV
acte d’intelligence
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