Le soin des âmes est un art à apprendre.

{{Des exercices monastiques. — C. 22.}} Tout art exige du temps et beaucoup d’étude pour qu’on y réussisse, et seul l’art des arts se pratique sans apprentissage. Un homme inexpérimenté n’osera pas se mêler d’agriculture, pas plus qu’un ignorant n’exercera la médecine ; car celui-ci ferait blâmé pour n’avoir nullement soulagé les malades ou même avoir augmenté leur maladie, et celui-là pour avoir transformé une excellente terre en une mauvaise et malpropre. Il n’y a que les choses regardant le culte de Dieu, sous prétexte qu’elles sont les plus faciles de toutes, qu’on traitera sans les avoir apprises, et l’affaire la plus difficile à bien mener paraîtra à beaucoup être aisée ; ce que Paul dit n’avoir jamais compris, ceux-là affirmeront qu’ils le connaissent parfaitement, alors qu’ils ne savent même pas qu’ils l’ignorent; c’est pour cela que la vie monastique est devenue objet de mépris, et que ceux qui l’embrassent sont la risée de tous. Qui en effet ne rira pas de celui qui hier était porteur d’eau dans un cabaret, s’il le voit aujourd’hui entouré de disciples comme un maître de vertu, ou bien de celui qui le matin a quitté les perversités de la ville, et Je soir parcourt tout le forum environné d’une multitude de disciples? S’ils étaient absolument persuadés qu’il faut beaucoup de peine pour mener les autres dans le chemin de la piété, et s’ils connaissaient le danger que cela comporte, ils refuseraient complètement cette charge comme surpassant leurs forces; mais comme ils l’ignorent et estiment glorieux d’être au-dessus des autres, ils sont facilement entraînés dans un tel gouffre, et ils jugent facile de s’élancer dans cette fournaise ardente, excitant les rires de ceux qui ont connu leur vie d’hier et aussi l’indignation de Dieu pour une telle témérité.