{{L’Echelle du paradis. — 23.}} Le vrai moine est celui qui garde l’œil de son âme de toute vaine exaltation et les sens de son corps de tout mouvement désordonné. Le moine est celui qui provoque au combat ses ennemis, comme des fauves, et qui les excite quand ils s’enfuient devant lui. Le moine est celui dont l’esprit est perpétuellement transporté, et pour qui la vie est un chagrin. Le moine est celui qui s’est fait aux vertus, comme d’autres aux plaisirs. Le moine est celui dont les yeux de l’âme sont toujours éclairés de la lumière d’en haut. Le moine est un abîme d’humilité, où tout esprit mauvais est précipité et suffoqué. La fumée de l’orgueil fait oublier les péchés, et le souvenir de ceux-ci produit l’humilité. L’orgueil est la dernière misère de l’âme : dans les ténèbres, se croyant riche, cette peste non seulement empêche de progresser, mais encore vous précipite d’en haut. L’orgueil est comme une grenade, pourrie à l’intérieur, mais brillante à l’extérieur en la saison. Le moine orgueilleux n’a pas besoin d’un autre démon : il est son propre démon et l’ennemi de lui-même. Comme les ténèbres sont opposées à la lumière, ainsi l’orgueilleux est étranger à toutes sortes de vertus. L’orgueil produit dans le cœur des paroles de blasphème, et l’humilité produit dans l’âme des visions toutes célestes. Le voleur abhorre la lumière du soleil, et l’orgueilleux méprise les doux.