Ajoutez à cela que sa création à l’image de la nature qui gouverne tout montre précisément qu’elle a dès le début une nature royale. D’après l’usage commun, les auteurs des portraits de princes, en plus de la représentation des traits, expriment la dignité royale par des vêtements de pourpre et devant cette image, on a l’habitude de dire : « le roi ». Ainsi la nature humaine, créée pour dominer le monde, à cause de sa ressemblance avec le Roi Universel, a été faite comme une image vivante qui participe de l’archétype par la dignité et par le nom : la pourpre ne l’entoure pas, un sceptre ou un diadème ne signifient pas sa dignité (l’archétype, lui, n’en a pas) ; mais, au lieu de pourpre, elle est revêtue de la vertu, le plus royal de tous les vêtements ; au lieu d’un sceptre, elle s’appuie sur la bienheureuse immortalité ; au lieu d’un diadème royal, elle porte la couronne de justice, en sorte que tout, en elle, manifeste sa dignité royale, par son exacte ressemblance avec la beauté de l’archétype. IV
Pour cette même raison, si les exhalaisons venues de l’intérieur, rétrécissent les endroits où se trouvent les sens et si par ailleurs quelque nécessité interdit le sommeil, le système nerveux, rempli de ces vapeurs, se tend naturellement lui-même et cet allongement amincit la région chargée des vapeurs. Il se produit quelque chose d’identique à ce qui a lieu quand on tord avec force des vêtements pour en faire sortir l’eau. La région du pharynx est arrondie et le système nerveux y est très développé. Lorsqu’il faut en chasser les vapeurs qui s’y sont accumulées (comme on ne peut étirer un objet rond qu’en l’étendant suivant une forme circulaire), cette forme arrondie fait que le souffle est reçu dans le bâillement : la luette fait s’abaisser la mâchoire inférieure et, tandis que l’intérieur de la cavité ainsi formée se détend en forme de cercle, cette sorte de suie lourde répandue en ces organes est exhalée avec le souffle. Souvent, après le sommeil, la même chose se produit, lorsqu’une de ces vapeurs a été laissée en ces lieux sans être chassée par le souffle. XIII
Notre être, en effet, n’est pas tout entier dans l’écoulement et la transformation. S’il n’avait aucune fixité naturelle, il serait absolument incompréhensible. En réalité, il est plus exact de dire qu’une partie de notre être demeure, tandis que l’autre est soumise à l’altération. Notre corps devient autre, quand il grandit ou diminue, et il revêt, comme des vêtements, des âges successifs. Mais à travers ce mouvement demeure inchangée la « forme » (eidos) propre de notre être : celle-ci ne perd pas les caractères une fois reçus de la nature, mais demeure visible avec ses caractéristiques particulières, malgré toutes les modifications corporelles. Sans doute il faut mettre à part le changement produit par la maladie, qui affecte l’ « aspect extérieur » (eidos) ; alors le masque de la maladie déforme cet « aspect » et prend sa place. Mais par la pensée on peut enlever ce masque et imaginer ce qui arriva pour Naaman le Syrien et pour les lépreux dont l’Évangile raconte l’histoire. Alors à nouveau, l’ « aspect » que nous voilait la maladie, la santé nous le rend avec ses caractères propres. XXVII