effusion (Eckhart)

Dieu donne à toutes choses également, et telles qu’elles fluent de Dieu, ainsi sont-elles égales ; oui, anges et hommes et toutes créatures fluent de Dieu égales dans leur première effusion. Qui maintenant prendrait ces choses dans leur première effusion, celui-là prendrait toutes choses égales. Sont-elles donc égales dans le temps, en Dieu et dans l’éternité elles sont bien plus égales. Qui prend une mouche en Dieu, celle-ci est plus noble en Dieu que ne l’est l’ange le plus élevé en lui-même. Or toutes choses sont égales en Dieu et sont Dieu même. Ici Dieu a tant de plaisir dans cette égalité que toute sa nature et son être il les épanche pleinement dans cette égalité en lui-même. Cela lui est plaisir ; de même manière que celui qui fait courir un cheval dans une verte lande qui serait totalement plane et égale, il serait de la nature du cheval de s’épancher pleinement de toute sa force en bondissant dans la lande, ce lui serait plaisir et serai sa nature Pareillement est-ce plaisir et satisfaction pour Dieu lorsqu’il trouve égalité. Ce lui est plaisir que sa nature et son être se répandent pleinement dans l’égalité, car il est lui-même l’égalité. Eckhart: Sermon 12

Or notez avec zèle ce qu’Aristote dit des esprits détachés dans son livre qui s’appelle Métaphysique. Le plus grand parmi les maîtres qui jamais parlèrent des sciences naturelles évoque ces esprits détachés et dit que d’aucune chose il ne sont forme, et qu’ils prennent leur être fluant de Dieu sans intermédiaire ; et ainsi refluent-ils à l’intérieur aussi et reçoivent-ils l’effusion de Dieu sans intermédiaire au-dessus des anges et contemplent-ils l’être nu de Dieu sans distinction. Cet être nu limpide, Aristote le nomme un « quelque chose ». C’est le plus élevé qu’Aristote dit jamais des sciences naturelles, et sur cela aucun maître ne peut parler de façon plus élevée qu’il ne l’ait dit dans l’Esprit Saint. Or je dis qu’à cet homme noble ne suffit pas l’être que les anges saisissent sans forme et dont ils dépendent sans intermédiaire ; il ne trouve satisfaction en rien qu’en l’unique Un. Eckhart: Sermon 15