De la virginité — 38. L’Apôtre montre grande indulgence aux personnes mariées, lui qui, sauf le cas d’un mutuel consentement, ne veut pas priver les époux l’un de l’autre, ni prolonger trop ce sacrifice volontaire ; lui qui leur permet même les secondes noces pour éteindre le feu des passions. Mais pour les vierges il ne montre aucune condescendance semblable. Il accorde quelque relâche aux époux, mais il ne laisse pas la vierge respirer un instant, il la veut combattant sans répit, toujours debout, en butte aux passions et ne concluant pas la moindre trêve avec elles. Pourquoi n’a-t-il pas dit : «Si elle ne peut vivre dans, la continence, qu’elle se marie» ( 1 Cor 7, 9 ) ? Lorsqu’un athlète se présente dans le stade le corps nu, frotté d’huile et couvert de poussière, personne n’oserait lui dire: «Allez, fuyez le combat». Désormais c’est de deux choses l’une : il faut se retirer couronné ou bien vaincu et humilié. Sur le terrain de jeux, sur la palestre, là où l’on s’exerce entre familiers et où l’on en vient aux mains avec amis ou ennemis, il vous est loisible de vous donner de la peine ou non. Mais quand vous avez donné votre nom, quand le peuple est réuni, que le président des jeux est là, que les spectateurs sont assis et que votre adversaire est introduit et face à vous, la loi du combat vous oblige. De même en va-t-il pour la vierge. Tant qu’elle délibère, si elle doit ou non se marier, le mariage est sans péril ; mais lorsqu’elle a fait choix et donné son nom, elle s’est engagée dans le stade. Qui oserait donc alors, le combat étant annoncé, le Christ le présidant et les anges y assistant d’en haut, le démon frémissant de fureur, prêt à la lutte, qui oserait se présenter et dire : « Fuyez l’ennemi, laissez ces fatigues, cessez le combat, n’abattez pas votre adversaire, mais cédez-lui la victoire » ? Et que parlé-je des vierges, alors que même aux veuves il n’est pas permis de dire ces choses, mais qu’il faut plutôt leur adresser ce mot terrible : « Lorsque l’attrait des voluptés les a dégoûtées du Christ, elles veulent se remarier, et se rendent coupables en manquant à leur premier engagement» ( 1 Tim 5,11 ).