confiance (Eckhart)

Epoux sont ceux qui donnent à peine plus d’un fruit l’an. Mais autres les époux que je vise en l’occurrence : tous ceux qui avec attachement propre sont liés aux prières, aux jeûnes, aux veilles et à toutes sortes d’exercices intérieurs et mortifications. Un attachement propre quel qu’il soit à quelque oeuvre que ce soit, qui enlève la liberté d’attendre Dieu dans ce maintenant présent et de le suivre lui seul dans la lumière avec laquelle il t’inciterait à faire et à lâcher prise, libre et neuf à tout moment, comme si tu n’avais ni ne voulais ni ne pouvais rien d’autre : un attachement propre ou un projet d’oeuvre, quels qu’ils soient, qui t’enlèvent cette liberté neuve en tout temps, voilà ce que j’appelle maintenant une année ; car ( alors ) ton âme ne donne aucun fruit à moins que d’avoir accompli l’oeuvre que tu as entreprise avec attachement propre, et tu n’as confiance ni en Dieu ni en toi-même à moins que d’avoir accompli ton oeuvre que tu as conçue avec attachement propre ; faute de quoi tu ne jouis d’aucune paix. C’est pourquoi aussi tu ne donnes aucun fruit à moins que d’avoir fait ton oeuvre. C’est cela que je pose comme une année, et le fruit est cependant minime car il a procédé d’attachement propre à l’oeuvre et non de liberté. Ceux-là, je les appelle époux, car ils sont liés à l’attachement propre. Ceux-là donnent peu de fruit, et ce fruit même est cependant minime, ainsi que je l’ai dit. Eckhart: Sermon 2

Il est encore une autre chose pourquoi il dit qu’elle hait. Le mot qui nomme l’âme vise l’âme telle qu’elle est dans la prison du corps, et par là il vise que, quoi que l’âme qui est en elle-même puisse penser, là encore elle est dans sa prison. Que si elle a encore confiance dans les choses inférieures et que quelque chose la tire dans soi par les sens, là elle se trouve sur le champ à l’étroit ; car les mots ne peuvent donner de nom à aucune nature qui est au-dessus d’eux. Eckhart: Sermon 17

Or notez les premier petit mot qu’il dit : « Le temps viendra et est déjà là. » Qui veut adorer le Père, il lui faut se transporter dans l’éternité avec son désir et sa confiance. Il est une partie de l’âme, la plus élevée, qui se tient au-dessus du temps et ne sait rien du temps et du corps. Tout ce qui advint il y a mille ans, le jour qui a été il y a mille ans, n’est pas dans l’éternité plus éloigné que cette heure où je me tiens maintenant, ou le jour qui doit venir dans mille ans ou si loin que tu puisses compter, il n’est pas dans l’éternité plus éloigné que cette heure où je me tiens maintenant. Eckhart: Sermon 26