{{13.}} Celui qui veut s’approcher du Seigneur, mériter la vie éternelle, devenir le temple de Dieu, être digne du Saint Esprit, pour pouvoir d’une manière pure et irréprochable produire des fruits spirituels selon les commandements du Seigneur, celui-là doit ainsi commencer. D’abord croire fermement au Seigneur, se donner entièrement à la lettre de ses commandements, renoncer en tout au monde, en sorte que l’esprit ne soit plus en aucune manière occupé des choses extérieures ; persévérer toujours dans la prière, ne jamais désespérer en attendant toujours la visite du Seigneur et son aide, et en faisant que l’esprit l’ait constamment en vue. Il faut ensuite se forcer à faire tout ce qui est bien, à accomplir tous les préceptes du Seigneur, quand même le cœur résisterait à cause du mal qui est en lui : par exemple s’obliger à être humble en face de tous les hommes et se considérer comme moindre et pire que tous, ne cherchant auprès de personne honneur, louange ou gloire, ainsi qu’il est écrit dans l’évangile, mais ayant toujours devant les yeux le Seigneur seul et ses commandements, et ne voulant plaire qu’à lui seul. Que pareillement il s’oblige à la douceur, quand même le coeur ne le voudrait pas… Que de même il s’habitue par force à être miséricordieux, obligeant, compatissant, bon, autant que possible… Que toujours il ait devant les yeux l’humilité du Seigneur, ses habitudes et sa manière de vivre, comme est un modèle dans une mémoire fidèle. Qu’il s’oblige de toutes ses forces à persévérer dans la prière, demandant toujours avec confiance, afin que le Seigneur vienne habiter en lui, le forme et le fortifie en tous ses préceptes, et afin que son âme soit la demeure de Jésus-Christ. Et ainsi ce que maintenant il fait par force et à contre-cœur l’habituera à faire le bien en tout temps, à penser toujours au Seigneur et à l’attendre perpétuellement avec beaucoup de vertu et d’amour. Alors le Seigneur voyant de telles dispositions en lui et cette bonne volonté par laquelle il se fait violence constamment pour penser à lui, pour faire le bien, pour être humble, doux et charitable ; voyant que malgré toutes ses répugnances il soumet son cœur en y employant toute sa force ; le Seigneur lui fait miséricorde, il le délivre de ses ennemis et du péché qui est en lui, il le remplit de l’Esprit Saint ; et ainsi désormais sans violence et sans peine il accomplit en vérité tous les préceptes du Seigneur ; où plutôt le Seigneur accomplit en lui ses propres préceptes, donnant les fruits de l’Esprit quand il fructifie purement. Mais il faut d’abord que celui qui s’approche du Seigneur… se fasse violence pour prier, quand il n’a pas encore reçu de l’Esprit le don de prière. Dieu le voyant ainsi lutter et se faire violence pour le bien, même à contre-cœur, lui donne la véritable prière du Christ, il lui donne des entrailles de miséricorde, une vraie bénignité : en un mot, il lui réserve le fruit de l’Esprit.