2. Or, mon Père, malgré mes faibles lumières, je pense que les amis de Dieu sont ces intelligences sublimes et spirituelles qui environnent son trône éternel; que ses véritables et fidèles amis sont ceux qui, avec une grande ardeur et une exactitude parfaite, accomplissent sa très sainte Volonté en toute chose; que ses serviteurs inutiles sont ces personnes qui, ayant été purifiées et sanctifiées par la grâce du baptême, n’ont pas gardé les promesses qu’elles avaient faites, et ont indignement violé l’alliance auguste qu’elles avaient contractée avec Dieu; que ceux qui se sont séparés de Lui, ou qui marchent loin de Lui, sont ou les hérétiques, qui ont corrompu la foi, ou les infidèles qui ne l’ont jamais eue; qu’enfin ses ennemis sont ces gens qui, non seulement se sent soustraits à sa loi, en la transgressant avec insolence, mais suscitent et exercent des cruelles persécutions contre ceux qui servent Dieu avec amour et observent sa sainte loi avec une inviolable, fidélité. PREMIER DEGRÉ
19. En cela, comme en toute chose, c’est le Seigneur que nous écoutons, et dont nous suivons les traces; car nous savons qu’il a Lui-même plusieurs fois abandonné ses parents selon la chair. En effet quelqu’un l’ayant un jour averti que sa mère et ses frères Le cherchaient, ce divin Maître, pour nous faire voir qu’il est des occasions où nous devons fuir saintement nos parents, lui fit cette admirable réponse : “Ma mère et mes frères sont ceux qui accomplissent la Volonté de mon Père qui est dans les cieux (Mt 12,49). TROISIÈME DEGRÉ
6. Les démons, dans tous nos exercices de piété, nous tendent des pièges pour nous faire tomber dans trois fosses qu’ils ont eux-mêmes creusées. Ils s’efforcent d’abord de nous détourner de bien faire; ensuite, s’ils se voient vaincus dans ce premier combat, ils cherchent à corrompre notre coeur par des intentions mauvaises qu’ils nous inspirent, et à nous empêcher de ne nous proposer pour fin que la Gloire de Dieu; enfin, si dans cette seconde attaque, leurs efforts ne leur ont servi de rien, ils se cachent dans l’intérieur de notre âme, qui est tranquille, afin de lui inspirer que nous sommes vraiment heureux de ne rien faire que selon la Volonté de Dieu et pour sa plus grande gloire. Or nous résisterons à la première tentation par une grande diligence, une scrupuleuse exactitude à nos devoirs, et par la pensée et le souvenir de la mort; à la seconde, par l’obéissance et le mépris de nous-mêmes; et à la troisième, par la connaissance de notre imperfection et de l’inutilité de nos oeuvres. C’est là le grand travail que nous avons continuellement à faire jusqu’à ce que le feu de l’amour de Dieu nous fasse entrer dans son sanctuaire. Car alors nous ne serons plus inquiétés, ni portés aux péchés, à cause de nos vieilles habitudes. Dieu, qui est un feu purifiant (Heb 12,29), consumera toutes les ardeurs funestes de la concupiscence, arrêtera tous ses mouvements déréglés, nous préservera de la présomption, et nous empêchera de tomber, soit dans l’aveuglement intérieur, soit dans l’aveuglement extérieur. VINGT-SIXIÈME DEGRÉ
74. Que dans toutes vos actions et dans tous vos exercices, votre règle soit de bien examiner, si vos démarches et vos opérations corporelles, ainsi que celles qui, tout purement spirituelles, sont conformes à la loi de Dieu; et cette règle regarde aussi bien ceux qui sont soumis au joug de l’obéissance, que ceux qui ne reconnaissent point de supérieur. Ainsi par exemple, si dès le commencement de notre carrière religieuse nous nous livrons a quelque exercice, qu’il soit peu ou qu’il soit beaucoup important, et qu’après nous y être appliqués, nous n’en soyons pas devenus plus humbles, il est bien à craindre que cet exercice n’ait pas été fait de manière à pouvoir être agréable à Dieu et conforme à sa sainte Volonté. En effet, étant si novices dans les voies de la vie religieuse, c’est assurément l’humilité qui peut nous faire connaître si nos actions sont selon Dieu; comme dans ceux qui sont fort avancés dans la perfection, ce sont le repos de l’âme et l’affranchissement des passions, qui leur donnent cette connaissance; et dans ceux qui sont enfin parvenus à cette perfection, c’est une surabondance de lumière céleste. VINGT-SIXIÈME DEGRÉ
95. Ainsi comme ce sont nos yeux qui éclairent tous les membres de notre corps, nous pouvons de même assurer que c’est la discrétion qui est la lumière de toutes les vertus que nous devons pratiquer. C’est pourquoi un cerf pressé par la soif ne cherche pas avec plus d’ardeur les eaux rafraîchissantes d’une fontaine, que les âmes vraiment religieuses ne cherchent à connaître et à comprendre quelle est la Volonté du Seigneur sur elles, et surtout à discerner, non seulement les choses qui lui seraient directement contraires ou directement conformes, mais encore celles qui lui seraient contraires sous un rapport et conformes sous un autre. Or nous aurions beaucoup à dire surtout cela; mais la matière n’est pas facile. En effet il nous faudrait examiner ce que nous avons à faire sans retard et avec promptitude, d’après ces paroles de l’Écriture : Ne différez pas d’un jour à un autre, ni d’un moment à un autre, (Si 5,7-8), et ce que nous ne devons faire qu’avec retenue, sagesse et réflexion, ainsi que nous en avertit Salomon : La guerre, nous dit-il, ne doit s’entreprendre qu’après qu’on a pris les précautions nécessaires et qu’on a tout disposé; (Pro 24,6) et saint Paul, en nous disant que tout doit être fait avec décence et selon l’ordre. (1 Cor 14,40). Mais il n’est pas donné à tous; non, il n’est pas donné à tous de discerner sur-le-champ et avec clarté les choses dont le discernement est très difficile; car David, qui était rempli de l’esprit de Dieu et qui, par son inspiration, nous a dit tant et de si belles choses, ne cessait dans ses ferventes prières de lui demander ce don précieux de discernement : Enseignez-moi, Seigneur, à faire votre sainte Volonté, car vous êtes mon Dieu; et ailleurs : Conduisez-moi, ô mon Dieu, dans la voie de votre Vérité, et instruisez-moi, parce que vous êtes mon Dieu et mon Sauveur; (Ps 142,10) et encore: Faites-moi connaître la voie par laquelle je dois marcher, parce que j’ai élevé mon âme vers vous. (Ps 142,8). VINGT-SIXIÈME DEGRÉ
97. Il en est un assez grand nombre qui se refusent d’user de ce moyen sûr et facile, parce qu’ils ont une secrète complaisance et une confiance présomptueuse en leurs propres lumières. Aussi les voyez-vous, pour connaître la Volonté de Dieu, employer mille moyens différents qui ne sont que de pures inventions et de vaines opinions. VINGT-SIXIÈME DEGRÉ
98. Mais il en est d’autres qui, désirant sincèrement savoir quelle est la Volonté de Dieu sur eux, renoncent à toute affection pour eux-mêmes, se tournent humblement vers le Seigneur par des prières très ferventes, Lui offrent et Lui sacrifient leurs pensées et leurs projets, Lui soumettent entièrement leur esprit et leurs lumières, et se dépouillent parfaitement de leur propre volonté, qui tantôt les portait à prendre un parti, tantôt les engageait à en prendre un autre : or ayant ainsi persévéré quelque temps dans ces heureuses dispositions, ils ont enfin connu ce que Dieu leur demandait et exigeait d’eux, soit qu’ils l’aient appris par le ministère d’un esprit envoyé de la part du Seigneur, soit qu’ils l’aient connu, parce que Dieu Lui-même a effacé dans leur esprit les raisons qui appuyaient ou qui détruisaient le parti qu’ils avaient à prendre. VINGT-SIXIÈME DEGRÉ
99. Il en est encore d’autres qui, d’après les troubles et les agitations auxquels ils ont été exposés, ont pris leur décision, et ont jugé ensuite, qu’elle était conforme à la Volonté de Dieu, fondés sur ces paroles de lApôtre : Nous avons voulu plusieurs fois vous aller visiter, mais Satan nous en a empêchés. (1 Thes 2,18). VINGT-SIXIÈME DEGRÉ
101. Celui donc qui a le bonheur de posséder Dieu dans son coeur, reçoit de Lui et sans retard, par le moyen des lumières abondantes qu’il lui communique, l’assurance que ce qu’il fait est conforme à sa sainte Volonté, soit qu’il ait pris sa détermination sur des choses qui étaient urgentes, soit qu’il l’ait prise sur des choses qui pouvaient être différées. VINGT-SIXIÈME DEGRÉ
117. La loi, à cause de ses imperfections, se contentait de dire aux hommes : Veille sur toi-même, (Dt 4,9); mais notre Seigneur, l’auteur et le consommateur de la loi, ne nous charge pas seulement de veiller sur nous, mais encore de corriger nos frères, selon ces paroles : Si ton frère tombe dans quelque faute, et la suite (Mt 18,15) Or, si votre correction est assaisonnée de sincérité et de modestie, si c’est un avis charitable que vous donnez, plutôt qu’un reproche amer que vous faites, vous accomplirez avec exactitude la Volonté du Seigneur, en remplissant ce devoir de charité, surtout à l’égard de ceux qui recevront bien vos avertissements et vos remontrances; et si vous ne vous croyez pas assez parfait, et qu’en effet vous ne le soyez pas, pour donner des leçons aux autres, faites du moins ce que la loi vous commande. VINGT-SIXIÈME DEGRÉ
67. La vie des anachorètes, ou pour mieux dire, des religieux, doit être dirigée par les lumières d’une conscience droite et pure, et par les sentiments et les affections d’un coeur sincèrement et solidement pieux et dévot. Or celui qui marche ainsi dans cette illustre carrière, ne se propose que l’accomplissement de la Volonté du Seigneur dans tous ses exercices, dans toutes ses pensées, dans toutes ses démarches et dans tous ses mouvements. Il n’est rien dans lui qu’il ne fasse avec un grand sentiment de zèle et de ferveur pour la gloire de Dieu, dans le dessein de Lui plaire et en sa sainte Présence; et celui qui n’est pas dans ces heureuses dispositions, ou qui les abandonne, n’a pas encore acquis la vertu qui lui est nécessaire. VINGT-SEPTIÈME DEGRÉ
26. Ceignez-vous donc de la ceinture de l’obéissance; dépouillez-vous entièrement de votre propre volonté, et, mort à vous-même, présentez-vous devant Dieu pour Lui offrir l’encens de vos prières. Car si nous ne nous étudions qu’à connaître et à suivre la Volonté du Seigneur, nous sentirons qu’Il viendra visiter notre âme et la conduire sans danger jusqu’à la vie éternelle. VINGT-HUITIÈME DEGRÉ
11. Or les personnes auxquelles Dieu a daigné accorder cette grâce si sublime, quoique revêtues d’une chair fragile, deviennent et sont des temples vivants de la Divinité, qui les dirige et les conduit dans leurs paroles, leurs actions et leurs pensées, et qui, par les lumières abondantes dont elle éclaire leur esprit, leur fait exactement connaître quelle est son adorable Volonté; et, supérieures à toutes les instructions des hommes, ces âmes fortunées s’écrient dans les sentiments d’un ravissement céleste : Mon âme est toute brûlante de soif pour mon Dieu, qui est le Dieu fort et vivant; quand viendrai-je et quand paraîtrai-je devant la Face de mon Dieu ? (Ps 41,3); et elles ajoutent : Je ne peux plus supporter la violence du désir qui me presse; ô mon Dieu, je désire, je cherche et je demande cette beauté immortelle que Tu m’avais donnée avant cette chair de boue. VINGT-NEUVIÈME DEGRÉ