« Dans la maison de mon père il y a beaucoup de demeures », dit le Verbe de Dieu. A la résurrection des morts aussi, les corps glorieux des ressuscites seront bien différents : « autre est la chair des oiseaux, autre la chair des brebis, autre celle des poissons. Il y a aussi des corps célestes et des corps terrestres, mais autre est l’éclat des célestes et autre est l’éclat des terrestres. Autre l’éclat du soleil, autre l’éclat de la lune, autre l’éclat des étoiles. Une étoile diffère en éclat d’une autre étoile ; ainsi en sera-t-il pour la résurrection des morts. »
Que de comparaisons diverses pour désigner la variété de ceux qui trouvent le salut ! EH bien ! ces Gabaonites, dont on vient de nous lire l’histoire, représentent, à mon avis, une portion infime de ceux qui doivent arriver au salut – salut qui ne leur évitera pourtant pas la marque d’un blâme. – Tu vois en effet comment ils sont condamnés à devenir « coupeurs de bois » et « porteurs d’eau » au service du peuple et de l’autel de Dieu, parce qu’ils avaient imaginé une ruse et qu’ils étaient venus trouver les fils d’Israël « avec de vieux haillons et de vieilles sandales », et « pour nourriture du vieux pain ». Les voilà donc qui viennent trouver Jésus avec toutes leurs vieilleries et qui ne lui demandent que le salut !
Voici, me semble-t-il, le sens de cette figure. Il est dans l’Église des chrétiens qui sont réellement croyants, qui ont foi en Dieu et ne discutent pas ses commandements, qui même à l’égard des serviteurs de Dieu accomplissent leurs devoirs et désirent les servir ; ils se montrent même vraiment zélés et empressés lorsqu’il s’agit d’apprêter l’église ou d’aider au ministère. Mais dans leurs actes et leur vie privée, ils se montrent impurs, enveloppés de vices, ils n’ont aucunement « dépouillé le vieil homme avec ses œuvres ». Tout enveloppés qu’ils sont de leurs vieux vices et de leurs impuretés, comme l’étaient les Gabaonites avec leurs haillons et leurs vieilles sandales, ils croient en Dieu, ils se montrent respectueux à l’égard des serviteurs de Dieu et du culte de l’Église, mais ils ne manifestent dans leur conduite aucun signe d’amélioration et de renouvellement intérieur. A ces sortes de gens, Jésus Notre Seigneur veut bien accorder le salut, mais ce salut, en quelque sorte, ne leur évite pas les marques de déshonneur.
Dans l’opuscule qu’on appelle le Pasteur, on trouve une image analogue pour décrire la même catégorie de gens. On y parle en effet d’un arbre – un orme – qui ne produit pas de fruits, mais qui supporte une vigne aux fruits abondants ; comme cet orme est le soutien de la vigne qui s’appuie sur sa solidité pour produire et garder un grand nombre de fruits, cet orme, tout stérile qu’il soit, paraît à son tour nécessaire et utile puisqu’il est au service d’une vigne qui, elle, est productive. C’est ainsi qu’il faut comprendre l’histoire des Gabaonites : ils n’ont pas dépouillé le vieil homme avec ses œuvres, pourtant ils se mettent au service des saints, ils ont donc quelque utilité, et c’est à ce titre qu’ils reçoivent de Jésus le salut par suite du serment qu’il leur a fait.
Quant à moi, je ne voudrais pas obtenir le salut au titre des Gabaonites, ni être compté dans « les coupeurs de bois » ni dans « les porteurs d’eau » ; et c’est parmi les Israélites que je désire recueillir mon héritage et recevoir ma part de Terre promise.