Tout à l’heure, le texte portait : « que les eaux produisent des êtres vivants qui rampent et des oiseaux volant sur la terre au firmament du ciel », mais il porte maintenant : « que la terre produise des êtres vivants selon leur espèce, des quadrupèdes et des êtres qui rampent et des bêtes de la terre selon leur espèce ». Pour ce qui est des êtres produits par l’eau, nous avons dit qu’il fallait les interpréter comme les mouvements et les pensées de notre esprit qui viennent de l’intime du coeur. Quant à ce qui est dit maintenant : « que la terre produise des êtres vivants selon leur espèce, des quadrupèdes, des êtres qui rampent et des bêtes de la terre selon leur espèce », je pense qu’il faut entendre par là les mouvements de notre homme extérieur, autrement dit de l’homme charnel et terrestre. Car là où il est question de la chair, il n’est pas fait mention d’oiseaux mais seulement de quadrupèdes, de bêtes qui rampent et de bêtes de la terre. Au dire de l’Apôtre, « le bien n’habite pas dans ma chair » et « la sagesse de la chair est ennemie de Dieu » ; aussi, ce que produit la terre, c’est-à-dire notre chair, c’est ce qui fait l’objet de ce commandement du même apôtre : « Faites mourir vos membres, ce membres de l’homme terrestre, la fornication, l’impureté, la luxure, l’avarice, l’idolâtrie » et le reste. Homélies sur la Genèse: I – LA CRÉATION Le premier jour.
Nous avons dit quelle interprétation allégorique leur donner, quand nous avons expliqué que l’eau, c’est-à-dire l’esprit de l’homme, avait reçu l’ordre de produire le sens spirituel, tandis que la terre devait produire le sens charnel, en sorte que ce soit l’esprit qui domine les animaux et non pas ceux-ci l’esprit. Car l’homme, ce grand « ouvrage » de Dieu pour lequel le monde entier fut créé, Dieu le veut non seulement pur et exempt, mais encore au-dessus de tout ce que nous avons dit. Homélies sur la Genèse: I – LA CRÉATION Le premier jour.
Donc « Lot habita dans la caverne avec ses deux filles ». Ce sont sans nul doute ces deux filles que le prophète désigne quand il dit qu’Oola et Ooliba sont deux soeurs, Oola étant Juda et Ooliba Samarie. Séparé en deux, le peuple fait donc figure des deux filles de la Loi. Celles-ci, désirant propager la race charnelle et affermir les forces du royaume terrestre par une abondante postérité, assoupissent et endorment leur père (la Loi), c’est-à-dire qu’elles recouvrent et obscurcissent son sens spirituel, n’en retenant que le sens charnel. Ainsi conçoivent-elles et mettent-elles au jour des enfants que leur père ignore et ne reconnaît pas. Ce n’était ni la destinée ni la volonté de la Loi de produire des générations charnelles, et pour avoir une semblable descendance qui « n’entre pas dans l’assemblée du Seigneur », il faut que la loi se soit endormie. « Les Ammonites et les Moabites n’entreront pas dans l’assemblée du Seigneur, dit l’Écriture, jusqu’à la troisième et à la quatrième génération et tant que durera ce siècle » ; ce qui veut dire que la descendance charnelle de la Loi n’entre dans l’Église du Christ ni à la troisième génération pour une raison tirée de la Trinité, ni à la quatrième pour une raison tirée des quatre évangiles, ni jamais, sauf probablement à l’issue du siècle présent, lorsque « la masse des Gentils sera entrée et qu’ainsi tout Israël aura été sauvé ». Homélies sur la Genèse: V – LES FILLES DE LOT Le premier jour.
Pour ce qui est de Sara, dont le nom signifie chef de file ou principe dominant, je pense qu’elle représente l’ arete, c’est-à-dire la vertu morale. C’est l’homme sage et fidèle qui s’attache et s’unit cette vertu, tel le Sage qui disait de la sagesse : « J’ai cherché à l’avoir pour épouse ». Aussi Dieu dit à Abraham : « Tout ce que te dira Sara, accomplis-le. » Cette parole ne se rapporte pas au commerce charnel, puisque Dieu a déjà prononcé cette autre phrase à l’adresse de la femme à propos de son mari : « Ton désir te portera vers ton mari, et il dominera sur toi. » – Si donc l’Écriture fait de l’homme le maître de la femme, comment se fait-il qu’elle puisse dire cette fois à l’homme : «Tout ce que te dira Sara, accomplis-le » ? C’est que lorsqu’on s’est adjoint la vertu en mariage, il faut accomplir toutes les inspirations qu’elle suggère. Homélies sur la Genèse: VI – ABIMÉLECH ET SARA Le premier jour.
L’Apôtre dit à leur sujet qu’ « Agar enfanta pour la servitude » un peuple charnel, tandis que Sara, qui était libre, enfanta un peuple qui ne vient pas de la chair mais qui a été appelé dans la liberté, « cette liberté par laquelle le Christ l’a affranchi ». Le Christ lui-même a dit en effet : « Si le Fils vous affranchit, vous serez vraiment libres. » Homélies sur la Genèse: VII – NAISSANCE ET SEVRAGE D’ISAAC Le premier jour.
Mais voyons ce qu’ajouté encore l’Apôtre dans son exposé : « Mais de même qu’alors, dit-il, celui qui était né selon la chair persécutait celui qui était né selon l’Esprit, ainsi en est-il encore maintenant. » – Voyez comment l’Apôtre nous apprend qu’en toutes choses la chair s’oppose à l’esprit, que ce soit le peuple charnel (des Juifs) qui s’oppose au peuple spirituel (des Chrétiens), ou que ce soit parmi nous, ceux qui sont encore charnels qui s’opposent aux spirituels. Car, si vous vivez selon la chair, si vous vous comportez selon la chair, vous êtes fils d’Agar et, par conséquent, vous vous opposez à ceux qui vivent selon l’esprit. D’autre part, en revenant sur nous-mêmes, nous nous apercevons « que la chair a des désirs contraires à ceux de l’esprit, et l’esprit à ceux de la chair, et qu’ils sont opposés l’un à l’autre » ; nous nous apercevons aussi « qu’il y a dans nos membres une loi qui lutte contre la loi de notre raison et qui nous rend captifs de la loi du péché ». Ainsi mesurez-vous l’importance des luttes de la chair contre l’esprit. Homélies sur la Genèse: VII – NAISSANCE ET SEVRAGE D’ISAAC Le premier jour.
L’outre est la lettre de la loi, dont boit ce peuple charnel pour en tirer quelque intelligence ; cette lettre lui fait souvent défaut et ne peut avoir d’explication, car en bien des points l’interprétation historique n’en peut mais. – L’Église, elle, boit aux sources évangéliques et apostoliques, qui ne tarissent jamais et qui « se répandent sur ses places publiques », car elles sont abondantes et coulent toujours dans la largeur de l’interprétation spirituelle. C’est lorsqu’elle puise et scrute quelque sens plus profond dans la loi, qu’elle boit l’eau des puits. Homélies sur la Genèse: VII – NAISSANCE ET SEVRAGE D’ISAAC Le premier jour.
Prenons garde, nous aussi, car nous sommes souvent à côté du puits d’eau vive, c’est-à-dire des divines Écritures, nous trompant sur elles. Nous possédons les livres et les lisons, mais nous n’allons pas jusqu’au sens spirituel. C’est pourquoi il faut des larmes et des prières incessantes, pour que le Seigneur nous ouvre les yeux. Les aveugles de Jéricho, assis sur le bord de la route, n’auraient pas eu leurs yeux ouverts s’ils n’avaient crié après le Seigneur. – Mais que dis-je, pour ouvrir les yeux ? Ils ont déjà été ouverts. Car Jésus est venu ouvrir les yeux des aveugles. Oui, nos yeux ont été ouverts et le voile de la lettre de la loi a été ôté. – Mais je crains que nous-mêmes ne les fermions à nouveau en un sommeil plus profond. Nous risquons de ne pas rester éveillés au sens spirituel et d’être négligents à secouer le sommeil de nos yeux pour contempler les choses spirituelles et ne pas nous tromper, comme le peuple charnel, alors que nous sommes placés tout près des eaux. Homélies sur la Genèse: VII – NAISSANCE ET SEVRAGE D’ISAAC Le premier jour.
Mais quels sont ceux qui remplissent les puits de terre ? – Ceux, à n’en pas douter, qui donnent à la loi un sens terrestre et charnel et lui interdisent un sens spirituel et mystique, en sorte qu’ils ne s’y abreuvent pas ni ne permettent aux autres de le faire. Écoutez ce qu’Isaac, notre Sauveur Jésus-Christ, dit dans l’Évangile : « Malheur à vous, Scribes et Pharisiens hypocrites, parce que vous avez enlevé la clé de la science ; vous-mêmes n’êtes point entrés et vous avez empêché ceux qui voulaient entrer. » Les voilà donc, ceux qui comblent de terre « les puits creusés par les serviteurs d’Abraham» ; ils enseignent la loi charnellement et ils souillent les eaux du Saint-Esprit. Ils possèdent des puits non pour en tirer de l’eau, mais pour y jeter de la terre. – Tels sont les puits qu’Isaac entreprend de creuser. Voyons maintenant comment il s’y prend. Homélies sur la Genèse: XIII – LES PUITS D’ISAAC Le premier jour.
Il est dit, dans ce qui suit, qu’après la famine et la servitude, le peuple égyptien verse le cinquième de ses revenus à Pharaon ; par contre, le peuple d’Israël en verse le dixième aux prêtres. Croyez bien qu’il y a d’excellentes raisons pour étayer ce dire de l’Écriture. Le peuple égyptien, n’est-ce pas, doit payer un tribut où le nombre cinq entre en ligne de compte : eh bien ! par la, ce sont les cinq sens corporels qui sont désignés, dont le peuple charnel est l’esclave. Car les Égyptiens se complaisent toujours aux choses visibles et corporelles. Le peuple d’Israël au contraire, honore le nombre dix, nombre de la perfection : en effet, il a reçu les dix paroles de la loi et la vertu du décalogue le tient enchaîné, lui permettant de recevoir de la libéralité divine des secrets ignorés de ce monde. Dans le Nouveau Testament, le nombre dix est également à l’honneur : c’est en dix vertus que se déploie, y est-il expliqué, le fruit de l’Esprit ; c’est dix mines que le serviteur fidèle offre au Seigneur comme produit de son travail, et c’est de dix villes qu’il reçoit le commandement. Homélies sur la Genèse: XVI – JOSEPH ACQUIERT POUR PHARAON LES TERRES DE L’EGYPTE Le premier jour.