Quelques-uns de nos prédécesseurs ont observé à propos du Nouveau Testament que partout où l’esprit est nommé sans un adjectif désignant quel est cet esprit, il faut entendre l’Esprit Saint. Ainsi : Le fruit de l’Esprit est la charité, la joie, la paix, etc. De même : Alors que vous avez commencé dans l’Esprit, vous achevez maintenant dans la chair. Nous pensons que cette distinction peut être aussi appliquée à l’Ancien Testament. Par exemple : Celui qui donne l’Esprit au peuple qui est sur terre et l’Esprit à ceux qui la foulent. Sans aucun doute celui qui foule aux pieds la terre, c’est-à-dire le terrestre et le corporel, participe à l’Esprit Saint, le recevant de Dieu. Un savant hébreu disait qu’il fallait entendre du Fils unique et de l’Esprit Saint les deux Séraphins qu’Isaïe décrit avec six ailes et qui se crient l’un à l’autre : Saint, Saint, Saint, le Seigneur Sabaoth. Nous pensons qu’il faut de même appliquer au Christ et à l’Esprit Saint ce qui est dit dans le cantique d’Habacuc : Au milieu des deux vivants – ou des deux vies -, lu seras connu. Toute la science venant du Père, par la révélation du Fils, est connue dans l’Esprit Saint, de sorte que l’un et l’autre, appelés par le prophète des vivants ou des vies, sont causes de la science de Dieu le Père. Comme il est dit du Fils que personne ne connaît le Père si ce n’est le Fils et celui à qui le Fils aura voulu le révéler, l’Apôtre parle de même du Saint Esprit : Dieu nous a révélé par son Esprit : car l’Esprit scrute tout, même les profondeurs de Dieu. Mais de même dans l’Évangile, le Sauveur, mentionnant les doctrines divines les plus profondes que ne pouvaient encore saisir ses disciples, dit aux apôtres : J’ai encore beaucoup à vous dire mais vous ne pouvez pas encore le comprendre; lorsque sera venu le Paraclet, l’Esprit Saint, qui procède du Père, il vous enseignera toutes choses et vous rappellera tout ce que je vous ai dit. Il faut donc penser que comme le Fils, qui seul connaît le Père, le révèle à qui il veut, le Saint Esprit, qui est seul à scruter jusqu’aux profondeurs de Dieu, révèle Dieu à qui il veut. Car l’Esprit souffle où il veut. Traité des Principes: LIVRE I: Premier traité (I, 1-4): Troisième section
Mais le sens même du mot âme, tel qu’il est en grec (psyché) a paru à certains de ceux qui cherchent avec plus de soin, suggérer une signification qui n’est pas sans intérêt. Car la parole divine dit que Dieu est feu : Notre Dieu est un feu qui consume. Et de la substance des anges elle affirme : Celui qui a fait de ses anges des esprits (souffles) et de ses ministres un feu qui brûle. Et ailleurs : L’Ange du Seigneur apparut en flamme de feu dans le buisson. Bien plus, nous avons reçu le commandement d’être brûlants par l’esprit : par là sans aucun doute il est montré que la Parole de Dieu est enflammée et chaude. Mais le prophète Jérémie entendait de celui qui lui répondait : Voici que j’ai mis mes paroles dans ta bouche comme du feu. De même que Dieu est feu, que les anges sont la flamme du feu et que les saints brûlent par l’esprit, de même au contraire ceux qui sont tombés de l’amour de Dieu se sont refroidis dans leur charité pour lui et on dit qu’ils sont devenus froids. En effet le Seigneur dit : Par suite de la multiplication de l’iniquité, la charité de beaucoup se refroidira. Et tout ce qui, de quelque manière, symbolise dans les Écritures saintes la puissance adverse est toujours froid, comme on peut le remarquer. En effet le diable est appelé le serpent et le dragon : que peut-on trouver de plus froid ? Le dragon est représenté régnant dans les eaux, et ceci revient aussi à propos d’un des esprits malins que le prophète montre dans la mer. En un autre endroit le prophète dit : Je lancerai l’épée sainte sur le dragon, le serpent qui fuit, sur le dragon, le serpent pervers, et l’épée le tuera. Et ailleurs : Même s’ils s’éloignaient de mes yeux et descendaient dans les profondeurs de la mer, je commanderai au dragon et il les mordra. Dans Job, le dragon est dit le roi de tous ceux qui sont dans les eaux. Le prophète annonce que de Borée viendront des maux sur tous ceux qui habitent la terre. Or Borée désigne dans les Écritures le vent froid, comme l’écrit la Sagesse: Borée est le vent froid. Cela, sans aucun doute, il faut l’entendre du diable. Si donc les réalités saintes sont appelées feu, lumière, et sont dites brûlantes, si les réalités contraires sont froides et si la charité se refroidit, selon l’Écriture, dans les pécheurs, on peut se demander si peut-être le mot âme, qui se dit en grec psyché, ne viendrait pas au figuré de ce refroidissement à partir d’un état plus divin et meilleur, c’est-à-dire que l’âme se serait refroidie de sa chaleur naturelle et divine pour recevoir l’état et la dénomination qu’elle a actuellement. Traité des Principes: Livre II: Quatrième traité (II, 8-9): Première section
A cause de cette puissance, assurément non humaine, qui agissait et parlait en lui, Paul disait : Je suis certain que ni la mort ni la vie, ni les anges ni les principautés ni les puissances, ni le présent ni le futur, ni la force ni la hauteur ni la profondeur, ni aucune créature, ne pourra nous séparer de la charité de Dieu, qui est dans le Christ Jésus notre Seigneur. Je ne pense pas que la nature humaine laissée à elle seule pourrait entrer en lutte contre les anges, contre les hauteurs et les profondeurs, contre les autres créatures, mais lorsqu’elle aura senti le Seigneur présent en elle et y habitant, dans sa confiance en l’aide divine elle dira : Le Seigneur est ma lumière et mon salut, que craindrai-je ? Le Seigneur est le protecteur de ma vie, de quoi aurai-je peur ? Pendant que s’approchent de moi ceux qui veulent me nuire pour manger mes chairs, mes ennemis qui me tourmentent ont été pris de faiblesse et sont tombés. S’ils établissent contre moi un camp, mon coeur ne craindra pas; si une bataille s’engage contre moi, en celui-ci (le Seigneur) j’espérerai. Traité des Principes: Livre III: Septième traité (III, 2-4): Première section
Viennent cependant au premier rang dans ce recensement sacré ceux qui sont prêts à soutenir les guerres d’Israël, qui peuvent combattre contre ces forces hostiles et ennemies que le Père a soumises au Fils siégeant à sa droite pour qu’il détruise toute principauté et puissance ; ainsi, par ces formations de soldats qui sont siens et, militant pour Dieu, ne se mêlent pas des affaires séculières, il bouleverse les royaumes de l’adversaire. Ils portent autour d’eux les boucliers de la foi, brandissant les traits de la sagesse ; sur eux brillent le casque de l’espérance dans le salut et la cuirasse de la charité protège leur poitrine pleine de Dieu. Tels sont les soldats qui me semblent ainsi indiqués, et ainsi sont préparés à ce genre de guerre ceux qui reçoivent l’ordre de se faire recenser dans les livres saints. Mais parmi eux sont désignés comme beaucoup plus insignes et parfaits ceux dont il est dit que même les cheveux de leur tête sont comptés. Quant à ceux qui ont été punis pour leurs péchés et dont les corps sont tombés dans le désert, ils paraissent symboliser ceux qui ont accompli des progrès appréciables sans pouvoir aller jusqu’au bout dans la perfection pour diverses causes : pour avoir murmuré, vénéré des idoles, forniqué, comme le dit l’Écriture, ou pour autre chose qu’il n’est pas permis à l’intelligence de concevoir. Traité des Principes: Livre IV: Neuvième traité (IV, 1-3): Deuxième section
Récapitulation sur le Père, le Fils l’Esprit Saint et les autres points qui ont été traités plus haut: Le moment est venu, après avoir parcouru selon nos forces tout ce qui a été dit plus haut, de récapituler en guise de rappel chacun des points que nous avons traités séparément et d’abord de revenir sur le Père, le Fils et l’Esprit Saint. Puisque Dieu le Père est invisible et inséparable de son Fils, il n’a pas engendré le Fils par prolation comme certains le pensent. En effet si le Fils est une prolation du Père, comme ce mot de prolation exprime une génération semblable au mode ordinaire de reproduction des animaux ou des hommes, il faut nécessairement que celui qui a mis au jour et celui qui a été mis au jour soient corps. Nous ne disons donc pas, comme le pensent les hérétiques, qu’une partie de la substance de Dieu se soit changée en fils ou que le Fils a été procréé par le Père à partir de rien, c’est-à-dire en dehors de sa substance, de telle sorte qu’il fut un moment où il n’était pas, mais nous disons, en supprimant toute signification corporelle, que la Parole et Sagesse est née du Père invisible et incorporel, sans que rien ne se produise corporellement, comme la volonté procède de l’intelligence. Il ne paraîtra pas absurde, puisqu’il est appelé fils de la charité, de penser qu’il est pareillement fils de la volonté. Mais Jean indique aussi que Dieu est lumière, et Paul montre que le Fils est le rayonnement de la lumière éternelle. De même que jamais la lumière n’a pu exister sans son rayonnement, de même le Fils ne peut être compris sans le Père, lui qui est appelé l’empreinte et l’expression de sa substance, sa Parole et sa Sagesse. Comment peut-il être dit qu’il fut un moment où le Fils n’aurait pas été ? Cela revient à dire qu’il fut un moment où la Vérité n’aurait pas été, où la Sagesse n’aurait pas été, où la Vie n’aurait pas été, alors que dans tous ces aspects est dénombrée parfaitement la substance du Père. Ils ne peuvent pas être séparés de lui et ne peuvent jamais être séparés de sa substance. Bien qu’on dise qu’ils sont multiples sous le regard de l’intelligence, ils sont un par leur substance et en eux se trouve la plénitude de la divinité. Traité des Principes: Livre IV: Neuvième traité (IV, 1-3): Deuxième section