chair (Orígenes)

Tout à l’heure, le texte portait : « que les eaux produisent des êtres vivants qui rampent et des oiseaux volant sur la terre au firmament du ciel », mais il porte maintenant : « que la terre produise des êtres vivants selon leur espèce, des quadrupèdes et des êtres qui rampent et des bêtes de la terre selon leur espèce ». Pour ce qui est des êtres produits par l’eau, nous avons dit qu’il fallait les interpréter comme les mouvements et les pensées de notre esprit qui viennent de l’intime du coeur. Quant à ce qui est dit maintenant : « que la terre produise des êtres vivants selon leur espèce, des quadrupèdes, des êtres qui rampent et des bêtes de la terre selon leur espèce », je pense qu’il faut entendre par là les mouvements de notre homme extérieur, autrement dit de l’homme charnel et terrestre. Car là où il est question de la chair, il n’est pas fait mention d’oiseaux mais seulement de quadrupèdes, de bêtes qui rampent et de bêtes de la terre. Au dire de l’Apôtre, « le bien n’habite pas dans ma chair » et « la sagesse de la chair est ennemie de Dieu » ; aussi, ce que produit la terre, c’est-à-dire notre chair, c’est ce qui fait l’objet de ce commandement du même apôtre : « Faites mourir vos membres, ce membres de l’homme terrestre, la fornication, l’impureté, la luxure, l’avarice, l’idolâtrie » et le reste. Homélies sur la Genèse: I – LA CRÉATION Le premier jour.

Notre homme intérieur est constitué d’un esprit et d’une âme. On peut faire de l’esprit le mâle et de l’âme la femelle. Si ces deux éléments s’entendent et s’accordent entre eux, par leur union ils croissent et multiplient ; ils engendrent des fils : les bons mouvements, les idées et les pensées profitables, au moyen desquels ils remplissent et dominent la terre. Autrement dit, ayant maîtrisé le sens de la chair, ils l’inclinent à de bons desseins, et ils le dominent en ne tolérant aucune insurrection de la chair contre la volonté de l’esprit. Si donc il arrive que l’âme qui est unie à l’esprit et pour ainsi dire mariée avec lui, s’écarte vers les plaisirs corporels et se porte aux jouissances de la chair, si tantôt elle semble obéir aux salutaires avertissements de l’esprit et tantôt cède aux vices charnels, cette âme souillée par l’adultère du corps, ne peut pas croître ni multiplier légitimement ; au reste, l’Écriture nomme les imparfaits des fils d’adultère. Cette âme divorcée d’avec l’esprit se livre tout entière au sens de la chair et aux désirs corporels, elle se détourne effrontément de Dieu et elle s’entendra dire qu’ « elle a pris un visage de courtisane et qu’elle s’est livrée sans pudeur à tout le monde ». Elle sera donc punie comme une courtisane et l’on ordonnera de « préparer un massacre à ses fils ». Homélies sur la Genèse: I – LA CRÉATION Le premier jour.

Nous avons déjà interprété cela au sens littéral dans le passage où Dieu dit : « Faisons l’homme, etc., qu’il domine sur les poissons de la mer et sur les oiseaux du ciel, etc. » Mais, au sens allégorique, ce qui me semble indiqué par les poissons, les oiseaux, les animaux et les êtres de la terre qui rampent, c’est ce que nous avons déjà dit plus haut, c’est-à-dire, soit tout ce qui procède de l’âme et de la pensée du coeur, soit tout ce qui provient des désirs corporels et des mouvements de la chair. Les saints qui sont fidèles à la bénédiction de Dieu tiennent tout cela sous leur domination, car les saints conduisent l’homme tout entier selon la volonté de l’esprit ; les pécheurs au contraire sont sous la domination de ce qui provient des vices de la chair et des plaisirs du corps. Homélies sur la Genèse: I – LA CRÉATION Le premier jour.

C’est ainsi qu’en montant à travers les différents étages d’appartements, on arrive à Noé lui-même, – Noé veut dire « le repos » ou « le juste » – Noé qui est le Christ Jésus. Car ce n’est pas à l’antique Noé que conviennent ces paroles de Lamech son père : « Celui-ci nous reposera de nos fatigues, du travail pénible de nos mains et de la terre que le Seigneur a maudite. » Comment, en effet, l’antique Noé aurait-il pu en toute vérité « reposer » Lamech et le peuple qui se trouvait alors sur la terre, comment la fatigue et le travail pénible auraient-ils pu cesser à l’époque de Noé, comment aurait pu être supprimée la malédiction divine de la terre, quand on nous montre que c’est plutôt la colère divine qui s’accrut et que Dieu dit, selon le texte de l’Écriture : « Je me repens d’avoir fait l’homme sur la terre » et « je détruirai toute chair sur la terre », et surtout quand la destruction des vivants témoigne d’une souveraine disgrâce ? Homélies sur la Genèse: II – L’ARCHE DE NOÉ Le premier jour.

Avant le changement de nom, la première parole que Dieu adresse à Abram est celle-ci : « Quitte ton pays, ta famille et la maison de ton père, etc… » – Là, pour l’alliance de Dieu, pour la circoncision, aucune recommandation. Car, tant qu’il s’appelait Abram et portait le nom de sa naissance charnelle, Abraham ne pouvait pas recevoir l’alliance de Dieu ni la marque distinctive de la circoncision. Mais une fois qu’ « il a quitté son pays et sa famille », il commence à percevoir des paroles plus mystérieuses, celle-là d’abord : « Tu ne t’appelleras plus Abram, mais c’est Abraham qui sera ton nom. » C’est alors qu’il entre en partage de l’alliance et qu’il reçoit la circoncision comme marque distinctive de la foi, ce qu’il ne pouvait pas tant qu’il était dans la maison de son père, au milieu de sa famille charnelle, et tant qu’il répondait au nom d’Abram. De même, tant qu’il était dans la maison paternelle et qu’il demeurait par habitation lié à la chair et au sang, ni lui ni sa femme n’étaient désignés du titre d’« ancien » ; mais, une fois parti, il mérita les appellations d’« Abraham » et d’« ancien » : « Ils étaient, en effet, tous deux (Abraham et son admirable épouse) des anciens », dit l’Écriture, c’est-à-dire des vieillards, et « avancés en jours ». Homélies sur la Genèse: III – LA CIRCONCISION D’ABRAHAM Le premier jour.

« Lorsqu’Abraham fut arrivé à l’âge de quatre-vingt-dix-neuf ans, Dieu lui apparut et lui dit : Je suis Dieu ; mérite mes complaisances et sois irréprochable. J’établirai mon alliance entre moi et toi. Et Abraham tomba la face contre terre et adora Dieu. Alors Dieu lui parla ainsi : C’est moi. Voici mon alliance avec toi, tu seras le père d’une multitude de nations et toutes les nations seront bénies en toi. On ne te nommera plus Abram, mais ton nom sera Abraham. » Après lui avoir donné ce nom, il reprit aussitôt : « J’établirai mon alliance entre moi et toi et ta postérité après toi. » Puis il ajouta : « Tout mâle parmi vous sera circoncis, et vous vous circoncirez dans la chair de votre prépuce. » Homélies sur la Genèse: III – LA CIRCONCISION D’ABRAHAM Le premier jour.

– Puisque nous en sommes à ce passage, je veux examiner si le Dieu tout-puissant, qui gouverne le ciel et la terre, quand il voulut faire alliance avec un homme saint, fit consister l’essentiel d’une si grande affaire dans le retranchement d’un prépuce de chair chez cet homme et ceux de sa race. « Mon alliance, dit-il, sera dans ta chair. » La circoncision était-elle donc la chose que le « Maître du ciel et de la terre » conférait comme gage d’éternelle alliance à l’homme unique choisi entre tous les mortels ? Homélies sur la Genèse: III – LA CIRCONCISION D’ABRAHAM Le premier jour.

Instruits par l’Apôtre Paul, nous disons que beaucoup de choses se produisaient en figure et en image de la vérité à venir : ainsi cette circoncision charnelle était une figure de la circoncision spirituelle qu’il était juste et convenable que le « Dieu de Majesté » donnât en précepte aux hommes. Écoutez donc comment Paul, « docteur des nations dans la foi et la vérité », enseigne l’Église du Christ sur le mystère de la circoncision : « Voyez la circoncision, dit-il, – et il parle des Juifs qui portent la marque de la circoncision dans leur chair – c’est nous qui sommes les vrais circoncis, nous qui servons Dieu en esprit et ne mettons pas notre confiance dans la chair ». Homélies sur la Genèse: III – LA CIRCONCISION D’ABRAHAM Le premier jour.

Tel est un des textes de Paul sur la circoncision. En voici un autre : « Le vrai Juif n’est pas celui qui le paraît, dit-il, la vraie circoncision n’est pas celle qu’on voit dans la chair ; mais le Juif, c’est celui qui l’est intérieurement, et la circoncision, c’est celle du coeur, selon l’esprit et non selon la lettre. » Ne vous semble-t-il pas plus digne de parler d’une telle circoncision dans les saints et les amis de Dieu, plutôt que d’un retranchement de chair ? Homélies sur la Genèse: III – LA CIRCONCISION D’ABRAHAM Le premier jour.

Revenons donc aux paroles des prophètes, pour qu’avec vos prières la lumière se fasse sur toutes ces questions. Le prophète Ezéchiel dit : « Aucun étranger incirconcis de coeur et incirconcis de chair n’entrera dans mon sanctuaire ». Et de même ailleurs, tout en faisant des reproches, le prophète dit .: « Tous les étrangers sont incirconcis de chair, mais les fils d’Israël sont incirconcis de coeur. » Ce qui indique bien qu’à moins d’être circoncis de coeur et de chair, « on n’entrera pas dans le sanctuaire » de Dieu. Homélies sur la Genèse: III – LA CIRCONCISION D’ABRAHAM Le premier jour.

– Mais je vais paraître pris à mes propres paroles. Car aussitôt, sur ce passage du prophète, un Juif peut m’arrêter et me dire : « Le prophète indique ici les deux circoncisions, celle de la chair et celle du coeur. Il n’y a donc plus de place pour l’allégorie, puisque les deux espèces de circoncision y sont envisagées. » Homélies sur la Genèse: III – LA CIRCONCISION D’ABRAHAM Le premier jour.

Aidez-moi de vos prières pour que « la parole du Dieu vivant » daigne se présenter « à l’ouverture de mes lèvres » et qu’ainsi nous puissions, sous sa conduite, déboucher de l’étroit chemin de l’objection au grand espace de la vérité. Ce n’est pas seulement les Juifs charnels qu’il nous faut combattre sur la circoncision de la chair, mais aussi certains qui portent apparemment le nom du Christ et s’imaginent pourtant qu’il leur faut recevoir la circoncision de la chair, par exemple les Ebionites et tous ceux qui adoptent faussement une aussi pauvre interprétation que la leur. Homélies sur la Genèse: III – LA CIRCONCISION D’ABRAHAM Le premier jour.

Mais laissons ces gens qui, comme les idoles, « ont des oreilles et n’entendent pas, des yeux et ne voient pas ». Pour vous, ô « peuple de Dieu, peuple qu’il s’est acquis, peuple choisi pour annoncer les vertus du Seigneur », recevez la vraie circoncision de la parole de Dieu dans vos oreilles, sur vos lèvres, dans votre coeur, dans votre chair et dans tous vos membres sans exception. Homélies sur la Genèse: III – LA CIRCONCISION D’ABRAHAM Le premier jour.

– Et maintenant, selon notre promesse, voyons comment il faut envisager la circoncision de la chair. Homélies sur la Genèse: III – LA CIRCONCISION D’ABRAHAM Le premier jour.

Il n’est personne qui ignore que le membre où se trouve le prépuce sert aux fonctions naturelles du coït et de la génération. Quand on sait se maîtriser dans les mouvements de cette nature, quand on ne dépasse pas les bornes établies par les lois, quand on ne connaît pas d’autre femme que son épouse légitime, quand on ne s’approche d’elle qu’aux époques déterminées et légitimes et seulement pour avoir des enfants, alors il est entendu que l’on est circoncis dans sa chair. Mais quand on se donne toute licence, quand on est retenu de partout par des embrassements coupables, quand on se jette sans frein dans le tourbillon de la débauche, on est incirconcis dans sa chair. Or, l’Église du Christ, fortifiée par la grâce de Celui qui a été crucifié pour elle, s’abstient non seulement des amours défendues et coupables, mais aussi des amours permises et honorables, et, en sa qualité de vierge épouse du Christ, elle fleurit en vierges chastes et pures qui portent la vraie circoncision de la chair et conservent véritablement dans leur chair l’alliance éternelle de Dieu. Homélies sur la Genèse: III – LA CIRCONCISION D’ABRAHAM Le premier jour.

Cependant, à ces expressions des prophètes, j’oserai en ajouter d’autres analogues. Car s’il faut circoncire nos oreilles, nos lèvres, notre coeur, notre chair, au sens que nous venons d’expliquer, on peut aussi dire que nos mains, nos pieds, nos regards, notre odorat, notre toucher ont également besoin de circoncision. Pour que l’homme de Dieu soit absolument parfait, tous ses membres doivent être circoncis : les mains doivent s’abstenir des larcins, des vols, des meurtres, et s’ouvrir seulement pour les oeuvres de Dieu. Il faut circoncire les pieds, pour qu’ « ils ne soient pas agiles pour répandre le sang », pour qu’ils n’entrent pas « dans le conseil des méchants » et qu’ils ne se meuvent que selon les intentions de Dieu. Il faut circoncire les yeux, pour qu’ils ne convoitent pas le bien du prochain, pour qu’ils ne regardent pas « de femme avec concupiscence ». Si on promène des regards malsains et indiscrets sur des formes féminines, on est incirconcis des yeux. Mais si « soit en mangeant, soit en buvant, on mange et on boit pour la gloire de Dieu », comme le demande l’Apôtre, on est circoncis dans son goût. Quand « on se fait un dieu de son ventre » et que l’on s’adonne aux raffinements de la gourmandise, je dirai qu’on a le goût incirconcis. Si on s’empare de « la bonne odeur du Christ » et si on cherche le « parfum de suavité » dans les oeuvres de miséricorde, on a l’odorat circoncis ; mais si l’on s’avance « oint des parfums les plus exquis », il faut dire que l’on a l’odorat incirconcis. Homélies sur la Genèse: III – LA CIRCONCISION D’ABRAHAM Le premier jour.

« La circoncision et mon alliance seront dans ta chair », dit Dieu à Abraham. Si notre conduite a pu réussir à établir l’équilibre et l’union entre tous nos membres au point que tous nos mouvements ne se produisent qu’en accord avec les lois de Dieu, il sera vrai que « l’alliance de Dieu sera dans notre chair ». Homélies sur la Genèse: III – LA CIRCONCISION D’ABRAHAM Le premier jour.

Nous avons parcouru brièvement ces quelques textes de l’Ancien Testament pour confondre ceux qui se confient en la circoncision de la chair, comme aussi pour édifier l’Église de Dieu. Homélies sur la Genèse: III – LA CIRCONCISION D’ABRAHAM Le premier jour.

– Mais j’en arrive au Nouveau Testament, où réside la plénitude de tout, et, par lui, je voudrais montrer comment nous aussi nous pouvons porter l’alliance de notre Seigneur Jésus-Christ dans notre chair. Homélies sur la Genèse: III – LA CIRCONCISION D’ABRAHAM Le premier jour.

Il ne suffit pas de se payer de mots et de proclamer cette alliance en paroles seulement ; il faut encore en remplir réellement les conditions L’Apôtre Jean dit : « Tout esprit qui confesse que Jésus-Christ est venu dans la chair est de Dieu ! » Eh quoi ! un pécheur et un agent du mal qui « confessera que Jésus-Christ est venu dans la chair », paraîtra le faire dans l’esprit de Dieu ? Non, cela n’est pas porter l’alliance de Dieu dans sa chair, c’est la porter seulement dans ses paroles. Cet homme aussitôt s’entend dire : tu te trompes ô homme, «le royaume de Dieu ne consiste pas dans des paroles, mais dans des oeuvres ». Homélies sur la Genèse: III – LA CIRCONCISION D’ABRAHAM Le premier jour.

Je cherche donc comment l’alliance de Dieu pourra se réaliser dans ma chair. Si « je fais mourir mes membres, ces membres de l’homme terrestre », je réalise l’alliance de Dieu dans ma chair. Si « je porte sans cesse dans mon corps la mort de Jésus-Christ », l’alliance du Christ est dans mon corps ; et « si nous portons l’épreuve avec lui, nous régnerons avec lui ». Si « je suis greffé sur lui par la ressemblance de sa mort », je manifeste que son alliance est dans ma chair. Homélies sur la Genèse: III – LA CIRCONCISION D’ABRAHAM Le premier jour.

Car à quoi rimerait de dire seulement que Jésus est venu dans la chair qu’il a prise de Marie, si je ne montre, par ses effets dans ma chair à moi, qu’il est venu ? Et je le montre si, alors qu’auparavant «j’ai livré mes membres en esclavage à l’injustice pour arriver à l’injustice, je me convertis maintenant et je les livre en esclavage à la justice pour arriver à la sainteté ». Je montre que l’alliance de Dieu est dans ma chair si je peux dire en empruntant le langage de Paul que «j’ai été crucifié avec le Christ et que si je vis, ce n’est plus moi qui vis mais le Christ qui vit en moi », et si je peux dire ce que Paul disait de lui-même : « Je porte sur mon corps les stigmates de mon Seigneur Jésus-Christ. » Vraiment il montrait que l’alliance de Dieu était dans sa chair, lui qui disait : « Qui nous séparera de l’amour de Dieu qui est dans le Christ Jésus ? la tribulation, l’angoisse, le péril, l’épée ? » Homélies sur la Genèse: III – LA CIRCONCISION D’ABRAHAM Le premier jour.

Si nous nous contentons de confesser le Seigneur Jésus en paroles et si nous ne montrons pas que « son alliance est dans notre chair » à la manière que nous venons d’expliquer, nous ressemblerons aux Juifs qui s’imaginent confesser Dieu par la seule marque de la circoncision tandis qu’ils le renient par leurs actes. Homélies sur la Genèse: III – LA CIRCONCISION D’ABRAHAM Le premier jour.

Que le Seigneur nous accorde de « croire dans notre coeur, de confesser de bouche » et de manifester par les oeuvres que « l’alliance de Dieu est dans notre chair », pour que « les hommes, voyant nos bonnes oeuvres, glorifient notre Père qui est dans les cieux » par Jésus-Christ notre Seigneur, « à qui appartient la gloire dans les siècles des siècles ». Ainsi soit-il. Homélies sur la Genèse: III – LA CIRCONCISION D’ABRAHAM Le premier jour.

D’un point de vue différent, montons à un degré plus élevé d’interprétation et disons que l’homme représente notre sens raisonnable tandis que notre chair, qui lui est étroitement unie comme à un mari, est représentée par la femme. Que la chair, par conséquent, suive toujours le sens raisonnable et que le sens raisonnable ne se laisse jamais affaiblir au point de passer sous la domination de la chair et d’être ballotté à sa suite au milieu de la luxure et de la volupté. Homélies sur la Genèse: IV – L’APPARITION DE DIEU A ABRAHAM Le premier jour.

C’est que « la loi est spirituelle » et tout ce qui est arrivé aux anciens leur « est arrivé en figure ». Aussi, voyons si Lot qui n’a pas regardé en arrière ne serait pas le sens raisonnable et l’esprit viril, tandis que sa femme représenterait la chair. Car la chair est toujours tournée vers les vices et, alors que l’esprit se dirige vers le salut, elle regarde en arrière et cherche les voluptés. C’est ce qui a fait dire au Seigneur : « Quiconque met la main à la charrue et regarde en arrière n’est pas propre au royaume de Dieu », et il ajoute : « Souvenez-vous de la femme de Lot, » Il semble bien que c’est pour marquer qu’elle était insensée qu’elle a été changée en statue de sel, puisque le sel représente la sagesse qui lui manquait. Homélies sur la Genèse: V – LES FILLES DE LOT Le premier jour.

– Quant à l’interprétation morale selon laquelle, tout à l’heure, nous avons rapporté Lot au sens raisonnable et à l’esprit viril, et son épouse qui regarde par derrière à la chair adonnée aux concupiscences et aux voluptés, vous qui m’écoutez, ne la recevez pas négligemment. Prenez garde : lorsque vous vous serez enfuis loin des flammes du siècle et que vous aurez échappé aux incendies de la chair, lorsque vous aurez dépassé «la ville de Ségor » « qui est et qui n’est pas toute petite », ce qui représente un certain degré de perfection moyen et honorable, lorsque vous serez arrivés au sommet de la science comme au faîte de la montagne, prenez garde alors d’avoir à faire à ces deux filles de Lot, je veux dire la vaine gloire et sa soeur aînée l’orgueil, qui ne vous quittent pas et qui vous accompagnent même quand vous montez sur la montagne. Prenez garde, tandis qu’assoupis et endormis vous croyez ne rien ressentir ni remarquer, qu’elles ne vous prennent dans leurs embrassements. Si l’Écriture les nomme des filles, c’est qu’elles ne nous viennent pas de l’extérieur mais qu’elles proviennent de nous-mêmes et comme d’une certaine perfection de nos actes. Veillez donc de votre mieux et défendez-vous de leur susciter des enfants, car « leur postérité n’entrera pas dans l’assemblée du Seigneur ». Que si vous voulez une postérité, suscitez-la dans l’esprit, car « celui qui sème dans l’esprit moissonnera, de l’esprit, la vie éternelle ». Et si vous désirez des embrassements, , embrassez la sagesse et « dites à la sagesse qu’elle est votre soeur », et la sagesse dira de vous : « Celui qui fait la volonté de mon Père qui est dans les cieux, celui-là est mon frère et ma soeur et ma mère ». Car cette Sagesse c’est notre Seigneur Jésus Christ, « à qui soit la gloire et la puissance aux siècles des siècles. Ainsi soit-il ». Homélies sur la Genèse: V – LES FILLES DE LOT Le premier jour.

C’est alors que la maison d’Abimélech et ses servantes guéries par le Seigneur enfanteront des fils à l’Église. C’est le temps où « la stérile enfante » et où « beaucoup sont des enfants de la délaissée plutôt que de celle qui a un époux ». Car « le Seigneur a ouvert le sein de celle qui était Stérile » et en a fait une femme féconde qui enfante « toute une nation d’un coup ». Et les saints proclament bien haut : « Seigneur, en votre crainte nous avons conçu et enfanté, nous avons donné l’esprit du salut à la terre. » Et Paul dit semblablement : « Mes petits enfants que j’enfante à nouveau jusqu’à ce que le Christ soit formé en vous ». Voilà les fils qu’enfante toute l’Église de Dieu, voilà les enfants qu’elle engendre ! Car « celui qui sème dans la chair, moissonnera, de la chair, la corruption », mais les enfants de l’Esprit sont ceux dont l’Apôtre dit : « La femme sera sauvée par la descendance de ses fils, pourvu qu’ils persévèrent dans la foi et la chasteté. » Homélies sur la Genèse: VI – ABIMÉLECH ET SARA Le premier jour.

Je n’expliquerai pas maintenant comment comprendre tout cela. L’Apôtre l’a fait quand il a dit : « Dites-moi, vous qui lisez la Loi, n’entendez-vous pas la Loi ? car il est écrit qu’Abraham eut deux fils, l’un de la servante, l’autre de la femme libre. Mais le fils de la servante naquit selon la chair et celui de la femme libre en vertu de la promesse. Ces choses ont un sens allégorique. » Quoi donc, Isaac ne serait pas né selon la chair ? Sara ne l’aurait pas enfanté ? Il n’aurait pas été circoncis ? En jouant avec Ismaël, il n’aurait pas joué dans la chair ? – Voilà précisément ce qu’il y a d’admirable dans le sens de l’Apôtre : pour lui, ce qui est allégorique, c’est bien ce qui s’est passé, à n’en pas douter, selon la chair. Par là nous pourrons apprendre comment traiter les autres passages, spécialement ceux où le récit historique ne présente apparemment que des choses contraires à la loi divine. Homélies sur la Genèse: VII – NAISSANCE ET SEVRAGE D’ISAAC Le premier jour.

Ismaël, le fils de la servante, naît donc selon la chair. Tandis qu’Isaac, le fils de la femme libre, ne naît pas selon la chair, mais en vertu de la promesse. Homélies sur la Genèse: VII – NAISSANCE ET SEVRAGE D’ISAAC Le premier jour.

L’Apôtre dit à leur sujet qu’ « Agar enfanta pour la servitude » un peuple charnel, tandis que Sara, qui était libre, enfanta un peuple qui ne vient pas de la chair mais qui a été appelé dans la liberté, « cette liberté par laquelle le Christ l’a affranchi ». Le Christ lui-même a dit en effet : « Si le Fils vous affranchit, vous serez vraiment libres. » Homélies sur la Genèse: VII – NAISSANCE ET SEVRAGE D’ISAAC Le premier jour.

Mais voyons ce qu’ajouté encore l’Apôtre dans son exposé : « Mais de même qu’alors, dit-il, celui qui était né selon la chair persécutait celui qui était né selon l’Esprit, ainsi en est-il encore maintenant. » – Voyez comment l’Apôtre nous apprend qu’en toutes choses la chair s’oppose à l’esprit, que ce soit le peuple charnel (des Juifs) qui s’oppose au peuple spirituel (des Chrétiens), ou que ce soit parmi nous, ceux qui sont encore charnels qui s’opposent aux spirituels. Car, si vous vivez selon la chair, si vous vous comportez selon la chair, vous êtes fils d’Agar et, par conséquent, vous vous opposez à ceux qui vivent selon l’esprit. D’autre part, en revenant sur nous-mêmes, nous nous apercevons « que la chair a des désirs contraires à ceux de l’esprit, et l’esprit à ceux de la chair, et qu’ils sont opposés l’un à l’autre » ; nous nous apercevons aussi « qu’il y a dans nos membres une loi qui lutte contre la loi de notre raison et qui nous rend captifs de la loi du péché ». Ainsi mesurez-vous l’importance des luttes de la chair contre l’esprit. Homélies sur la Genèse: VII – NAISSANCE ET SEVRAGE D’ISAAC Le premier jour.

Mais vous, si vous portez en vous « le fruit de l’Esprit qui est la joie, la charité, la paix, la patience », vous pouvez être Isaac, qui n’est pas né charnellement, mais est né en vertu de la promesse, -et vous êtes des fils de la femme libre, à condition toutefois que vous puissiez dire avec Paul : « Si nous marchons dans la chair, nous ne combattons pas selon la chair (car les armes avec lesquelles nous combattons ne sont pas charnelles, mais elles sont puissantes devant Dieu pour renverser des forteresses). Nous renversons les raisonnements et toute hauteur qui s’élève contre la science de Dieu ». Si vous pouvez être ceux à qui s’applique cette parole de l’Apôtre : « pour vous, vous ne vivez point dans la chair, mais dans l’Esprit, si du moins l’Esprit de Dieu habite en vous », à cette condition vous n’êtes pas nés selon la chair, mais selon l’esprit en vertu de la promesse, et vous êtes les héritiers des promesses, selon ce qui est dit : « héritiers de Dieu et cohéritiers du Christ. » Vous ne serez pas héritiers de celui qui est né selon la chair mais cohéritiers du Christ, car « si nous avons connu le Christ selon la chair, à présent, nous ne le connaissons plus ainsi ». Homélies sur la Genèse: VII – NAISSANCE ET SEVRAGE D’ISAAC Le premier jour.

– Cependant, à s’en tenir à ce qui est écrit, je ne vois point ce qui a poussé Sara à réclamer l’expulsion du fils de la servante. Celui-ci jouait avec son fils Isaac. Quel mal ou quel danger y avait-il ? On dirait qu’à cette époque déjà il ne pouvait pas être admis qu’un fils de servante jouât avec un fils de femme libre. Je m’étonne également que l’Apôtre ait déclaré que ce jeu était une persécution, quand il a dit : « Mais de même qu’alors celui qui était né selon la chair persécutait celui qui était né selon l’esprit, ainsi en est-il encore maintenant », – puisqu’aussi bien il n’est mentionné aucune persécution d’Ismaël contre Isaac, sauf cet unique jeu d’enfance. Homélies sur la Genèse: VII – NAISSANCE ET SEVRAGE D’ISAAC Le premier jour.

Précédemment, au cours d’une explication spirituelle, nous avons dit que Sara représentait la vertu. Par conséquent, si la chair, dont Ismaël, qui est né selon la chair, tient le rôle, enjôle l’esprit, qui est Isaac, et l’entraîne par de séduisantes tromperies, si elle l’attire par les plaisirs, si elle l’affaiblit par la volupté, il est bien normal qu’un pareil jeu de la chair avec l’esprit porte surtout atteinte à Sara, c’est-à-dire à la vertu, et que Paul traite semblables caresses de violente persécution. Homélies sur la Genèse: VII – NAISSANCE ET SEVRAGE D’ISAAC Le premier jour.

Ne songez pas, auditeurs, uniquement à cette persécution où le fanatisme des Gentils vous contraint d’immoler aux idoles ; mais, puisque vous êtes des fils de la vertu, si la volupté de la chair vous attire, si le charme du plaisir sensuel vous tente, fuyez-les comme une grande persécution. C’est en ce sens que l’Apôtre dit : « Fuyez la fornication. » De même, si l’injustice se fait attrayante et vous entraîne, par complaisance pour un « personnage puissant » que vous recevez, à ne pas avoir le jugement droit, vous devez comprendre que sous les dehors d’un jeu séduisant, vous êtes victimes de la part de l’injustice d’une persécution déguisée. Semblablement, pour chaque espèce de fautes, quels que soient les dehors agréables, attrayants ou pareils à des jeux, sous lesquels elles se présentent, pensez à la persécution que subit l’esprit, puisqu’aussi bien c’est la vertu qui est atteinte en tout cela. Homélies sur la Genèse: VII – NAISSANCE ET SEVRAGE D’ISAAC Le premier jour.

Quant à vous « qui êtes à la manière d’Isaac fils de la promesse », « buvez l’eau de vos sources, et que les eaux de vos puits ne se répandent pas au dehors, mais que vos eaux coulent sur vos places publiques ». Par contre, « celui qui est né selon la chair » boit l’eau de l’outre ; aussi l’eau lui manque et lui manque en grande quantité. Homélies sur la Genèse: VII – NAISSANCE ET SEVRAGE D’ISAAC Le premier jour.

Comment faire cadrer cela avec l’histoire ? En effet, où trouvons-nous qu’Agar ait eu les yeux fermés pour être ouverts par la suite ? En ce sujet, l’interprétation spirituelle et mystique n’est-elle pas plus claire que le jour ? Le peuple selon la chair a été rejeté et il a faim et soif, «non pas faim ni soif d’eau, mais soif de la parole de Dieu », jusqu’à ce que s’ouvrent les yeux de la synagogue. L’Apôtre dit de cela que c’est un « mystère », car, dit-il, « l’aveuglement est survenu à une partie d’Israël jusqu’à ce que la masse des Gentils soit entrée et qu’ainsi tout Israël soit sauvé ». Homélies sur la Genèse: VII – NAISSANCE ET SEVRAGE D’ISAAC Le premier jour.

Le voilà donc, chez Agar, l’aveuglement qui lui a fait enfanter selon la chair et qui demeure en elle jusqu’à ce « que le voile de la lettre soit ôté » par l’ange de Dieu et qu’elle voie l’« eau vive ». Car, à présent, les Juifs sont à côté du puits, mais leurs yeux sont fermés et ils ne peuvent boire au puits de la loi ni des prophètes. Homélies sur la Genèse: VII – NAISSANCE ET SEVRAGE D’ISAAC Le premier jour.

Comme s’il ne lui suffisait pas de dire « fils », il ajoute « très cher ». Passe ! Mais pourquoi ajouter encore : « Celui que tu aimes ? » C’est qu’il veut rendre l’épreuve plus pesante : par ces expressions de tendresse et d’affection plusieurs fois répétées, il ravive les sentiments paternels, pour qu’au souvenir vivace de son amour la main du père hésite à immoler le fils et que contre la foi de l’esprit toute l’armée de la chair entre en révolte. Homélies sur la Genèse: VIII – LE SACRIFICE D’ABRAHAM Le premier jour.

C’est pour que sur la route, chemin faisant, tout le long du trajet, il soit déchiré dans ses pensées, pour qu’il soit tourmenté tour à tour par le commandement qui le presse et par l’amour de son fils unique qui se révolte. C’est pour cela aussi qu’on lui impose le voyage et l’ascension de la montagne, c’est pour laisser le temps de s’affronter, au cours du trajet, l’affection paternelle et la foi, l’amour de Dieu et l’amour de la chair, l’attrait des biens présents et l’attente des biens futurs. Homélies sur la Genèse: VIII – LE SACRIFICE D’ABRAHAM Le premier jour.

Vous êtes ici, dans l’Église de Dieu, un grand nombre de pères à m’écouter. Voyons il y en a-t-il qui, au simple récit de cette histoire, aient acquis assez de fermeté et assez de force d’âme pour se proposer, au cas où la mort commune et inévitable leur ferait perdre un fils, ce fils fut-il unique et tendrement aimé, pour se proposer Abraham en exemple et se mettre sa générosité devant les veux ? On ne vous demande pas, il est vrai, le geste héroïque d’attacher vous-même votre enfant sur le bûcher, de le serrer, de préparer le glaive, d’écorcher votre fils unique. On ne réclame pas de vous tous ces offices. Du moins, ayez assez de résolution et de fermeté d’esprit pour offrir joyeusement, sans chanceler dans la foi, votre fils à Dieu. Soyez le prêtre de la vie de votre fils : un prêtre qui immole à Dieu ne doit pas pleurer. Voulez-vous être sûrs qu’on demande bien cela de vous ? Écoutez le Seigneur dans l’Évangile :« Si vous étiez les enfants d’Abraham, vous feriez les oeuvres d’Abraham. » Eh bien ! voilà une oeuvre d’Abraham. Faites donc les oeuvres qu’Abraham a faîtes, et sans tristesse, « car Dieu aime celui qui donne avec joie ». Et si vous êtes, pour Dieu, autant que lui disponibles, on vous dira à vous aussi : « Monte sur un endroit élevé, sûr la montagne que je te montrerai ; et là, offre-moi ton fils. » « Offre-moi ton fils », non pas dans les profondeurs de la terre ni dans une « vallée de larmes », mais sur les sommets de montagnes élevées. Montrez que votre foi en Dieu est plus forte que vos affections charnelles. Car, au rapport de l’Écriture, tout en aimant son fils Isaac, Abraham préféra l’amour de Dieu à l’amour de la chair ; ce n’est pas dans les entrailles de la chair qu’il aima, mais « dans les entrailles du Christ », c’est-à-dire dans les entrailles du Verbe de Dieu, de la vérité et de la sagesse. Homélies sur la Genèse: VIII – LE SACRIFICE D’ABRAHAM Le premier jour.

Le Christ est le « Verbe de Dieu », mais « le Verbe s’est fait chair ». Par conséquent, dans le Christ, il est une chose qui vient d’en haut et une autre qui vient de la nature humaine et du sein virginal. Or, le Christ souffre, mais c’est dans sa chair ; il subit la mort, mais c’est sa chair qui la subit, dont le bélier est ici la figure. Comme le disait Jean : « Voici l’Agneau de Dieu, voici celui qui ôte les péchés du monde. » Le Verbe au contraire, c’est-à-dire le Christ selon l’esprit, dont Isaac est l’image, est demeuré « dans l’incorruptibilité ». C’est pourquoi il est à la fois victime et grand prêtre. Car, selon l’esprit, il offre la victime à son père, et selon la chair, lui-même est offert sur l’autel de la croix. Il est également écrit de lui : « Voici l’Agneau de Dieu, voici celui qui ôte les péchés du monde », et : « Tu es prêtre pour l’éternité selon l’ordre de Melchisédech. » Homélies sur la Genèse: VIII – LE SACRIFICE D’ABRAHAM Le premier jour.

Si Abraham n’avait vécu que « dans la chair », s’il n’avait été le père que du peuple qu’il engendra dans la chair, il aurait suffi d’une seule promesse. Mais pour montrer qu’il devait être d’abord le père de ceux qui ont été circoncis dans la chair, il reçoit à l’époque de sa propre circoncision une promesse qui devait concerner le peuple de la circoncision. Puis, comme il devait être aussi le père de ceux qui « appartiennent à la foi » et entrent dans l’héritage par la Passion du Christ, il reçoit à nouveau, à l’époque de la passion d’Isaac, une promesse qui devait concerner, cette fois, le peuple sauvé par la Passion et la Résurrection du Christ. Homélies sur la Genèse: IX – SECONDES PROMESSES FAITES A ABRAHAM Le premier jour.

Aussi bien se dressent-ils contre nous et nous suscitent-ils luttes et combats. Et l’Apôtre du Christ de dire : « Nous n’avons pas à combattre seulement contre la chair et le sang, mais encore contre les princes, les puissances et les dominations de ce monde. » Il nous faut donc veiller et nous conduire avec précaution, « parce que notre adversaire, comme un lion rugissant, rôde autour de nous cherchant qui dévorer ». A moins que, « fermes dans la foi », nous ne lui résistions, il nous ramènera en captivité. Dans ce cas, ce serait, de notre part, méconnaître l’oeuvre de celui « qui a cloué sur sa croix les principautés et les puissances en triomphant hardiment d’elles en lui-même », et « qui est venu apporter la délivrance aux prisonniers ». En suivant au contraire la foi du Christ qui a triomphé d’elles, brisons les liens par quoi elles nous avaient enchaînés à leur puissance. Ces liens qui nous retiennent, ce sont nos passions et nos vices : ils nous retiennent aussi longtemps que « nous ne crucifions pas notre chair avec ses passions et ses convoitises », jusqu’à ce que « nous ayons brisé leurs liens et rejeté leur joug loin de nous ». Homélies sur la Genèse: IX – SECONDES PROMESSES FAITES A ABRAHAM Le premier jour.

Les chrétiens mangent tous les jours les chairs de l’agneau, c’est-à-dire qu’ils prennent chaque jour la chair de la parole divine. « Car le Christ, notre Pâque, a été immolé. » La loi de la Pâque prescrit que la pâque soit mangée le soir : aussi le Seigneur a-t-il souffert au soir du monde ; et vous qui vivez dans un soir continuel, jusqu’à ce que vienne le matin, vous ne devez pas cesser de manger de la chair de la parole (de carnibus verbi). Si, au cours de cette soirée, vous avez été vigilants, si durant votre vie vous vous êtes appliqués « aux jeûnes, aux pleurs » et à toutes les oeuvres de justice, vous pourrez dire, vous aussi : « Le soir, viennent les pleurs, et, le matin, l’allégresse. » Car vous vous réjouirez au matin, c’est-à-dire dans le siècle à venir, à condition que dans le siècle présent vous recueilliez, dans les pleurs et dans la peine, « les fruits de justice ». Homélies sur la Genèse: X – RÉBECCA Le premier jour.

Qu’en conclure ? Faut-il penser qu’un si grand patriarche sentait encore à cet âge les aiguillons de la chair ? Faut-il croire que celui qu’on nous a montré naguère éteint aux mouvements naturels, sente maintenant revivre en lui la passion ? Ou plutôt, comme nous l’avons souvent dit, les mariages des patriarches n’indiquent-ils pas quelque chose de mystique et de sacré, – comme ces paroles du Sage qui disait en parlant de la Sagesse : « J’ai songé à la prendre pour épouse » ? Homélies sur la Genèse: XI – ABRAHAM ÉPOUSE CÉTHURA – SÉJOUR D’ISAAC AU PUITS DE VISION Le premier jour.

C’est la façon la plus convenable, à mon avis, d’expliquer les noces des vieillards : oui, c’est à leur honneur que les patriarches ont contracté ces unions à un âge très avancé et presque défaillant, – et je pense qu’il faut également tenir compte des fils qu’ils ont engendrés. Pour des mariages de cette sorte et pour une descendance pareille, les jeunes gens sont moins bien faits que les vieillards. Car plus la chair est accablée, plus l’âme est résistante et propre aux embrassements de la Sagesse. Aussi est-il raconté dans les Écritures que le juste Helchana avait en même temps deux épouses ; l’une s’appelait Phennana et l’autre Anne, c’est-à-dire la conversion et la grâce. Et c’est de Phennana d’abord, c’est-à-dire de la conversion, que l’Écriture dit qu’il eut des enfants, et d’Anne, c’est-à-dire de la grâce, seulement par la suite. Homélies sur la Genèse: XI – ABRAHAM ÉPOUSE CÉTHURA – SÉJOUR D’ISAAC AU PUITS DE VISION Le premier jour.

Ainsi vous voyez cet autre peuple qui est en nous ; mais il est plus petit, tandis que le premier est plus grand. Les méchants sont toujours plus nombreux que les bons, et les vices que les vertus. Mais si nous ressemblons à Rébecca et si nous méritons de concevoir d’Isaac, c’est-à-dire du Verbe de Dieu, alors en nous aussi « un peuple dominera l’autre et le plus grand servira le plus petit », la chair servira l’esprit et les vices céderont le pas aux vertus. Homélies sur la Genèse: XII – RÉBECCA CONÇOIT ET ENFANTE Le premier jour.

Contemplez notre Isaac, celui « qui s’est offert en victime pour nous » : il vient dans la vallée de Gérare, dont le nom signifie « muraille » ou « barrière » ; il vient « renverser le mur de séparation, l’inimitié, dans sa chair » ; il vient enlever la barrière, c’est-à-dire le péché qui met une séparation entre nous et Dieu, cette barrière qui s’élève entre nous et les vertus célestes ; par là, « des deux peuples il n’en fait qu’un », et la brebis perdue, voici que « sur ses épaules » il la ramène jusqu’aux montagnes et la rend aux « quatre-vingt dix-neuf autres qui n’étaient pas perdues ». Homélies sur la Genèse: XIII – LES PUITS D’ISAAC Le premier jour.

Vous voulez encore voir une autre description de cette image ? Eh bien, il y a le billet que Dieu écrit et il y a celui que nous écrivons, nous. Écoutez l’Apôtre : « Détruisant l’acte qui était écrit contre nous dans les décrets et nous était contraire, il l’a fait disparaître en le clouant à la croix. » Cet acte dont il parle était un « reçu » de nos péchés. Car chacun de nous est débiteur de ses fautes et écrit le billet (de reconnaissance) de son péché. Au jugement de Dieu, que Daniel représente assis, il y a, dit-il, « des livres ouverts », pour contenir, sans doute, les péchés des hommes. C’est nous qui les avons écrits contre nous avec nos fautes. Et cela trouve une illustration dans l’Évangile, quand il est raconté de l’économe d’iniquité qu’il dit à chaque débiteur : « Prends ton billet, assieds-toi et écris : quatre-vingts » et la suite. C’est bien à chacun, n’est-ce pas, qu’il est dit : « Prends ton billet ». D’où il ressort que notre billet est un billet de péché ; tandis que le billet de justice, c’est Dieu qui l’écrit. En ce sens l’Apôtre dit : « Vous êtes ma lettre écrite, non avec de l’encre, mais par : l’Esprit de Dieu vivant, non sur des tables de pierre, mais sur des tables de chair, sur vos coeurs. » Vous avez donc en vous le billet de Dieu et le billet du Saint-Esprit. Mais si vous péchez, vous signez contre vous l’acte écrit du péché. Remarquez , que lorsque vous êtes venus à la croix du Christ et à la grâce du baptême, votre écrit a été crucifié et a été effacé dans l’eau du baptême. N’écrivez pas à nouveau ce qui a été effacé, ne rétablissez pas ce qui a été supprimé : ne gardez en vous que le billet de Dieu, ne conservez en vous que l’écriture du Saint-Esprit. Homélies sur la Genèse: XIII – LES PUITS D’ISAAC Le premier jour.

L’Apôtre Paul nous a indiqué deux figures en Isaac : la première est celle où il écrit qu’Ismaël, fils d’Agar, représente le peuple selon la chair, et Isaac le peuple selon la foi ; l’autre est celle où il écrit : « Il n’a pas dit : et à tes descendants, comme s’il s’agissait de plusieurs, mais : à ta descendance, comme ne parlant que d’un seul qui est le Christ ». Isaac est donc la figure à la fois du peuple et du Christ. Or il est bien certain que le Christ, comme Verbe (Parole) de Dieu, a parlé non seulement dans les Évangiles, mais aussi dans la Loi et dans les Prophètes. Homélies sur la Genèse: XIV – APPARITION DU SEIGNEUR A ISAAC – ALLIANCE AVEC ABIMÉLECH Le premier jour.

Mais on peut nier que ces paroles, où Dieu, sous l’apparence d’un témoignage de piété, marquait l’avenir, doivent être amenées à signifier une action répréhensible. Nous dirons alors que le vrai Joseph , Notre Seigneur et Sauveur, comme il mit ses mains de chair sur les yeux d’un aveugle et lui rendit la vue qu’il avait perdue, étendit de même ses mains spirituelles sur les yeux de la Loi qu’avait aveuglés l’intelligence charnelle des Scribes et des Pharisiens, et leur rendit la vue, en sorte que la vue et l’intelligence spirituelles de la Loi apparaissent à ceux pour qui le Seigneur ouvre les Écritures. Homélies sur la Genèse: XV – LES FRÈRES DE JOSEPH REMONTENT DE L’EGYPTE – JACOB APPREND QUE JOSEPH EST VIVANT Le premier jour.