Cassiano: sens

12. J’appelle “moine” l’homme qui, faisant violence à la nature, ne cesse de veiller sur ses sens, et dompte ses appétits déréglés. L’Échelle Sainte: PREMIER DEGRÉ

31. Ce n’est qu’avec beaucoup de peine et d’efforts, qu’au commencement de notre conversion nous pouvons pratiquer la vertu; mais aussitôt que nous y avons fait quelques progrès, nous avançons presque sans aucune difficulté; et, lorsque nous avons le bonheur de nous être rendus les maîtres des sens de notre corps, de les soumettre entièrement à la conscience, oh ! alors ce n’est plus qu’avec ardeur, joie, plaisir et allégresse, que nous nous livrons à la pratique des bonnes oeuvres; nous sommes tout embrasés du feu sacré de la charité. L’Échelle Sainte: PREMIER DEGRÉ

20. Reconnaissez vraiment pour père celui qui peut et qui veut vous décharger du poids énorme de vos péchés; et pour mère, la componction du coeur, capable de vous purifier de vos souillures; pour frères, ceux qui peuvent vous aider à obtenir les dons célestes, et travailler et combattre avec vous; pour épouse, qui vous soit indissolublement unie, la pensée constante de la mort; pour enfants uniquement chéris, les gémissements du coeur; pour esclaves, vos sens et votre chair; et pour amis, les légions célestes, lesquelles vous rendront d’autant plus de service à l’heure de votre mort, que pendant votre vie vous aurez plus pris de soin d’être et de vous conserver dans leur amitié. Telle est la sainte parenté de ceux qui cherchent sincèrement le Seigneur (cf. Ps 23,6). L’Échelle Sainte: TROISIÈME DEGRÉ

36. Je dis que le songe n’est autre chose qu’un mouvement et une agitation de l’esprit, pendant que les sens du corps sont assoupis. L’Échelle Sainte: TROISIÈME DEGRÉ

4. Cependant, il faut l’avouer, les commencements de cette mortification, ou plutôt de cette mort religieuse par laquelle il faut crucifier la volonté du coeur, les sens de la chair, sont accompagnés de beaucoup de travaux et de peines; les progrès qu’on fait dans l’obéissance, sont encore suivis de quelques sueurs et de quelques difficultés; mais enfin on se trouve délivré heureusement de toute sensation pénible et douloureuse, et l’on entre dans une paix et une tranquillité parfaites : car la seule peine qu’éprouve cet heureux homme d’obéissance, mort et vivant tout à la fois, c’est de connaître qu’il a suivi sa volonté en quelque chose : alors il craint d’avoir à répondre à Dieu de la détermination qu’il a prise de lui-même. L’Échelle Sainte: QUATRIÈME DEGRÉ

40. Or parmi ces hommes d’une éternelle mémoire, il y en avait un qui m’aimait beaucoup en Dieu, et qui me parlait avec une grande liberté. Il me dit donc un jour, avec une affection toute particulière : “Si vous, mon père, qui êtes si sage, éprouvez la force de celui qui, dans le ravissement de son coeur, s’écriait : Je peux tout en celui qui me fortifie (Phil 4.13); si l’Esprit saint est descendu en vous comme une rosée de grâces et de pureté, ainsi qu’il descendit autrefois dans la très sainte Vierge, et si la force du Très-Haut vous environne par la patience, ceignez vos reins, à l’exemple de l’Homme-Dieu, d’un linge blanc, qui est l’obéissance, et comme Lui, levez-vous de table, c’est-à-dire sortez de la solitude; afin de laver les pieds de vos frères dans l’eau pure de la componction et de la pénitence, ou plutôt jetez-vous à leurs pieds dans les sentiments de l’humilité la plus profonde; mettez à la porte de votre coeur des gardes qui ne s’endorment jamais, et qui ne soient jamais de connivence avec vos ennemis; arrêtez l’instabilité et la légèreté de votre esprit, en le fixant invariablement, malgré les distractions et la dissipation que lui causent sans cesse et l’agitation des affaires et les importunités des sens; conservez un repos parfait au milieu des mouvements et des soins dont la vie est continuellement agitée. Ici-bas; et, ce qui est encore plus rare, plus difficile et plus admirable, demeurez ferme et immobile dans le sein des troubles et des tempêtes qui se succèdent sans cesse. Liez votre langue par les chaînes d’un silence parfait, et empêchez-la de tomber dans des disputes hardies et dans des contradictions audacieuses; combattez soixante et dix sept fois le jour contre cette souveraine impérieuse et tyrannique; portez la croix de Jésus Christ dans votre coeur, et comme on enchâsse une enclume dans du bois, enchâssez de même votre esprit dans elle, de sorte qu’il soit capable de résister à tous les coups, à toutes les tentations, à tous les affronts, à toutes les calomnies, à toutes les railleries et à toutes les injustices qui pourront vous arriver, de manière à n’en être jamais ni blessé, ni offensé, ni agité, ni affligé, ni découragé, ni abattu, mais à persévérer immuablement dans la paix et dans le calme. Dépouillez-vous de votre volonté, comme d’un vêtement d’ignominie, et entrez ainsi tout nu dans la carrière céleste; et ce qui est certainement bien rare et bien difficile, soyez d’une confiance entière et inébranlable dans celui qui doit et veut vous couronner après la victoire, et qu’elle soit telle qu’elle ne puisse être pénétrée ni par les flèches du doute ni par les traits de la défiance. Mortifiez exactement vos sens par les austérités de la tempérance, et prenez bien garde que vous n’ayez à souffrir cruellement de leur fureur audacieuse et insolente. Servez-vous avantageusement de la méditation de la mort pour combattre et vaincre la curiosité de vos yeux, qui ne demandent sans cesse qu’à contempler la beauté des créatures sensibles. Faites en sorte de retenir l’indiscrétion et l’injustice de votre esprit, qui, tandis que vous vous livrez vous-même à la négligence la plus condamnable, vous porte à juger mal des actions et de la conduite de vos frères; et tâchez de le porter à exercer envers eux tous les devoirs d’une charité sincère. L’Échelle Sainte: QUATRIÈME DEGRÉ

2. La pénitence est le rétablissement du baptême. C’est une espèce de contrat par lequel nous promettons à Dieu de nous corriger des défauts de notre vie passée, et de mieux vivre dans l’avenir. La pénitence, si j’ose me servir de cette expression, est chargée des intérêts de l’humilité; c’est un renoncement parfait à tous les plaisirs des sens; c’est un jugement sévère qu’on porte contre soi-même; c’est l’occupation sérieuse d’une âme qui s’applique tout de bon à l’affaire de son salut éternel. Elle est la fille aînée de l’espérance et l’ennemie mortelle du désespoir. Le véritable pénitent est un criminel qui confesse ses péchés, sans mériter aucune infamie. La pénitence a la vertu de nous réconcilier avec Dieu, en nous faisant pratiquer les bonnes oeuvres opposées aux fautes que nous avons commises; c’est elle qui décharge, purifie et sanctifie la conscience; c’est elle qui nous porte à souffrir généreusement toutes les peines et toutes les afflictions qui nous arrivent. Celui qu’elle anime est d’une admirable activité pour trouver et pour employer les moyens capables de le punir; c’est elle qui combat et surmonte l’intempérance, et qui accuse sans ménagement au tribunal de la conscience. L’Échelle Sainte: CINQUIÈME DEGRÉ

52. Nous devons tous prendre garde, mais surtout nous qui sommes tombés dans le péché, de ne pas nous laisser empoisonner l’esprit et le coeur par l’erreur contagieuse d’Origène. Or la misérable doctrine de ce docteur sur l’excessive Bonté de Dieu pour les hommes, est goûtée et savourée par tous ceux qui ne se plaisent que dans les plaisirs grossiers des sens. L’Échelle Sainte: CINQUIÈME DEGRÉ

12. Efforcez-vous continuellement et par la mortification de vos sens, et par le recueillement de votre esprit, et par une profonde méditation, de vous représenter fortement cet abîme immense, cette fournaise embrasée par des flammes ténébreuses, ce juge sévère et inexorable, ce vaste chaos des feux éternels, ces descentes étroites et obscures de ces lieux souterrains, de ces maisons désespérantes et de ces gouffres profonds. Oui, gravez avec force dans votre esprit l’idée et l’image de toutes ces choses effrayantes, et d’autres semblables, afin que, si votre coeur se portait malheureusement à une vie molle et relâchée, frappé d’une juste terreur, il s’applique à se procurer une chasteté incorruptible, et que, par les sentiments d’une tristesse salutaire il puisse jouir des lumières spirituelles, et devenir plus pur et plus lumineux que les flammes les plus pures et les plus resplendissantes. L’Échelle Sainte: SEPTIÈME DEGRÉ

25. S’il est vrai que ceux qui sont portés aux plaisirs des sens et à la mollesse, non seulement se perdent eux-mêmes mais souvent perdent les personne, qui ont le malheur de s’attacher à eux et de les fréquenter il est également vrai que, comme un loup furieux, l’homme colère est capable de mettre le trouble dans toute une communauté et de perdre un grand nombre d’âmes. L’Échelle Sainte: HUITIÈME DEGRÉ

10. C’est un très mauvais interprète des saintes Écritures, que le souvenir des injures. Il ne sait expliquer les oracles sacrés du saint Esprit que selon ses goûts dépravés et son sens corrompu. Que la prière que notre Seigneur nous a enseignée couvre de confusion ceux qui ne se conduisent que par un mauvais docteur. EH ! Comment pourrait-on la réciter cette admirable prière, avec Jésus Christ et selon ses intentions, si la pensée des injures qu’on a reçues est gravée dans la mémoire ? L’Échelle Sainte: NEUVIÈME DEGRÉ

11. Voyons-nous que notre chair, par la chaleur de l’âge, ou par la force de notre constitution, veut se porter aux plaisirs des sens ? ne cessons de la châtier et de la mater en tout temps et en tout lieu par les rigueurs salutaires de la mortification; et ne nous relâchons pas de ces saintes austérités, que nous ne soyons fondés à croire par des preuves certaines et indubitables que nous avons eu le bonheur d’éteindre en nous les flammes impures de la concupiscence. Or je ne crois pas que nous y parvenions avant la mort. L’Échelle Sainte: QUATORZIÈME DEGRÉ

59. Tels devraient être du moins nos sentiments, lorsque nous entendons chanter les saints cantiques et quelque mélodies; car les personnes qui aiment Dieu avec ardeur, sont émues d’une allégresse toute céleste, d’une affection divine et d’une tendresse qui va jusqu’aux larmes, quand elles entendent une belle harmonie, soit qu’elle soit sacrée, soit même qu’elle soit profane. Ceux, au contraire, qui sont esclaves des plaisirs des sens, éprouvent des sentiments et des mouvements tout opposés. L’Échelle Sainte: QUINZIÈME DEGRÉ

76. Certains disent que ce sont les pensées qui prennent naissance dans le coeur, lesquelles portent le corps à des actions d’impureté. D’autres, au contraire, soutiennent que c’est par le moyen des organes et des sens du corps que les pensées sont excitées dans l’esprit. D’autres assurent que le corps ne fait qu’obéir à l’esprit, et le suit : enfin on en rencontre quelques autres qui, pour prouver que l’esprit est moins coupable que le corps, on plutôt que le corps est seul coupable, démontrent, autant qu’ils le peuvent, que très souvent les mauvaises pensées ne se glissent dans l’esprit que par la vue d’un objet agréable, d’une beauté qui frappe et éblouit, par de simples touchers de mains, par la bonne odeur des parfums qu’on respire, et par la douceur des sons qu’on entend. Pour moi, je prie très humblement dans le Seigneur, celui qui connaîtrait où en sont réellement les choses, de nous l’apprendre; car cette connaissance est très utile et même nécessaire à ceux qui ne veulent agir et ne se déterminer que par principe et avec certitude; mais elle est fort inutile à ceux qui ne désirent servir Dieu qu’avec simplicité de coeur. L’Échelle Sainte: QUINZIÈME DEGRÉ

1. Le sommeil est un certain état, une certaine passion de la nature produite par l’engourdissement des sens; c’est l’image de la mort. Le sommeil en lui-même est quelque chose d’unique; mais, ainsi que la cupidité, les causent qui le produisent, sont nombreuses; car, tantôt il vient de la nature même, tantôt du travail que supporte l’estomac, lequel digère difficilement les aliments qu’il a reçus, tantôt de la part des démons; quelquefois des austérités excessives dans le jeûne en sont la cause et le principe : dans ce dernier cas, c’est la nature qui, se sentant affaiblie, cherche à se soulager et à réparer ses forces. L’Échelle Sainte: DIX-HUITIÈME DEGRÉ

Un bon et véritable moine est celui dont l’esprit et le coeur ne s’élèvent jamais par des pensées et des sentiments de vanité, et dont les sens ne sont point émus par la vile et la présence des objets sensibles. L’Échelle Sainte: VINGT-DEUXIÈME DEGRÉ

Celui à qui la pratique de la vertu est devenue aussi naturelle et familière, qu’aux mondains et à ceux qui leur ressemblent, la jouissance corruptrice des plaisirs des sens. Celui qui ne cesse d’avoir l’oeil de son âme ouvert sur tous les mouvements de son coeur et sur toute sa conduite. L’Échelle Sainte: VINGT-DEUXIÈME DEGRÉ

Mais si nous voulons définir le discernement d’une manière générale et qui puisse tout renfermer et convenir à tout, nous dirons et qu’elle est et qu’elle doit être une lumière intérieure qui nous fait connaître avec certitude, en tout temps, en tout lieu et dans toutes nos actions, qu’elle est la sainte et adorable volonté de Dieu, et que ceux-là seuls la reçoivent qui sont purs dans leurs affections, dans leurs actions et dans leurs paroles. 2. Celui qui par l’esprit de Dieu a vaincu trois ennemis de son salut, vient bien facilement à bout de terrasser les cinq autres; mais celui qui néglige d’attaquer et de vaincre ces trois ennemis, ne peut compter sur aucune autre victoire. Le discernement est donc une conscience sans tâche, elle n’habite que dans ceux dont les sens sont purs et chastes. L’Échelle Sainte: VINGT-SIXIÈME DEGRÉ

56. Ce n’est pas sans raison que nos pères font consister la sainteté de la vie dans la pratique de l’humilité et de la tempérance, vertus qui, aux yeux des hommes, semblent être bien ordinaires et bien communes. En effet, la tempérance nous prive des plaisirs des sens, et l’humilité nous conserve dans cette privation et empêche aux voluptés charnelles de pousser en nous de nouveaux bourgeons. C’est pour la même fin que la pénitence a deux effets salutaires : elle efface en nous nos péchés, et nous fait acquérir l’humilité. L’Échelle Sainte: VINGT-SIXIÈME DEGRÉ

59. Les combats que nous livrent les démons, viennent de trois causes différentes : de notre amour pour les plaisirs, de notre orgueil et de l’envie qu’ils nous portent. Appelons heureux ceux qui sont les objets de l’envie des démons; mais disons qu’ils sont malheureux et bien malheureux, ceux qui se livrent à l’orgueil, et inutiles et vains, ceux qui sont esclaves des sens et attachés aux plaisirs de la chair. L’Échelle Sainte: VINGT-SIXIÈME DEGRÉ

33. Comme les choses qu’on n’a pas vues, donnent peu de désir de les posséder, quoiqu’on en ait entendu parler; de même celui qui a conservé son corps pur et chaste ne pense pas aux plaisirs des sens, et vit dans un grand contentement. L’Échelle Sainte: VINGT-SIXIÈME DEGRÉ

2. Le repos du corps, dont il s’agit ici, consiste dans la connaissance et l’arrangement de tous ses mouvements et de tous ses sens selon la raison éclairée et dirigée par la foi. Le repos de l’âme est la connaissance de ses opérations spirituelles et une application calme et inviolable au saint exercice de l’oraison. L’Échelle Sainte: VINGT-SEPTIÈME DEGRÉ

39. Les qualités, les occupations et les raisonnements des personnes qui, pour des raisons suffisantes, ont embrassé la vie solitaire, consistent dans le calme parfait de l’âme qui s’est mise à l’abri de toutes les tempêtes excitées par les vents des passions, dans des pensées saintes et pures, dans une intime union avec Dieu, dans un souvenir constant des supplices éternels, dans la pensée de la mort qui menace de près, dans un amour insatiable de la prière, dans la vigilance constante sur les sens, dans la ruine entière des affections déshonnêtes, dans l’affranchissement des appétits charnels, dans la mort à l’esprit et aux maximes du monde, dans l’indifférence pour le manger, dans la méditation des vérités surnaturelles dans les lumières d’un discernement sage et prudent dans le don des larmes d’une pénitence sincère, dans le retranchement absolu des discours vains et inutiles, et dans tout ce qui n’est pas agréable aux personnes qui ont coutume de vivre sans ordre et sans règle. L’Échelle Sainte: VINGT-SEPTIÈME DEGRÉ

2. Il est donc vraiment délivré et maître en même temps de tous les troubles et de toutes les agitations de son âme, l’homme qui a purifié sa chair de toute sorte de taches et de souillures, et qui, par ce moyen, l’a rendue, en quelque façon, incorruptible; qui a su élever ses affections et ses sentiments au dessus des choses créées, et soumettre tous ses sens à l’empire de la raison et de la foi; qui enfin, par une force surnaturelle, a pu placer son âme face à face devant Dieu et la lui consacrer avec une délicieuse confiance. L’Échelle Sainte: VINGT-NEUVIÈME DEGRÉ

8. Une âme possède réellement cette précieuse paix, lorsqu’elle est portée au bien et identifiée avec la vertu, comme les méchants sont portés au mal et absorbés dans les plaisirs des sens. L’Échelle Sainte: VINGT-NEUVIÈME DEGRÉ