C’est en vain qu’on dispute sur la fin d’un art ou d’une science, si l’on ne commence par entrer à plein coeur et de toutes ses forces dans les voies qui peuvent en livrer à fond le secret. Par exemple, j’affirme qu’il est possible d’extraire du froment une sorte de miel ou une huile très douce, analogue à celle des graines de rave ou de lin. Quelqu’un, dans l’assistance, n’a pas la moindre notion du fait. Il se récrie : «Ce que vous dites va contre la nature des choses; c’est un mensonge évident.» Et de me tourner en ridicule. Je produis des témoins sans nombre, qui affirment avoir vu de leurs yeux; ils ont goûté; ils ont eux-mêmes fabriqué de ces produits. J’explique en outre toute la série des transformations qui font passer la substance du froment à l’état de corps gras comme l’huile ou doux comme le miel. Il n’en persiste pas moins dans sa sotte persuasion, et s’obstine à nier que de ce grain il puisse rien sortir de sucré ou de gras. Ne faudra-t-il pas plutôt blâmer son opiniâtreté qui va contre toute raison, que contester ironiquement la vérité de mes paroles, appuyée comme elle est de témoignages nombreux fidèles, autorisés, de démonstrations évidentes, et qui plus est, prouvée par l’expérience ? Les Conférences: DEUXIÈME CONFÉRENCE DE L’ABBÉ CHEREMON CHAPITRE 8
De même, rien ne sert de se taire, si nous nous commandons le silence dans le dessein d’obtenir par son moyen ce qu’aurait fait l’injure; si nous y joignons de certains gestes hypocrites, qui jetteront dans une colère plus véhémente celui qu’il eût fallu guérir, et qui, pour comble, nous vaudront des louanges de sa ruine et de sa perdition. Comme si l’on ne devenait pas plus criminel encore par le fait même que l’on veut s’acquérir de la gloire de la perte d’un frère ! Mais, aussi bien, un tel silence sera-t-il mauvais à tous deux. Comme il augmente la tristesse au coeur du prochain, il ne permet pas qu’elle disparaisse du notre C’est à ceux qui agissent de la sorte que s’adresse tout spécialement la malédiction du prophète : «Malheur à qui mêle son fiel dans le breuvage qu’il sert à son ami, et qui l’enivre pour voir sa nudité ! Il s’est rassasié d’opprobre, au lieu de gloire.» (Hab 2,15-16). Et voici ce qu’un autre a dit de leurs pareils : «Le frère ne pense qu’à supplanter son frère, et l’ami use de tromperie contre son ami; l’homme se rira de son frère, et ils ne diront point la vérité,» (Jer 9,4-5) car «ils ont tendu leur langue comme un arc, afin de lancer le mensonge, et non la vérité.» (Jer 9,3). Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBÉ JOSEPH CHAPITRE 18
Nous avons fait une promesse en présence de tous les frères, dans la grotte sanctifiée par la royale et toute lumineuse naissance de notre Seigneur du sein de la Vierge, et nous l’avons pris lui-même à témoin. Si nous voulons y satisfaire, nous encourons le plus grave dommage spirituel. Mais si, oublieux de nos engagements, nous faisons passer le bien de notre perfection avant nos serments et demeurons dans ce pays, nous redoutons fort de tomber dans l’abîme du mensonge et du parjure. Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH CHAPITRE 5
Si vous croyez que votre vie spirituelle a plus à gagner, en demeurant ici, qu’elle ne faisait dans les conditions de votre monastère, et que vous ne pouvez remplir vos engagements, sans vous priver d’immenses avantages, mieux vaut affronter le mensonge, et ne pas tenir votre promesse. Ce dommage, une fois passé, ne reviendra plus; il ne sera pas, de lui-même, une source de péchés nouveaux. Tandis que de revenir à une vie tiède vous causerait un détriment quotidien et sans fin. On est pardonnable, mieux encore, on mérite des éloges, lorsqu’on change une résolution prise à la légère, si c’est pour embrasser an parti meilleur. Ce n’est pas manquer de constance, mais corriger sa témérité, due de redresser un engagement défectueux. Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH CHAPITRE 8
Qu’y a-t-il de plus blâmable que la ruse et le mensonge, même à l’égard d’un étranger, pour ne pas dire à l’égard d’un frère ou d’un père ? Néanmoins, le patriarche Jacob n’a encouru par là ni condamnation ni mensonge; bien plus, il a été enrichi pour jamais de l’héritage de la bénédiction. Et à juste titre : parce qu’il a convoité la bénédiction destinée au premier-né, non par la cupidité d’un avantage terrestre, mais par la foi qu’il avait d’être éternellement sanctifié. Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH CHAPITRE 12
L’un et l’autre recueillent de leur acte le fruit dû à la pensée qui les a inspirés, au dessein qui a mû leur volonté : car, ni le premier ne voulait tromper, ni le second procurer notre salut; et il est selon la justice de mesurer la récompense de chacun à ce qui fut dès l’origine dans sa pensée, et non pas à ce qui en est sorti par la suite de bien ou de mal contre sa volonté. Jacob ose un mensonge de cette nature; et le très juste juge le trouve excusable, mieux encore, digne d’éloge, par la raison qu’il ne pouvait obtenir autrement la bénédiction des premiers-nés, et qu’il n’y avait pas lieu de lui faire un crime d’un acte parti uniquement du désir de la bénédiction. Mais ce grand patriarche n’aurait pas seulement été injuste à l’égard de son frère; il aurait trompé son père et commis un sacrilège, si, ayant un autre moyen d’obtenir la grâce convoitée, il avait préféré celui-ci, qui était si fâcheux et dommageable pour Ésaü. Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH CHAPITRE 12
GERMAIN — Tout cela est parfaitement raisonnable; c’est le langage de la prudence. Et si nous ne regardions qu’à la force de vos discours, nous n’aurions pas de peine à lever le scrupule de notre promesse. Mais une chose nous effraye très fort. Notre exemple semblera fournir aux faibles une occasion de mentir, lorsqu’ils apprendront que l’on peut licitement déroger à la foi du serment. Il y a, pour interdire le mensonge, des paroles si graves et si menaçantes : «Vous perdrez tous ceux qui disent le mensonge»; (Ps 5,7) «La bouche qui ment donne la mort à l’âme »! (Sag 1,11) Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH CHAPITRE 15
JOSEPH — Les occasions et les causes de perdition ne manqueront jamais à ceux qui doivent, ou plutôt qui désirent se perdre. Il ne faut pas rejeter, ni rayer du corps des Écritures, les témoignages qui animent la perversité des hérétiques, endurcissent le juif dans son infidélité ou choquent l’enflure de la sagesse païenne; mais les croire religieusement, les tenir immuablement, les prêcher selon la vérité du sens littéral. Nous n’avons pas le droit, sous le beau prétexte de l’infidélité d’autrui, de renier les actions des prophètes et des saints racontées par l’Écriture. En croyant devoir condescendre à la faiblesse des incrédules, nous nous rendrions coupables de mensonge, et qui plus est, de sacrilège. Mais il faut les avouer telles que le récit les présente, et montrer comment il n’y a rien en elles que de pieux. Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH CHAPITRE 16
Aussi bien, nous ne fermerions pas la voie du mensonge à ceux qui ont la volonté mal tournée, en cherchant à nier la réalité des faits que nous allons citer, de ceux que nous avons cités déjà, ou à l’affaiblir par des explications allégoriques. En quoi l’autorité de ces textes pourrait-elle nuire à ceux qui ont assez, pour pécher, de leur volonté corrompue ? Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH CHAPITRE 16
Que les saints se sont servi utilement du mensonge, comme d’hellébore. Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH CHAPITRE 17
Il faut juger et user du mensonge, comme on ferait de l’hellébore. Pris sous la menace d’une maladie mortelle, ce remède sauve hors ce péril extrême, il cause la mort sur-le-champ. Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH CHAPITRE 17
Des saints, des hommes très agréables à Dieu se sont servi utilement du mensonge; et ce faisant, loin de tomber, dans le péché, ils parvinrent à la justice la plus éminente. Mais si l’artifice a pu leur conférer la gloire, que leur eût apporté, au contraire, la vérité, sinon la condamnation ? Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH CHAPITRE 17
Telle fut Rahab. L’Écriture ne fait mémoire à son sujet d’aucune vertu, mais seulement de son impudicité. Cependant, plutôt que de livrer les espions de Josué, elle les cache par un mensonge : pour cela seul, elle mérite d’être agrégée au peuple de Dieu, dans une bénédiction éternelle. Or, supposez qu’elle eût préféré dire la vérité, et pourvoir au salut de ses concitoyens. Il est clair à tous les yeux qu’elle n’eût pas échappé, avec toute sa maison, à la mort suspendue sur sa tête; elle n’aurait pas pris rang parmi les ascendants du Seigneur; elle n’était point comptée sur la liste des patriarches; elle ne méritait, point de donner le jour, par les générations sorties de son sein, au Sauveur du monde. Voyez, en effet, Dalila. Elle prend les intérêts de ses concitoyens, et trahit la vérité qu’elle a réussi à connaître : son sort est la perte éternelle, et elle ne laisse à l’humanité que le souvenir de son crime. Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH CHAPITRE 17
Lors donc qu’il y a grave péril à déclarer la vérité, il faut se résigner à recourir au mensonge, non sans éprouver toutefois, dans l’intime de sa conscience, un humble remords. Mais, ce cas d’extrême nécessité mis à part, évitons-le comme un poison mortel. Nous le disions tout à l’heure de l’hellébore : salutaire, lorsqu’on le prend sous le coup d’une maladie sans espoir, son énergie fatale se saisit, au contraire, des parties vitales avec une promptitude foudroyante, si la santé est entière et sans altération. Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH CHAPITRE 17
Le patriarche Jacob dirigeait ainsi ses regards vers la fin de son acte; et c’est pourquoi il n’a pas craint de simuler les dehors velus de son frère, en s’enveloppant de peaux, ni d’acquiescer au désir de sa mère, qui l’incitait à ce mensonge. Il voyait qu’il gagnerait plus à ce prix en bénédiction et justice, qu’il n’eût fait en gardant la simplicité. Cette tache, il n’en doutait point, allait être immédiatement lavée par l’effusion de la bénédiction paternelle, et, comme un léger nuage, tôt absorbée par le souffle de l’Esprit saint : en sorte que cette simulation affectée lui vaudrait plus de mérites que son amour inné de la vérité. Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH CHAPITRE 17
Objection : Ceux-là seulement ont usé du mensonge impunément, qui vécurent sous la Loi. Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH CHAPITRE 18
Nous croyons qu’il en va de même pour le mensonge. De quelque religion qu’il se colore, qui l’oserait maintenant ne serait digne ni d’approbation ni d’excuse, alors que le Seigneur déclare : «Que votre discours soit : Cela est, cela n’est pas. Ce qui est en plus vient du Malin.» (Mt 5,37). Et l’Apôtre se fait l’écho de sa pensée : «Ne vous mentez pas les uns aux autres.» (Col 3,9). Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH CHAPITRE 18
Pour le mensonge, au contraire, le texte de l’Ancien Testament montre assez qu’il était, même alors, condamné : «Nous perdrez, est-il dit, tous ceux qui disent le mensonge;» (Ps 5,7) et de nouveau : «Le pain du mensonge est doux à l’homme; mais ensuite sa bouche est remplie de gravier.» (Pro 20,17). Le législateur Lui-même dit : «Tu fuiras le mensonge.» (Ex 23,7). Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH CHAPITRE 19
Répondez-moi, je vous prie. Qu’auriez-vous fait, vous qui vivez sous l’Évangile, si vous vous étiez trouvés en pareil cas ? Auriez-vous préféré aussi les cacher par un mensonge, en disant comme elle : «Ils ont passé, après avoir bu un peu d’eau,» et accomplir ainsi le précepte : «Délivre ceux que l’on traîne à la mort, et sauve ceux que l’on va égorger, n’épargne rien;» (Pro 24,11) oui bien, en disant la vérité, les livrer à leurs meurtriers ? Et que faites-vous de cette parole de l’Apôtre : «Que personne ne cherche son propre avantage, mais celui d’autre ?» (1 Cor 10,24). Et de celle-ci : «La charité ne cherche pas son intérêt mais celui des autres »? (Phil 2,4). Il dit encore de lui-même: «Je ne cherche pas mon avantage, mais celui du plus grand nombre, afin qu’ils soient sauvés.» (1 Cor 10,33) Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH CHAPITRE 19
Si nous poursuivons notre intérêt et voulons retenir opiniâtrément ce qui nous est avantageux : même en des cas aussi urgents, il nous faudra dire la vérité. Mais si, satisfaisant au commandement de l’Apôtre, nous préférons le bien des autres à notre avantage personnel, il nous faudra sans aucun doute en passer par le mensonge. Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH CHAPITRE 19
Les Apôtres ont pensé que le mensonge était parfois utile, et la vérité nuisible. Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH CHAPITRE 20
Instruits par les faits que nous avons rappelés, le bienheureux apôtre Jacques et tous les principaux chefs de la primitive Église exhortent l’apôtre Paul à descendre jusqu’aux artifices et à la simulation, afin de ménager la pusillanimité des faibles. Ils l’engagent à se soumettre aux purifications d’usage sous la loi, à se raser la tête et à offrir des voeux. Le préjudice inhérent à cette feinte ne compte pas à leurs yeux; ils n’ont égard qu’aux avantages qui résulteront du long apostolat d’un tel homme. Il n’aurait pas tant gagné, en effet, à se retrancher dans la stricte rigueur des principes, que sa mort immédiate n’eût causé de tort aux Gentils. Tort qui frappait infailliblement toute l’Église, si cette feinte utile et salutaire ne l’eût conservé pour la prédication de l’Évangile. On est excusable de consentir au dommage qui résulte du mensonge, il y a même nécessité de le faire, lorsque, comme nous l’avons dit, la vérité en causerait elle-même un plus grand, sans que, l’avantage qu’elle comporte suffise à le compenser. Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH CHAPITRE 20
Il est si vrai que ce n’est pas tant l’acte qui compte que les dispositions de celui qui agit, qu’il se trouve des cas où la vérité a nui, et le mensonge profité. Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH CHAPITRE 20
Le voilà donc, parce qu’il a déclaré la vérité, arraché pour toujours de cette terre où Rahab, la courtisane, se voit établir avec sa parenté à cause de son mensonge. Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH CHAPITRE 20
Il nous souvient également que Samson a livré pour son plus grand malheur à une épouse criminelle la vérité qu’il lui avait longtemps tenue cachée par le mensonge. Pour l’avoir si imprudemment révélée, il fut pris au piège : il avait négligé d’observer le commandement du prophète : «Tiens ta bouche fermée à celle qui dort sur ton sein.» Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH CHAPITRE 20
Si l’on nous interroge sur notre abstinence, jusque là demeurée secrète, faut-il éviter le mensonge et la publier ? Faut-il accepter ce que l’on avait d’abord refusé ? Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH CHAPITRE 21
GERMAIN. — Pour le premier exemple, il ne nous paraît pas douteux qu’il ne faille cacher notre abstinence, plutôt que de la faire connaître à qui nous interroge; et dans ce cas, nous avouons aussi que le mensonge est inévitable. Mais quant au second, nulle nécessité pour nous de mentir. D’abord, nous pouvons refuser ce que notre frère nous offre, sans nous lier par aucun engagement. Ensuite, après avoir refusé, libre à nous de rester immuables dans notre sentiment. Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH CHAPITRE 22
Il en allait d’autre sorte avec nos anciens. Ces hommes, à la foi de qui des miracles renouvelés des Apôtres ont rendu témoignage, agissaient en tout par jugement et discernement, plutôt que par obstination. À leurs yeux, ceux qui condescendaient aux faiblesses d’autrui, faisaient de plus grands fruits que ceux qui s’obstinaient dans leurs résolutions. Ils ont aussi prononcé que c’était la marque d’une vertu plus sublime, de cacher son abstinence par un nécessaire, mais humble mensonge, que de la révéler en disant orgueilleusement la vérité. Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH CHAPITRE 23
Voici encore une chose que je me souviens d’avoir vu faire sans hésitation à nos anciens. Était-il nécessaire, pour l’instruction des jeunes, de parler en conférence des merveilles qu’ils avaient opérées et de leurs propres actions, ils avaient coutume de les mettre sous un autre nom. Comment ne pas voir là un mensonge manifeste ? Cependant, plût au ciel qu’il y eût dans notre vie quelque fait qui valût la peine d’être proposé aux jeunes, pour exciter leur foi ! Nous ne redouterions certes pas d’imiter leurs pieuses feintes. Mieux vaut mentir, en recourant à cet artifice de langage, que de cacher mal à propos ce qui peut édifier les auditeurs, ou de tomber dans une vaine et fatale jactance, afin de rester, en dépit de la raison, fidèle à la vérité. Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH CHAPITRE 24
Il nous est impossible de tout parcourir, même brièvement. Qui suffirait à énumérer les patriarches — il faudrait les nommer tous ! — et les innombrables saints qui, soit pour sauver leur vie, soit dans le désir d’obtenir une bénédiction, par un sentiment de miséricorde ou en vue de tenir caché quelque secret, les uns par zèle de Dieu, les autres afin de découvrir la vérité, ont, si j’ose ainsi dire, pris sur eux de patronner le mensonge ? Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH CHAPITRE 25
S’il ne les avait effrayés par ce miséricordieux mensonge, il n’aurait pu revoir son père et son jeune frère, ni les nourrir au milieu d’une disette si terrible, ni enfin laver la conscience de ses frères du crime qu’ils avaient commis en le vendant. Et, par conséquent, il mérite moins d’être repris, pour leur avoir inspiré la crainte à l’aide d’un mensonge qu’il n’est saint et digne d’éloge, pour avoir amené à un salutaire repentir, grâce à ces feintes menaces, des gens qui étaient ses ennemis et qui l’avaient vendu. Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH CHAPITRE 25
Parlerai-je encore de Salomon ? Dès son premier jugement, il manifeste le don de sagesse qu’il a reçu de Dieu, en faisant un mensonge. Pour dégager la vérité cachée par le mensonge d’une femme, il a lui-même recours à un mensonge extrêmement habile : «Apportez-moi une épée, et partagez en deux l’enfant vivant, et donnez-en la moitié à l’une et la moitié à l’autre.» Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH CHAPITRE 25
On dira : Il prévoyait leur conversion, et c’est précisément pour les amener à la pénitence qu’il a menacé leur cité de la ruine. — Il suit alors que ceux qui commandent aux frères peuvent menacer, si besoin est, les délinquants de peines plus rigoureuses qu’ils ne sont disposés à en infliger, sans encourir le reproche de mensonge. Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH CHAPITRE 25
Paphnuce était certain de la pureté de sa conscience. Il fit néanmoins comme s’il se reconnaissait coupable du larcin, se soumit entièrement à la satisfaction qu’on en voudrait tirer, et supplia humblement qu’on le reçût à la pénitence. Il épargnait par ce moyen sa pudeur et sa modestie. Fallait-il donc essayer de se laver de cette flétrissure ? Mais c’eût été donner à croire qu’au vol il ajoutait le mensonge; car personne ne pouvait soupçonner autre chose que ce que l’enquête avait révélé. Les Conférences: CONFÉRENCE DE L’ABBA PIAMUN CHAPITRE 15
Si cependant il m’arrive de proférer quelque parole qui paraisse déroger à l’humilité ou marquer une ouverture excessive, je vous prie de ne l’attribuer point à la jactance, mais au seul désir de vous édifier. Vous voudrez bien croire que, si j’estime ne devoir rien cacher de la vérité à des hommes qui la cherchent si ardemment, ce n’est pas orgueil, mais charité. Aussi bien, je pense que mes paroles pourront vous être de quelque instruction, si, mettant un peu l’humilité de côté, je vous découvre simplement et dans toute sa vérité le propos qui fut le mien. Ainsi, j’ai la confiance que ma franchise ne me vaudra pas de votre part la note de vanité, et je m’assure aussi que je n’encourrai pas le reproche de mensonge, pour avoir étouffé la vérité. Les Conférences: CONFÉRENCE DE L’ABBA JEAN CHAPITRE 3
D’ailleurs, lorsque les saints, fidèles observateurs du commandement de leur Roi, répètent journellement : Remets-nous nos dettes, ou bien ils disent vrai, et donc personne n’est sans faute, ou c’est une feinte, et dans ce cas, il est encore véritable qu’ils ne sont pas exempts du péché de mensonge. Les Conférences: TROISIÈME CONFÉRENCE DE L’ABBA THÉONAS CHAPITRE 18
De même, lorsque l’esprit immonde dit : Je sortirai, et je serai un esprit de mensonge dans la bouche de tous ses prophètes (Ibid., 22,22), il tend évidemment ses pièges du côté de la partie raisonnable, qu’il sait ouverte à ses embûches meurtrières. Les Conférences: CONFÉRENCE DE L’ABBA ABRAHAM CHAPITRE 17