pleonexia
L’Apôtre les énumère dans le passage suivant . «Mortifiez, dit-il, les membres de l’homme terrestre, la fornication, l’impureté, la luxure, toute convoitise mauvaise, et la cupidité, qui est une idolâtrie.» (Col 3,5). Les Conférences: DEUXIÈME CONFÉRENCE DE L’ABBÉ CHEREMON
Remarquez le dernier de tous, la cupidité. Les Conférences: DEUXIÈME CONFÉRENCE DE L’ABBÉ CHEREMON
L’Apôtre, en le citant, veut nous instruire sans aucun doute à rejeter tout désir du bien d’autrui; mieux encore, à mépriser d’un coeur magnanime nos biens propres, comme nous lisons, dans les Actes, que fit la multitude des fidèles : «La multitude des fidèles n’avait qu’un coeur et qu’une âme, nul ne disait sien ce qu’il possédait, mais tout était commun entre eux… Tous ceux qui possédaient terres ou maisons, les vendaient et en, mettaient le prix aux pieds des apôtres; on le distribuait ensuite à chacun, selon qu’il en avait besoin.» (Ac 4,32-34). Et, pour que l’on ne croie pas que cette perfection reste l’apanage du petit nombre, il atteste que la cupidité est une idolâtrie. Rien de plus juste. Ne pas secourir l’indigent dans ses nécessités; faire passer les préceptes du Christ après son argent, que l’on conserve avec la ténacité de l’infidèle : c’est bien tomber en effet dans le crime de l’idolâtrie, puisque l’on préfère à la charité divine l’amour d’une chose créée. Les Conférences: DEUXIÈME CONFÉRENCE DE L’ABBÉ CHEREMON
Que chacun s’anime d’ailleurs à sa conquête du même désir, du même amour, de la même impatiente ardeur qui se voient chez l’avare dévoré de la cupidité, chez l’ambitieux que possède la soif des honneurs, chez l’homme emporté par la violence intolérable d’une passion mauvaise. Brûlé d’un insatiable désir de la perpétuelle intégrité, il méprisera la nourriture, même désirable; la boisson, même nécessaire, lui donnera de l’aversion; il repoussera enfin le sommeil même qu’il doit à la nature, ou du moins ne le prendra qu’avec une âme toute saisie de crainte et en défiance contre un ennemi si perfide de la pureté, un adversaire si déclaré de la chasteté. Les Conférences: DEUXIÈME CONFÉRENCE DE L’ABBÉ CHEREMON
Qui n’admirerait en soi les oeuvres du Seigneur, lorsqu’il voit l’instinct de la gloutonnerie et la recherche dispendieuse autant que fatale des plaisirs de la bouche si parfaitement étouffés, qu’à peine prend-il encore à de rares intervalles et comme malgré soi une chétive et grossière nourriture ? Qui ne demeurerait saisi de stupeur devant les ouvrages de Dieu, en constatant que le feu de la volupté, qu’il considérait auparavant comme inhérent à la nature et en quelque sorte impossible à éteindre, s’est tellement refroidi en lui, qu’il n’éprouve plus dans sa chair le moindre mouvement, fut-ce le plus innocent ? Comment n’admirer pas avec tremblement la vertu divine, lorsqu’on voit des hommes cruels jadis et farouches, que même la soumission la plus insinuante exaspérait jusqu’au comble de la fureur, devenus des anges de douceur, tellement que, loin qu’ils s’émeuvent de l’injure, leur magnanimité souveraine va jusqu’à s’en réjouir ? Qui s’étonnerait devant les oeuvres de Dieu et s’écrierait du fond de son coeur: «J’ai connu que le Seigneur est grand,» (Ps 134,5) lorqu’il se voit lui-même, ou quelque autre, passé de l’extrême cupidité à la libéralité, de la prodigalité à une vie d’abstinence, de la superbe l’humilité, faisant succéder aux délicatesse et à la recherche un extérieur négligé et hirsute, embrassant volontairement la pénurie et la détresse et y plaçant sa joie ? Les Conférences: DEUXIÈME CONFÉRENCE DE L’ABBÉ CHEREMON
Qu’y a-t-il de plus blâmable que la ruse et le mensonge, même à l’égard d’un étranger, pour ne pas dire à l’égard d’un frère ou d’un père ? Néanmoins, le patriarche Jacob n’a encouru par là ni condamnation ni mensonge; bien plus, il a été enrichi pour jamais de l’héritage de la bénédiction. Et à juste titre : parce qu’il a convoité la bénédiction destinée au premier-né, non par la cupidité d’un avantage terrestre, mais par la foi qu’il avait d’être éternellement sanctifié. Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH
C’est donc une vérité certaine, que, de tous les vices, l’envie est le plus dangereux et le plus difficile à guérir : puisque les remèdes qui amortissent les autres, l’excitent davantage. Tel se plaint d’avoir souffert quelque dommage : la libéralité lui offre une compensation, et le voilà content. Cet autre se révolte de injure qu’on lui fait : une humble satisfaction l’apaise. Mais que faire avec un homme qui s’offense précisément de vous voir et plus humble et plus doux ? Si c’était la cupidité, qui allumât sa colère, les présents l’adouciraient; si c’était une blessure d’amour-propre ou le désir de la vengeance, les caresses et les prévenances sauraient en venir à bout. Mais c’est uniquement le succès, la félicité d’autrui qui l’irrite. Qui donc, pour satisfaire un envieux, souhaitera de déchoir de son bonheur, de ne plus connaître la prospérité, d’être la victime de quelque calamité ? Les Conférences: CONFÉRENCE DE L’ABBA PIAMUN