De la fin du cénobite et de celle de l’ermite. Les Conférences: CONFÉRENCE DE L’ABBA JEAN
Pour les autres vertus du désert, je les passerai sous silence. Notre dessein n’est pas d’en considérer le nombre infini, mais d’examiner quelle est la fin de l’ermite et celle du cénobite. Je vous expliquerai donc brièvement les raisons qui m’ont déterminé à quitter la solitude, puisque c’est aussi ce que vous désirez savoir, et quelles vertus plus sublimes j’ai cru devoir préférer à tout le fruit que l’on y fait. Les Conférences: CONFÉRENCE DE L’ABBA JEAN
GERMAIN. — Il est manifeste pour nous que vous n’avez pas seulement effleuré, comme beaucoup, les premiers degrés de ces deux vies, mais que vous vous êtes élevé jusqu’à leurs cimes. Aussi désirons-nous savoir de vous la fin du cénobite et celle de l’ermite. Personne assurément n’est plus capable de traiter ce sujet d’une manière exacte à la fois et complète, que celui qu’une longue pratique et les leçons de l’expérience ont rendu parfait en l’une et l’autre profession, et propre à en exposer le mérite et la fin en toute doctrine et vérité. Les Conférences: CONFÉRENCE DE L’ABBA JEAN
La fin du cénobite est de mortifier et crucifier toutes ses volontés, et, conformément au salutaire précepte de la perfection évangélique, de ne songer aucunement au lendemain. Personne assurément, hormis lui seul, ne peut réaliser cet idéal. Et c’est de lui que le prophète Isaïe trace cette peinture, le proclamant bienheureux et le comblant d’éloges : «Si tu t’abstiens de voyager le jour du sabbat et de faire ta volonté au jour qui m’est consacré; si tu l’honores, en ne suivant pas tes voies, en ne faisant point ta volonté et en ne disant point de paroles vailles : alors, tu trouveras tes délices dans le Seigneur, et Je l’élèverai sur les hauteurs du pays, et Je te donnerai, pour te nourrir, l’héritage de ton père Jacob. La bouche du Seigneur a parlé.» (Is 58,13-14). Les Conférences: CONFÉRENCE DE L’ABBA JEAN
Eussent-ils réalisé pleinement l’idéal de leur profession, ce n’est pas là encore la perfection intégrale et de tous points consommée, mais une partie seulement de la perfection. Que celle-ci est rare, et combien peu nombreux ceux à qui Dieu l’accorde par un don gratuit ! Celui-là est parfait véritablement, et non pas seulement en partie, qui sait supporter avec une égale grandeur d’âme, et l’horreur de la solitude, dans le désert, et les faiblesses de ses frères, dans le monastère. Mais il est bien difficile de trouver quelqu’un qui soit parfaitement consommé en l’une et l’autre profession : parce que l’anachorète n’arrive point tout à fait au mépris et au dénuement des choses matérielles; ni le cénobite, à la pureté de la contemplation. Les Conférences: CONFÉRENCE DE L’ABBA JEAN