Cassiano: ardeur

Que si elles ne réussissent pas encore à étancher la soif qui vous consume, sept autres Conférences, que je dois envoyer aux saints des îles Stoechades [NT: Les îles d’Hyères.], apaiseront, je l’espère, l’ardeur de vos désirs. Les Conférences: PRÉFACE 1

Les leçons d’une expérience que nous avons pu nous-mêmes vérifier, sans parler d’indices et de preuves certaines, nous rendront cette vérité plus manifeste. Maintes fois, il arrive que nous souhaitons d’exécuter quelque utile dessein; rien ne manque à l’ardeur de nos désirs, et la bonne volonté non plus ne nous fait pas défaut. N’est-il pas vrai pourtant que la moindre défaillance, venant à la traverse, rend inutiles les voeux que nous avons formés et empêche le bon effet de nos résolutions, si le Seigneur, en sa miséricorde, ne nous donne la force de les accomplir ? La multitude est innombrable de ceux qui désirent loyalement se consacrer à la poursuite de la vertu; mais, si vous comptez ceux qui réussissent à réaliser leur rêve et à persévérer dans leurs efforts, que vous en trouverez peu ! Les Conférences: TROISIÈME CONFÉRENCE DE L’ABBÉ CHEREMON CHAPITRE 6

Ainsi, Dieu éprouve notre foi, pour la rendre et plus forte et plus glorieuse. Le centurion de l’Évangile nous en est un exemple. Le Seigneur, assurément, savait qu’il pouvait guérir son serviteur par la puissance de sa parole; il aime mieux offrir d’y aller de sa personne : «J’irai, et le guérirai» (Mt 8,7). Mais l’autre, dans l’ardeur grandissante de sa foi, s’élève au-dessus de cette offre ; il s’écrie — «Seigneur, je ne suis pas digne que tu entres sous mon toit; mais dites seulement une parole, et mon serviteur sera guéri» (Ibid. 8). Et le Seigneur d’admirer. Il le couvre d’éloges, et le préfère à tous ceux qui avaient cru du peuple d’Israël : «En vérité, je vous le dis, je n’ai pas trouvé une telle foi en Israël» (Ibid. 10). Mais il n’aurait ni gloire ni mérite, si le Christ n’avait fait qu’exalter en lui ses propres dons. Les Conférences: TROISIÈME CONFÉRENCE DE L’ABBÉ CHEREMON CHAPITRE 14

Tantôt il inspire le commencement du salut et met en chacun l’ardeur de la bonne volonté; tantôt il donne de passer aux actes et de parvenir à la consommation des vertus. Il nous sauve d’une ruine prochaine, d’une chute rapide, à notre insu et sans notre aveu; il ménage les occasions de salut et les circonstances favorables ; il empêche les efforts les plus violents et les plus emportés d’aboutir, les desseins de mort de se réaliser. Les uns courent vers lui d’un volontaire élan : il les accueille. Les autres lui résistent : il les tire malgré eux, et les amène de force à la bonne volonté. Les Conférences: TROISIÈME CONFÉRENCE DE L’ABBÉ CHEREMON CHAPITRE 18

Les avis et la doctrine du bienheureux Joseph nous parurent un oracle de Dieu. Rassurés désormais, nous décidâmes de rester en Égypte. Cependant, bien que notre promesse nous donnât très lors peu de souci, nous ne laissâmes pas de l’accomplir, après sept ans écoulés. Nous fîmes alors un rapide voyage à notre monastère, et d’ailleurs avec la ferme confiance d’obtenir congé de retourner au désert. Cette visite nous permit d’abord de rendre à nos supérieurs l’honneur que nous leur devions. De plus, telle était l’ardeur de leur affection, que nos lettres d’excuse, si fréquentes qu’elles fussent, n’avaient pas réussi à calmer leurs esprits : nous eûmes le bonheur de voir refleurir la charité d’autrefois. Enfin, pleinement délivrés du scrupule que nous avait laissé notre engagement, nous reprîmes le chemin du désert de Scété; et eux-mêmes se firent une joie de nous accompagner. Les Conférences: SECONDE CONFÉRENCE DE L’ABBA JOSEPH CHAPITRE 30

C’est, dis-je, auprès de ce bienheureux Jean que l’ardeur d’un zèle pieux, amenait le jeune Théonas. Il apportait quelques religieuses offrandes, mêlé au nombre des possesseurs de la terre qui rivalisaient d’empressement, pour faire présent au bon vieillard de la dîme ou des prémices de leurs récoltes. Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA THÉONAS CHAPITRE 1

Poussé par la grâce divine, il se mit énergiquement en devoir d’exécuter sa résolution, sans laisser s’attiédir par le moindre retard l’ardeur de ses désirs. Sur-le-champ, il se dépouille de ses biens, et vole au monastère. Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA THÉONAS CHAPITRE 9

J’admirais, dit-il, que l’ardeur de votre zèle vous eût permis de différer jusqu’à sept jour la solution du problème que m’aviez soumis. Se pouvait-il que vous accordiez à votre créancier un délai si considérable ? D’autant qu’il ne l’avait pas demandé. Les Conférences: DEUXIÈME CONFÉRENCE DE L’ABBA THÉODOSE CHAPITRE 1

Aux gens de cette sorte, le Seigneur adresse justement ce reproche : Voici, vous tous qui allumez un feu et vous environnez de flammes, marchez dans l’ardeur de votre feu et dans les flammes que vous avez allumées (Is 50,11); et encore : Celui qui allume le mal, y périra (Prov 19,9). Les Conférences: TROISIÈME CONFÉRENCE DE L’ABBA THÉONAS CHAPITRE 9

Pour vous, si vous brûlez d’un amour véritable et parfait pour notre Seigneur, et suivez Dieu, qui est charité (cf. 1 Jn 4,16), avec une ferveur entière, fuyez en tels lieux inaccessibles qu’il vous plaira, les hommes fatalement vous y viendront trouver; et plus l’ardeur du divin amour vous mettra près de Dieu, plus grande sera la multitude des saints qui affluera vers vous. C’est la parole du Christ : Une ville située sur une montagne ne peut être cachée (Mt 5,14). Ceux qui M’aiment, dit le Seigneur, Je les glorifierai; mais ceux qui Me méprisent seront sans honneur (1 Rois 2,30). Les Conférences: CONFÉRENCE DE L’ABBA ABRAHAM CHAPITRE 19

C’est que tout homme est prisonnier dans les liens de ses péchés (Prov 5,22); et le prophète lui dit : Voici : vous tous qui allumez un feu et vous environnez de flammes, marchez dans l’ardeur de votre feu et dans les flammes que vous avez allumées (Is 50,11). Salomon aussi nous en est témoin : On est toujours puni par où l’on a péché (Sag 11,17). Les Conférences: CONFÉRENCE DE L’ABBA ABRAHAM CHAPITRE 24

De vrai, c’est la foi qui fait éviter la souillure du vice par crainte du jugement futur et des éternels supplices; c’est l’espérance qui rappelle notre esprit des choses présentes et, dans l’attente des célestes récompenses, méprise tous les plaisirs du corps; c’est la charité qui, nous enflammant d’une sainte ardeur à l’amour du Christ et à cueillir le fruit des vertus spirituelles, nous inspire une aversion suprême pour tout ce qui leur est contraire. Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA CHEREMON CHAPITRE 6

Efforçons-nous donc avec une ardeur entière de monter de la crainte à l’espérance, de l’espérance à la charité de Dieu et à l’amour des vertus. Allons nous établir dans l’affection du bien pour lui-même, et demeurons-y attachés immuablement, autant qu’il est possible à l’humaine nature. Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA CHEREMON CHAPITRE 7

Que chacun s’anime d’ailleurs à sa conquête du même désir, du même amour, de la même impatiente ardeur qui se voient chez l’avare dévoré de la cupidité, chez l’ambitieux que possède la soif des honneurs, chez l’homme emporté par la violence intolérable d’une passion mauvaise. Brûlé d’un insatiable désir de la perpétuelle intégrité, il méprisera la nourriture, même désirable; la boisson, même nécessaire, lui donnera de l’aversion; il repoussera enfin le sommeil même qu’il doit à la nature, ou du moins ne le prendra qu’avec une âme toute saisie de crainte et en défiance contre un ennemi si perfide de la pureté, un adversaire si déclaré de la chasteté. Les Conférences: DEUXIÈME CONFÉRENCE DE L’ABBÉ CHEREMON CHAPITRE 4

Là s’arrêta le discours de l’abbé Cheremon sur la chasteté parfaite; telle fut la conclusion qu’il donna à son admirable doctrine sur la pureté la plus sublime. Si grande cependant était notre stupeur, que nous restions comme oppressés. Mais lui, voyant que la plus grande part de la nuit était déjà passée, nous conseilla de ne point dérober à la nature le sommeil qu’elle réclame, de crainte que la torpeur du corps n’alanguît l’âme à son tour, et ne lui fit perdre sa vigoureuse et sainte ardeur. Les Conférences: DEUXIÈME CONFÉRENCE DE L’ABBÉ CHEREMON CHAPITRE 16

Mais il est utile et séant à chacun, selon l’état de vie qu’il a choisi ou la grâce qu’il a reçue, de se hâter en toute ardeur et diligence vers l’achèvement de l’oeuvre entreprise. Il pourra bien louer et admirer les vertus des autres. Mais qu’il ne sorte point pour cela de la profession qu’il a lui-même une fois embrassée, sachant que, suivant l’Apôtre, le corps de l’Église est un, mais les membres plusieurs, et qu’elle a «des dons différents, selon la grâce qui nous a été donnée : soit de prophétie, pour l’exercer conformément à la règle de la foi; soit de ministère, pour l’exercer dans les fonctions du ministère. Si quelqu’un a reçu le don d’enseigner, qu’il enseigne ! d’exhorter, qu’il exhorte ! Que celui qui donne, le fasse en simplicité; celui qui préside, en diligence; celui qui pratique la miséricorde, avec une aimable gaieté !» (Rom 12,6-8). Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBÉ NESTEROS CHAPITRE 5

Je sens que vous avez le zèle de la lecture. Conservez-le; et de toute votre ardeur, hâtez-vous de posséder au plus tôt la plénitude de la science pratique, c’est-à-dire morale. Sans elle, la pureté de la contemplation, dont nous parlions naguère, demeure hors de nos prises. Ceux-là seulement qui sont devenus parfaits, non certes par l’effet de la parole de leurs maîtres, mais par la vertu de leurs propres actions, l’obtiennent, pour ainsi dire, en récompense, après l’avoir payée de bien des oeuvres et des labeurs. Ce n’est pas dans la méditation de la loi qu’ils acquièrent l’intelligence, mais comme le fruit de leurs travaux. Ils chantent avec le psalmiste : «Par vos commandements m’est venue l’intelligence.» (Ps 118,104). Ils s’écrient, pleins de confiance, après avoir éliminé, toute passion : «Je chanterai des psaumes et j’aurai l’intelligence dans le chemin de l’innocence.» (Ps 100,1-2). Car celui-là comprend, tandis qu’il psalmodie, les paroles qu’il chante, qui marche dans les voies de l’innocence par le privilège d’un coeur pur. Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBÉ NESTEROS CHAPITRE 9

Prenez garde avant tout et vous particulièrement, Jean, que votre jeunesse engage plus encore à observer ce que je vais dire de commander à votre bouche le plus complet silence, si vous ne voulez pas qu’un vain élèvement rendent inutiles et votre ardeur à la lecture et vos labeurs pleins de saints désirs. C’est ici le premier pas dans la science pratique : recevoir les enseignements et les décisions de tous vos anciens d’une âme attentive, mais la bouche en quelque sorte muette; les déposer avec soin dans votre coeur, et vous empresser à les accomplir, plutôt qu’à faire le docteur. Au lieu des prétentions funestes de la vaine gloire, vous verrez se multiplier les fruits de la science spirituelle. Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBÉ NESTEROS CHAPITRE 9

Sur ceux qui paraissent avoir quelque semblant de science, ou qui, tout en s’adonnant avec ardeur à lire les volumes sacrés et à les apprendre de mémoire, ne quittent point les vices de la chair, les Proverbes ont cette expression fort heureuse : «Comme d’un anneau d’or au nez d’un pourceau, ainsi en va-t-il de la beauté dans une femme de mauvaise vie.» (Pro 11,22). Car quel avantage pour l’homme de posséder les joyaux des célestes paroles et les beautés sans prix de l’Écritures, s’il s’enlise dans la boue par ses oeuvres et ses pensées ? Ne semble-t-il pas alors fouiller une terre immonde, y mettre en pièces ses trésors et les souiller dans le bourbier fangeux de ses passions impures ? La science est parure à qui en use bien. Mais que le sort est différent de ceux qui la profanent de cette sorte ! Dans leur fange, qu’elle fait encore plus profonde, elle se couvre d’éclaboussures à son tour. Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBÉ NESTEROS CHAPITRE 16

Aussi bien, nous en avons connu beaucoup dans notre profession qui, après s’être liés, par amour pour le Christ, de la plus chaude amitié, n’ont pas su la conserver toujours sans rupture. Le principe de leur union était bon; mais ils ne firent point paraître une égale et même ardeur à tenir le propos qu’ils avaient embrassé. Leur affection fut de celle qui ne dure qu’un temps, parce qu’elle ne vivait pas d’une vertu pareille chez l’un et l’autre, mais ne se soutenait que par la patience d’un seul. Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBÉ JOSEPH CHAPITRE 3

Tel fut le discours tout spirituel que le bienheureux Joseph nous fit sur le sujet de l’amitié; et il nous enflamma d’une plus vive ardeur à garder toujours l’amour qui nous unissait l’un à l’autre d’un si intime commerce. Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBÉ JOSEPH CHAPITRE 28

La première chose que vous devez apprendre, c’est l’exorde et les commencements de notre profession, comment elle a pris naissance et de qu’elle source elle tire son origine. On pénètre plus efficacement les principes de l’art auquel on aspire, et l’on conçoit aussi une ardeur plus vive à l’exercer, lorsqu’on a reconnu la dignité de ceux qui en furent les auteurs et fondateurs. Les Conférences: CONFÉRENCE DE L’ABBA PIAMUN CHAPITRE 4

Tant que le petit nombre de ceux qui demeuraient alors au désert, nous laissa la liberté de nous perdre en ses immenses solitudes; aussi longtemps qu’une retraite plus profonde nous rendit possible d’être ravis fréquemment en ces célestes transports; tant que la multitude des visites ne fut pas venue nous charger de soins et d’embarras infinis, par la nécessité de pourvoir aux obligations de l’hospitalité : j’ai embrassé d’un désir insatiable et d’une ardeur sans réserve le secret tranquille de la solitude, et cette vie comparable à la béatitude des anges. Les Conférences: CONFÉRENCE DE L’ABBA JEAN CHAPITRE 5

Il répondait en alléguant la condition de l’humaine nature, combien fragile, combien incertaine ! Quel péril à s’engager dans les désirs et les oeuvres de la chair ! Il ajoutait qu’il n’était loisible à personne, de mettre comme une frontière entre soi et le bien que l’on avait reconnu infiniment digne d’être embrassé. Puis, il y avait plus de danger à mépriser le bien connu, qu’à ne pas l’aimer inconnu. Lui-même, n’était-il pas déjà sous la prévarication, dès là qu’ayant découvert des biens si magnifiques et si célestes, il leur en avait préféré de terrestres et de sordides ? Les grandeurs de la perfection convenaient à tout âge, à tout sexe; tous les membres de l’Église étaient invités à gravir les hauteurs des vertus les plus sublimes : Courez, avait dit l’Apôtre, afin de remporter le prix. (1 Cor 9,24). Les retards des apathiques et des lâches ne devaient point retenir la prompte ardeur des enthousiastes. N’était-ce pas le droit, que l’avant-garde entraînât les paresseux, plutôt que de voir sa course entravée par leur poids mort ? Au surplus, sa résolution était prise, de renoncer au siècle et de mourir au monde, afin de vivre à Dieu; et s’il ne pouvait obtenir ce bonheur, de passer avec sa compagne dans la société du Christ, il aimait mieux être sauvé avec un membre de moins, et entrer mutilé dans le royaume des cieux, plutôt que d’être damné avec son corps entier. Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBA THÉONAS CHAPITRE 9

Cependant, après la trêve que votre bienveillance vient de me concéder si royalement, je ne veux pas non plus apporter de retard à payer ma dette. Soin fort agréable pour moi, en vérité ! Car les richesses que nous donnons de la sorte se multiplient entre nos mains; elles enrichissent celui qui les reçoit, sans que celui qui en fait largesse se trouve appauvri. Le dispensateur de la doctrine spirituelle fait double gain, en effet : au profit de l’auditeur, s’unit l’avantage personnel, qu’il obtient à parler; en instruisant les autres, il s’enflamme non moins lui-même au désir de la perfection. Ainsi, votre ardeur est cause pour moi de progrès; et votre sollicitude, de componction. Mon âme, elle aussi, resterait abîmée dans la torpeur, et ne songerait à rien de ce que vous réclamez, si votre feu, votre attente ne l’excitaient de son sommeil au souvenir des choses spirituelles. C’est donc le moment, s’il vous plaît, d’énoncer le problème dont la brièveté du temps nous avait persuadés naguère de remettre la solution. Les Conférences: DEUXIÈME CONFÉRENCE DE L’ABBA THÉODOSE CHAPITRE 1