philotimia
Mais c’est trop demander à l’humaine fragilité. Les efforts dépensés en pareille rencontre demeurent nécessairement vains. Il est impossible, en effet, qu’un seul homme brille à la fois dans toutes les vertus énumérées plus haut. Avec une pareille ambition, voici ce qui arrive : tandis que l’on court après toutes, on n’en atteint parfaitement aucune; et de ce changement et de cette inconstance, on a plus de dommage que de profit. Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBÉ NESTEROS
Si vous désirez, vous aussi, garder inviolable votre amitié, hâtez-vous d’expulser vos vices et de mortifier vos volontés propres; puis, n’ayant plus qu’une même ambition, un même idéal, accomplissez vaillamment l’oracle qui comblait de délices l’âme du prophète : «Qu’il est bon, qu’il est doux pour des frères d’habiter ensemble !» (Ps 67,7). Ce qui doit s’entendre, non de ceux qui habitent en un même lieu, mais de ceux qui vivent dans un même esprit. Il ne sert de rien d’être unis dans une habitation commune, si l’on est séparé par la vie et par le but que l’on se propose; au contraire, pour ceux qui sont également fondés en vertu, la distance des lieux ne constitue pas un obstacle. Devant Dieu, c’est l’unité de conduite, et non point celle des lieux, qui fait habiter les frères dans une même demeure; et la paix ne se conservera jamais entière, où les volontés sont divergentes. Les Conférences: PREMIÈRE CONFÉRENCE DE L’ABBÉ JOSEPH
Mais, soit qu’ils n’apportent au service de leur ambition qu’une âme pusillanime, dans une entreprise qui exige une force peu commune, soit que la seule nécessité les ait contraints à la profession monastique, ils se montrent aussi empressés à se parer du nom de moine, que peu disposés à en imiter la vie. Ils n’ont cure de la discipline cénobitique, ni de s’assujettir à l’autorité des anciens, ou d’apprendre d’eux à vaincre leurs volontés; nulle formation régulière, point de règle dictée par une sage discrétion. Mais c’est pour le public seulement qu’ils renoncent et à la face des hommes. Ou ils restent dans leurs demeures particulières, et, couverts par le privilège d’un nom glorieux, s’embarrassent des mêmes soins que devant. Ou bien ils se construisent des cellules, les décorent du nom de monastères, mais pour y vivre selon leur guise et en complète liberté. L’Évangile commande : Ne vous laissez prendre, ni par le souci du pain quotidien, ni par les embarras d’une fortune. Mais ils ne consentent point à courber la tête sous ce joug. Ceux-là seulement rempliront le précepte, sans les hésitations d’une âme infidèle, qui se dégagent entièrement des biens de ce monde, puis se soumettent aux supérieurs des communautés cénobitiques, jusqu’à faire profession de ne s’appartenir plus soi-même. Tels ne sont pas les sarabaïtes. Fuyant, comme on l’a dit, l’austérité cénobitique, ils habitent à deux ou trois dans des cellules. Leur moindre désir est d’être gouvernés par les soins et l’autorité d’un abbé. Bien au contraire, ils font leur principale affaire de rester libres du joug des anciens, afin de garder toute licence d’accomplir leurs caprices, de sortir, d’errer où il leur plaît, de faire ce qui les flatte. Chose curieuse, il arrive même qu’ils travaillent plus que les cénobites; mal contents d’y passer le jour, ils y donnent encore la nuit. Mais non pas dans les mêmes pensées de foi ni avec le même but. Ce qu’ils en font, n’est point du tout pour abandonner le fruit de leur travail à la libre disposition d’un économe, mais pour gagner de l’argent et le mettre en réserve. Les Conférences: CONFÉRENCE DE L’ABBA PIAMUN
Tel est le corps de mort qui fait obstacle à leur ambition, lorsque, jaloux d’imiter la sainteté des anges et désireux d’adhérer constamment au Seigneur, ils ne réussissent point à rencontrer un si grand bien, mais font le mal qu’ils ne veulent pas, emportés qu’ils sont, même par l’esprit, vers des choses qui n’intéressent ni le progrès ni la consommation des vertus. Les Conférences: TROISIÈME CONFÉRENCE DE L’ABBA THÉONAS