Aux Catéchumènes sur le Nunc dimittis de Siméon

L’explication qu’appelle ce texte ne doit pas être indigne de Dieu. Siméon, homme saint et agréable à Dieu vivait, dit l’Évangile, dans l’attente de la consolation d’Israël. Or l’Esprit saint l’avait assuré qu’il ne mourrait pas avant d’avoir vu le Christ du Seigneur. Quel bien fut-ce pour lui de voir le Christ ? Pouvait-il faire tant de cas de cette promesse de voir le Christ, sans qu’il dût lui en revenir quelque fruit ? ou bien cette assurance ne recèle-t-elle pas plutôt un don conforme à la grandeur divine et que l’heureux Siméon eût obtenu par ses mérites ?

Une femme touche la frange du vêtement de Jésus et se trouve guérie. Si cette femme obtient un tel résultat pour n’avoir touché que le bord d’un vêtement, quel profit (spirituel) dût être celui de Siméon pour avoir reçu l’enfant dans ses bras, avoir pu l’y serrer et trouver une grande joie dans la pensée que le petit enfant qu’il portait ainsi, était celui qui venait libérer les enchaînés et le délivrer lui-même de ses liens corporels ! Il savait que personne ne pouvait faire sortir quelqu’un de la prison du corps avec l’espoir de la vie future, si ce n’est Celui-là même qu’il tenait dans ses bras. Aussi dit-il : Maintenant, Seigneur, tu renvoies ton serviteur en paix.

Tant que je ne tenais pas le Christ, tant que je ne le serrais pas dans mes bras, j’étais prisonnier, incapable de sortir de mes chaînes. – Cela n’est pas vrai seulement de Siméon, mais encore de tout le genre humain. Si quelqu’un sort du monde, si quelqu’un est renvoyé à la Maison pour quitter cette prison où tiennent tous les enchaînés, s’il veut passer de la captivité au règne, qu’il prenne Jésus dans ses bras, qu’il l’y serre étroitement, qu’il le prenne tout entier sur son cœur ; alors il connaîtra la joie et pourra aller où le désire son cœur.

Considérez l’importance des dispositions qui ont préparé Siméon à mériter de tenir le Fils de Dieu. Il avait d’abord reçu du Saint-Esprit l’assurance qu’il ne mourrait pas avant d’avoir vu le Christ du Seigneur. Puis, ce n’est point par pur hasard qu’il est entré au temple : c’est conduit par l’Esprit de Dieu qu’il y vint. Tous ceux qui sont conduits par l’Esprit de Dieu, sont fils de Dieu. Donc l’Esprit-Saint le conduisit au temple. Toi, aussi, si tu veux tenir Jésus, le serrer dans tes bras et mériter de sortir de prison, efforce toi d’avoir l’esprit pour guide et de venir sous sa conduite au temple de Dieu. Voici maintenant que tu te trouves dans le temple du Seigneur Jésus, je veux dire dans son Église, dans le temple construit de pierres vives. Tu te tiendras dans le temple du Seigneur, quand ta vie se passera d’une manière digne de l’Église. Si tu viens au temple, conduit par l’Esprit, tu y trouveras l’enfant Jésus, tu relèveras dans tes bras et tu diras : Maintenant, Seigneur, tu renvoies en paix ton serviteur suivant ta promesse. Et remarque bien que la paix est jointe à cette libération, à ce congé. Car il ne dit pas : je veux être renvoyé, mais, je veux être renvoyé en paix. C’est la même promesse qu’avait reçue le bienheureux Abraham : Mais toi tu iras en paix retrouver tes pères. Qui peut mourir en paix sinon celui qui possède la paix de Dieu, cette paix qui dépasse toute sensation et qui garde le cœur de qui la possède ? Qui se retire de ce monde en paix sinon celui qui comprend que dans le Christ Dieu se réconcilie le monde, et qui, n’ayant aucune hostilité à l’égard de Dieu, agit toujours dans un esprit de paix et de concorde ? Celui-là, comme Abraham, est envoyé en paix vers ses ancêtres. Que dis-je : vers ses ancêtres ? Bien plutôt vers le souverain maître des patriarches, vers Jésus dont il est écrit : Mieux vaut mourir et être avec le Christ. Il possède Jésus celui qui peut dire : Déjà je ne vis plus, c’est le Christ Jésus qui vit en moi. Donc, pour que, nous tenant dans le temple, serrant le Fils de Dieu dans nos bras, nous soyons dignes de recevoir notre congé, dignes de partir vers une vie meilleure, prions Dieu Tout-puissant prions aussi l’enfant Jésus lui-même, puisque c’est lui que nous désirons prendre dans nos bras, à qui nous désirons parler. A lui revient la gloire et l’empire dans tous les siècles. Amen.