ange (Orígenes)

Du Diable et de ses anges, ainsi que des puissances contraires, la prédication ecclésiastique a enseigné l’existence, mais elle n’a pas exposé assez clairement leur nature et leur manière d’être. On trouve cependant chez beaucoup l’opinion que le Diable a été un ange et que, devenu apostat, il a convaincu de nombreux anges de le suivre dans son éloignement : c’est pourquoi ces derniers sont appelés jusqu’à maintenant ses anges. Traité des Principes: Préface

Si le terme bon est appliqué par les Écritures à d’autres êtres, que ce soit un ange, un homme, un serviteur, un trésor, si elles parlent d’un coeur bon ou d’un arbre bon, tout cela est dit au sens large, car il y a là bonté accidentelle, non substantielle. C’est un travail considérable, pour une autre oeuvre et pour un autre temps, de rassembler toutes les dénominations du Fils de Dieu, par exemple celles de Vraie Lumière, de Porte, de Justice, de Sanctification, de Rédemption et un très grand nombre d’autres, et d’exposer les causes, les valeurs, les sentiments qui les font appliquer au Fils. Mais nous nous contentons de ce que nous avons discuté plus haut et nous passons aux sujets qui suivent. Traité des Principes: LIVRE I: Premier traité (I, 1-4): Seconde section

Étant donné que le prophète s’est ainsi exprimé, qui pourrait en entendant : Tu as été le sceau de la ressemblance et une couronne éclatante dans les délices du paradis de Dieu, et : Depuis le jour où tu as été créé avec les Chérubins, je t’ai placé sur la montagne sainte de Dieu, interpréter largement son sens au point de penser que cela a été dit d’un homme ou d’un saint quelconque, pour ne pas parler d’un prince de Tyr ? Qui pensera ce que sont ces pierres de feu au milieu desquelles aura pu se tenir un homme ? Comment comprendre ce personnage immaculé depuis le jour de sa création, chez qui on a trouvé dans la suite des injustices, de sorte qu’il a été projeté à terre ? Cela signifie qu’il est dit de lui qu’il ne se trouvait pas sur la terre, puisqu’il a été projeté à terre, en souillant ses sanctuaires. Ces paroles de la prophétie d’Ézéchiel sur le prince de Tyr sont à rapporter à une puissance adverse comme nous l’avons montré : elles manifestent très clairement que cette puissance était auparavant sainte et bienheureuse, qu’elle est tombée de cette béatitude quand on a trouvé en elle l’iniquité, qu’elle a été précipitée sur la terre et qu’elle n’était pas mauvaise par sa nature et sa création. Nous pensons donc que tout cela concerne un ange qui avait reçu en office le gouvernement de la nation des Tyriens et qui avait aussi, semble-t-il, la charge de leurs âmes. De quelle Tyr s’agit-il et comment comprendre les âmes des Tyriens ? Faut-il y voir la ville située dans la province de Phénicie ou une autre ville dont celle que nous connaissons sur cette terre est la figure ? Les âmes des Tyriens sont-elles les âmes des Tyriens d’ici-bas ou de ceux qui sont les habitants de cette autre Tyr entendue spirituellement ? Ce n’est pas ici le moment de le rechercher, pour ne pas paraître traiter ainsi en passant des réalités si profondes et si cachées, qui exigent assurément un travail et des efforts particuliers. Traité des Principes: LIVRE I: Second traité (I, 5-8): Première section

Je pense qu’il faut raisonner pareillement à propos des anges et ne pas juger fortuit qu’à tel ange ait été attribué tel office, par exemple à Raphaël la charge de soigner et de guérir, à Gabriel la surveillance des guerres, à Michel le soin des prières et des supplications des mortels. Il n’y a pas à penser qu’ils aient mérité ces fonctions autrement que par leurs mérites, leur zèle et les vertus qu’ils ont manifestées avant l’organisation de ce monde. C’est alors que, dans l’ordre des archanges, tel ou tel genre d’office a été attribué à chacun ; d’autres ont mérité d’être inscrits dans l’ordre des anges et d’agir sous l’autorité de tel ou tel archange, de tel ou tel chef ou prince de son ordre. Tout cela, nous l’avons dit, ne s’est pas produit fortuitement et sans discernement, mais a été ordonné par un jugement de Dieu très adapté et très juste et disposé en fonction des mérites selon son jugement et avec son approbation : de telle sorte qu’à cet ange a été confiée l’Église des Ephésiens, à cet autre celle des Smyrniotes, cet ange est devenu celui de Pierre et cet autre celui de Paul; et ainsi de suite, à chacun des plus petits qui sont dans l’Église a été attribué tel ou tel ange, de ceux qui voient chaque jour la face de Dieu, mais aussi celui qui doit être l’ange qui entoure de tous côtés ceux qui craignent Dieu. Il ne faut pas songer que tout cela se soit produit par hasard et fortuitement, ni que ces anges aient été faits tels par nature, pour ne pas accuser en cela aussi le Créateur de partialité : la décision est intervenue selon les mérites et les vertus, selon la vigueur et les talents de chacun, par le très juste et très impartial gouverneur de l’univers, il faut le croire. Traité des Principes: LIVRE I: Second traité (I, 5-8): Deuxième section

L’Évangile dit des intendants déshonnêtes qu’ils seront coupés en deux et qu’une partie d’eux sera mise parmi les infidèles, comme si cette partie qui ne leur serait pas propre serait à mettre ailleurs : il indique sans aucun doute la manière dont sont châtiés ceux dont, à ce qu’il me semble, l’esprit est représenté comme devant être séparé de l’âme. Si cet esprit est à comprendre comme étant de nature divine, c’est-à-dire l’Esprit Saint, nous penserons que cela est dit du don de l’Esprit Saint : donné soit par le baptême, soit par la grâce de l’Esprit – puisqu’à quelqu’un est donnée la parole de sagesse ou la parole de connaissance ou d’un autre don quel qu’il soit -, s’il n’a pas été bien administré, qu’il ait été enfoui dans la terre ou enfermé dans un mouchoir, le don de l’Esprit sera assurément ôté à l’âme, et la partie qui restera, c’est-à-dire la substance de l’âme, est mise avec les infidèles, coupée et séparée de cet esprit avec lequel elle aurait dû se joindre au Seigneur pour être un seul esprit avec lui. Si cela n’est pas à entendre de l’Esprit de Dieu, mais de la nature de l’âme elle-même, ce qui est dit sa partie supérieure est ce qui a été fait à l’image de Dieu et à sa ressemblance, et l’autre partie est celle qu’elle a assumée dans la suite à cause de la chute du libre arbitre, contrairement à la nature de sa création première et de sa pureté première : c’est cette partie en tant qu’elle est amie de la matière corporelle et aimée d’elle qui sera punie en recevant le sort des infidèles. On peut enfin comprendre en un troisième sens cette division : chacun des fidèles, même le plus petit dans l’Église, est assisté par un ange selon l’Écriture, et le Sauveur rapporte que cet ange voit toujours la face de Dieu le Père; cet ange, qui ne faisait en quelque sorte qu’un avec celui qu’il gouvernait, lui est ôté par Dieu d’après ce qui est dit, si son pupille s’en rend indigne par sa désobéissance; et alors la partie, c’est-à-dire la partie de nature humaine, arrachée de sa partie divine, est envoyée avec les infidèles, parce qu’elle n’a pas gardé fidèlement les avertissements de l’ange qui lui avait été attribué par Dieu. Traité des Principes: Livre II: Cinquième traité (II, 10-11): Seconde section

Il faut voir maintenant selon les Écritures comment les puissances contraires et le diable lui-même combattent le genre humain, le provoquant et l’incitant au péché. D’abord le Livre de la Genèse rapporte que le serpent séduisit Eve ; dans l’Ascension de Moïse, livre que mentionne dans son épître l’apôtre Jude, l’archange Michel se disputant avec le diable au sujet du corps de Moïse dit que ce serpent, inspiré par le diable, fut cause de la prévarication d’Adam et d’Eve. Mais certains se demandent aussi quel est l’ange qui du ciel parle à Abraham en ces termes : Maintenant je sais que tu crains Dieu et que tu n’as pas épargné ton fils bien-aimé, que tu aimais, à cause de moi. Il est écrit clairement qu’il s’agit d’un ange, qui dit savoir alors qu’Abraham craignait Dieu et n’avait pas épargné son fils bien-aimé, comme l’Écriture le dit, mais il n’a pas déclaré (qu’Abraham avait fait cela) pour Dieu, mais pour lui, c’est-à-dire pour celui qui parlait ainsi. Il faut se demander aussi de qui parle l’Exode quand il est dit que ce personnage voulut tuer Moïse parce qu’il partait pour l’Egypte. Mais ensuite quel est l’ange dit exterminateur et celui qui est appelé dans le Lévitique apopompaeus, c’est-à-dire celui qui emporte, et dont l’Écriture dit : Un sort pour le Seigneur et un sort pour l’apopompaeus – c’est-à-dire pour celui qui emporte. Mais dans le premier Livre des Rois il est écrit qu’un esprit très mauvais suffoquait Saul. Dans le troisième Livre des Bois, le prophète Michée dit : J’ai vu le Dieu d’Israël siégeant sur son trône et toute la milice du ciel se tenait autour de lui à sa droite et à sa gauche. Et le Seigneur dit: Qui trompera Achab, roi d’Israël, pour qu’il monte et tombe à Ramot de Galaad. Et celui-ci parla ainsi et celui-là parla ainsi. Mais un esprit sortit (de la foule), se tint devant le Seigneur et dit: Je le tromperai. Et le Seigneur lui dit: Comment ? Il répondit: J’irai et je serai un esprit menteur dans la bouche de tous ses prophètes. Le Seigneur lui dit: Tu le tromperas, certainement tu le pourras ; va donc et agis ainsi. Et maintenant le Seigneur a mis un esprit menteur dans la bouche de tous tes prophètes ; et le Seigneur a appelé sur toi le mal. Cela montre clairement qu’un esprit a choisi avec toute sa volonté et son propos de tromper et d’opérer le mensonge, et que Dieu s’est servi de cet esprit pour la mort d’Achab qui méritait de souffrir tout cela. Dans le premier Livre des Paralipomènes : Le diable suscita un Satan en Israël et il poussa David à recenser le peuple. D’après les Psaumes, un ange malin écrase certaines personnes. Dans l’Ecclésiaste, Salomon dit : Si l’esprit de celui qui a le pouvoir monte sur toi, ne quitte pas ta place, parce que la guérison arrêtera des péchés nombreux. Nous lisons dans Zacharie que le diable se tenait à la droite de Jésus et lui résistait. Isaïe dit que le glaive de Dieu se lève sur le dragon, le serpent pervers. Que dirai-je d’Ézéchiel prophétisant très clairement dans sa seconde vision au prince de Tyr au sujet d’une puissance contraire, lui qui dit aussi que le dragon habite dans les fleuves d’Egypte ? Tout le livre qui parle de Job parle-t-il d’autre chose que du diable, demandant que lui soit donné pouvoir sur tout ce que possède Job, y compris ses fils, et même sur son corps. Et cependant, il est vaincu par la patience de Job. Dans ce livre, le Seigneur par ses réponses nous a instruits abondamment sur la puissance de ce dragon qui nous est hostile. Voici les textes de l’Ancien Testament qui ont pu pour le moment se présenter à notre mémoire : ils affirment que des puissances contraires sont mentionnées dans les Écritures, s’opposent au genre humain et seront finalement punies. Traité des Principes: Livre III: Septième traité (III, 2-4): Première section

Les pensées qui viennent de notre coeur – la mémoire des actes passés ou la réflexion sur quelque chose ou cause que ce soit -, nous constatons que tantôt elles viennent de nous-mêmes, tantôt elles sont soulevées par les puissances adverses, parfois aussi elles sont mises en nous par Dieu et les saints anges. Mais tout cela paraîtra peut-être fabuleux, si ce n’est pas prouvé par des témoignages venant de la divine Écriture. Les pensées qui naissent de nous-mêmes, David les atteste quand il dit dans les Psaumes: La pensée de l’homme te louera et le reste de ses pensées célébrera pour toi un jour de fête. Celles qui viennent habituellement des puissances contraires, Salomon dans l’Ecclésiaste en témoigne ainsi : Si l’esprit de celui qui a le pouvoir monte sur toi, ne quitte pas ta place, parce que la guérison arrêtera des péchés nombreux. Et l’apôtre Paul lui aussi en donne témoignage en ces termes : Détruisant les pensées et tout orgueil qui se dresse contre la connaissance du Christ. Que cela vienne aussi de Dieu, David l’atteste pareillement dans les Psaumes : Bienheureux l’homme que tu t’attaches, Seigneur, il a des élévations dans son coeur. Et l’Apôtre dit que Dieu a mis dans le coeur de Tite. Que certaines pensées peuvent être suggérées aux coeurs des hommes par des anges, bons ou mauvais, cela est indiqué par l’ange qui accompagne Tobie et par ces paroles du prophète : Et l’ange qui parlait en moi répondit. Le livre du Pasteur affirme de même que deux anges accompagnent chaque homme : lorsque de bonnes pensées montent dans notre coeur, elles sont suggérées selon lui par le bon ange, et si ce sont des pensées contraires, elles sont soulevées par l’ange mauvais. Barnabé enseigne la même doctrine dans son épître lorsqu’il parle de deux voies, celle de la lumière et celle des ténèbres, auxquelles certains anges sont préposés : à la voie de la lumière des anges de Dieu, à la voie des ténèbres des anges de Satan. Mais il ne faut pas penser que ce qu’ils suggèrent à nos coeurs, qu’il s’agisse des bonnes ou des mauvaises pensées, produise autre chose qu’un mouvement ou un stimulant qui nous pousse au bien ou au mal. Nous avons la possibilité, lorsqu’une puissance maligne s’est mise à nous provoquer au mal, de rejeter loin de nous ces suggestions mauvaises, de résister à leurs persuasions perverses et de ne faire absolument rien de coupable ; et en revanche aussi celle de ne pas suivre la puissance divine qui nous invite à agir mieux, car le pouvoir du libre arbitre reste sauf dans l’un et l’autre cas. Traité des Principes: Livre III: Septième traité (III, 2-4): Première section

C’est pourquoi je pense que jamais peut-être l’homme ne peut vaincre par lui-même une puissance contraire sans utiliser l’aide divine. C’est pourquoi on dit qu’un ange lutta avec Jacob. Ce n’est pas pareil de dire, d’après la compréhension que nous en avons, qu’un ange lutta avec Jacob et qu’un ange lutta contre Jacob ; mais cet ange qui était à ses côtés pour son salut, qui, connaissant ses progrès, lui donna aussi le nom d’Israël, lutte avec lui, c’est-à-dire : il est avec lui dans la lutte et il l’aide dans le combat, alors qu’il y en avait sans aucun doute un autre, contre lequel Jacob luttait, contre lequel il menait le combat. Traité des Principes: Livre III: Septième traité (III, 2-4): Première section