Agostinho (Confissões) – A quoi bon philosopher?

Le bel avantage d’avoir, à moi tout seul, lu et compris! J’en ai parlé depuis avec tel et tel qui, sous des maîtres fort érudits, à l’aide non seulement de commentaires oraux mais de figures tracées par terre, avaient, disaient-ils, à peine compris. Ils n’ont pas su m’en dire plus long que ma lecture solitaire ne me fit connaître.

L’ouvrage au demeurant exposait, en un langage, me semblait-il, assez net, en quoi consistaient les substances, l’homme par exemple, et leurs accidents, soit, pour l’homme, sa forme extérieure, sa taille (tant de pieds), sa parenté (de qui est-il frère?), le lieu de sa résidence, l’époque de sa naissance, s’il est debout ou assis, chaussé ou armé, agent, patient, et tous les traits sans nombre relatifs les uns à ces neuf derniers genres (dont les quelques échantillons ci-dessus), les autres au genre mème de la substance.

Le bel avantage, quand c’était pour moi dommage! Eh oui, dans mon idée, ces dix prédicaments embrassaient l’universalité de l’être; alors, je m’efforçais à me faire de toi aussi, mon Dieu, pourtant merveilleusement simple et immuable, une idée, comme d’un être qui serait le support de ta grandeur et beauté, celles-ci se trouvant en toi comme sur un support, comme dans un corps, — alors que ta grandeur, ta beauté ne sont qu’un avec ton Être, tandis que nul corps n’est grand et beau par là mème qu’il est un corps, puisque moins beau et moins grand il ne laisserait pas que d’être un corps.

S. Augustin, Confessions, livre 4.