Si un agriculteur explique la puissance cachée dans une semence et si l’homme à qui il parle, ignorant l’agriculture, ne le croit pas sur parole, il suffit au paysan, pour prouver ce qu’il dit, de montrer dans une seule semence ce qu’il y a dans toutes celles d’un « médimne » et par elle de se porter garant de tout le reste. Quand on a vu un seul grain de blé ou d’orge ou toute autre graine contenue dans un « médimne » devenir un épi après son ensemencement en terre, on ne peut pas plus douter de l’ensemble que d’un seul. Aussi, à mon avis, le mystère de la Résurrection est suffisamment, prouvé, si les autres prédictions sont reconnues justes. Bien plus, nous avons l’expérience de la Résurrection et nous en sommes instruits, non pas tant par des discours, que par les faits eux-mêmes. Étant donné que la Résurrection constitue une merveille incroyable, le Christ commence par des miracles moins extraordinaires et habitue doucement notre foi à de plus grands. Une mère qui adapte la nourriture à son enfant, allaite de son sein au début la bouche encore tendre et humide ; puis, quand poussent les dents et que l’enfant grandit, elle ne commence pas à lui offrir un pain dur et impossible à digérer, qui par sa rudesse blesserait des gencives molles et sans exercice, mais avec ses propres dents elle mâche le pain, pour le mesurer et l’adapter à la force de celui à qui elle le donne ; enfin, quand le permet le développement des forces de l’enfant, elle le conduit doucement de nourritures plus tendres à une nourriture plus solide. Ainsi le Seigneur, vis-à-vis de la faiblesse de l’esprit humain : nous nourrissant et nous allaitant par des miracles comme un enfant encore imparfait, il donne d’abord une idée de la puissance qu’il a pour nous ressusciter par la guérison d’un mal incurable : cette action est grande, mais pas telle que nous ne puissions y croire. XXV
La résurrection n’est pas plus extraordinaire que le développement d’une semence XXVII
On dit que le « vif argent », versé du vase qui le contient sur un sol plat et poussiéreux, se répand à terre en minces paillettes. Si vous réunissez à nouveau ce qui est dispersé un peu partout, les éléments séparés se rassemblent spontanément et rien ne peut empêcher ce mélange naturel. Il se passe certainement, je pense, quelque chose d’identique en ce qui concerne le composé humain : que la possibilité lui en soit seulement donnée par Dieu et les parties se réunissent spontanément les unes aux autres, selon leurs rapports, sans que le restaurateur de la nature ait à produire aucun travail. Considérez les produits du sol : la nature n’a aucune peine à transformer le grain de blé, de millet ou quelque autre semence de blé ou de légumes en paille et en épis. Sans mal et spontanément, chaque semence aspire en elle de la terre commune la nourriture appropriée : pour toutes ces productions, le suc nécessaire est donné sous forme globale, mais chaque plante qui se nourrit de ce suc tire à elle pour son développement particulier, ce qui lui revient spécialement. Quoi d’extraordinaire si, dans le cas de la Résurrection, comme dans celui des semences, chaque ressuscité attire à lui les éléments qui lui appartiennent ? XXVII
De tout ceci vous pouvez conclure que notre enseignement sur la Résurrection n’est pas du domaine des faits qui sortent de notre expérience. Nous n’avons rien dit pourtant du fait qui nous est encore le plus connu, à savoir les débuts mêmes de la formation de notre être. Qui ne sait l’oeuvre admirable de la nature, ce que reçoit en lui le sein maternel et ce qu’il produit ? Ne voyez-vous pas que la semence jetée dans le sein maternel pour servir d’origine à notre organisme corporel est simple d’une certaine façon et présente des parties toutes semblables ? Or qui pourrait exprimer la variété de l’ensemble qui en est formé ? Si vous ne connaissiez les oeuvres ordinaires de la nature, pourriez-vous croire possible ce qui arrive, que le moindre petit élément soit l’origine d’une oeuvre pareille ? Et quand je parle d’une grande oeuvre, je ne regarde pas seulement la formation du corps, mais ce qui, plus que tout, est digne d’admiration, à savoir, notre âme et tous ses attributs. XXVII
Si, dans notre nature qui, selon l’enseignement de l’Apôtre, est double, – comprenant l’homme visible et l’homme caché, – l’un était premier et l’autre ne venait qu’ensuite, la puissance du Créateur serait convaincue d’imperfection : dans ce cas, elle ne suffirait pas à créer le tout dans son ensemble, mais elle diviserait son travail et s’occuperait une à une de chacune de ces deux parties. Dans le grain de blé ou dans n’importe quelle autre semence, sont déjà contenus en puissance tous les traits de l’épi, avec l’herbe, la paille, les fruits et les épis ; dans l’ordre suivi par la nature, aucun de ces éléments n’existe ou ne vient avant la semence, mais, selon une succession naturelle, la force intérieure à la semence se manifeste peu à peu, sans qu’une autre substance ait à s’y introduire. De la même façon, pensons-nous, dès le premier moment de sa formation, la semence humaine contient répandue en elle la puissance de la nature. XXIX