Homélies sur saint Luc Fr. 81 (Lc, 12, 52)
Dans ce récit évangélique il y a six rôles, mais une seule personne, la belle-fille, en joue deux, celui de belle-fille et celui de fille, selon qu’elle s’oppose à sa belle-mère ou à sa mère : et ainsi peut-il se faire que trois luttent contre deux et deux contre trois. Accédons au sens spirituel. Dans cette maison unique qu’est l’homme, les cinq sens, avant la venue du Logos, s’accordent pour vivre dans les plaisirs, mais, quand il est là, ils se séparent : d’un côté les deux sens plus philosophiques : la vue, qui nous permet de voir l’ordre du monde et d’admirer le Créateur, l’ouïe, par où nous vient l’enseignement du Verbe de Dieu ; de l’autre, les trois sens qui restent : le goût, l’odorat, le toucher, sens serviles, qui ne sont pas doués pour la philosophie. Ce sont ces trois sens qui s’opposent aux deux premiers.
La phrase : « Le père sera divisé contre le fils », doit être lue à partir d’un autre principe, sans lien avec ce qui précède : elle désigne littéralement la séparation des fidèles et des infidèles. Au sens symbolique « le père », l’intelligence, « s’oppose au fils », le raisonnement pervers en désaccord avec lui ; « et le fils contre le père », c’est le fils qui n’enterre pas son père mort ; « la mère contre la fille », c’est l’âme qui n’accepte pas son fruit mauvais ; « la fille contre la mère » : la mère est la matière, la fille, l’âme qui ne s’est pas encore unie à elle ; « la belle-mère contre la bru » : la mère de la loi, mari de l’âme qui lui est soumise, c’est le Saint-Esprit et elle abandonne le peuple de la circoncision ; « la bru contre la belle-mère », c’est le peuple qui s’est séparé de l’Esprit-Saint par son péché.